Les rivières de la mort

LE DRAME D'ERRACHIDIA FAIT 17 MORTS

17 morts et 29 blessés est le bilan du renversement de l’autocar sur un pont emporté par les crues dans la région d’Errachidia. Un drame terrible qui survient quelques jours seulement après la catastrophe de Taroudant.

Le Maroc pleure encore ses morts. Depuis début septembre 2019, plusieurs régions dans le sud du Royaume subissent une série de catastrophes provoquées par des crues et des inondations d’une ampleur sans précédent.

La dernière en date: le renversement spectaculaire d’un autocar, dimanche 8 septembre 2019, au niveau du pont Oued Damchan, dans la commune d’El Khank, à Errachidia. Un drame terrible qui a fait 17 morts et 29 blessés, selon un dernier bilan annoncé par les autorités. Une délégation officielle conduite par le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, s’est rendue sur les lieux. Elle était composée par le ministre de l’Equipement, de la logistique et des transports, Abdelkader Amara, et du commandant de la Gendarmerie royale, le général Mohamed Haramou. Si la présence de cette délégation semble être appréciée par les familles des victimes pour tenter de soulager leurs souffrances, il n’en demeure pas moins que certaines d’entre elles ont dirigé leurs critiques contre les autorités, particulièrement le ministère de l’Equipement et des transports, qui n’a pas procédé à la suspension de la circulation sur ce pont alors que les alertes étaient données par les riverains au moment où des pluies torrentielles s’abattaient sur la région.

Infrastructures inexistantes
Le chauffeur de l’autocar est également responsable du drame. Après avoir pris la fuite, le chauffeur, blessé, s’est finalement rendu à l’hôpital Moulay Ali Cherif d’Errachidia pour recevoir les soins nécessaires avant de se rendre à la police, qui l’a interrogé. Les rescapés de l’accident témoignent que le chauffeur n’était pas prudent sur le pont et conduisait à une vitesse excessive. Malgré les alertes et les cris des voyageurs pour l’interpeller à réduire la vitesse et s’arrêter carrément avant le pont, il s’est dangereusement aventuré sans se soucier de la sécurité des personnes transportées.

Les fortes crues et la fragilité du pont ont fait le reste. Parti de Rissani, dans la région d’Errachidia, en direction de Casablanca, l’autocar présente aussi des défaillances techniques qui pourraient justifier son immobilisation alors que les conditions météorologiques étaient très mauvaises.

Ce concours de circonstances a plongé tout le pays dans un drame qui a suscité une forte consternation sur les réseaux sociaux. Furieux et indignés, les Marocains ont manifesté leur colère contre les autorités et le gouvernement, qui n’ont rien fait pour ces régions lointaines où les infrastructures sont inexistantes et où la misère et la pauvreté battent leur plein. Chaque année, pendant l’été, ces régions sont victimes d’orages et de pluies diluviennes d’une violence parfois inouïe. Face à l’absence des ponts et des barrages d’une forte capacité, ces pluies provoquent des crues terribles qui emportent tout sur leur passage, causant ainsi des pertes humaines importantes et des dégâts matériels considérables.

Gestion des urgences
Le drame d’Errachidia survient quelques jours seulement après celui de Taroudant. Le mercredi 28 août 2019, 8 personnes ont trouvé la mort à la suite d’une crue subite d’une rivière qui a submergé un terrain de football dans le village Tizert, au sud de Taroudant. Les victimes sont un jeune de 17 ans et six hommes âgés qui assistaient à un match de football dans le cadre d’un tournoi local.

Des images impressionnantes, filmées par téléphone portable et diffusées sur les réseaux sociaux, montrent des eaux boueuses sortir du lit de la rivière et inonder le terrain en quelques minutes. Une partie des spectateurs, venus en famille, se réfugie sur une colline tandis que d’autres se retrouvent bloqués sur le toit d’un bâtiment rapidement submergé par les flots. Mais, contrairement à Errachidia, aucun haut responsable ne s’était rendu officiellement à Taroudant. Un manquement grave qui a suscité la colère des Marocains. Ces derniers ont aussi fustigé les responsables et les élus locaux qui ont autorisé la construction d’un terrain de football sur le lit de la rivière.

Des dégâts considérables
Alors qu’une enquête devait être enclenchée pour déterminer les responsabilités, la région panse encore ses plaies. Tout comme certaines régions du sud et d’autres du Nord qui demeurent exposées aux risques de crues. En 2014, des crues suite à des pluies torrentielles avaient fait une cinquantaine de morts et des dégâts considérables dans le sud du pays.

Une étude publiée en 2015 avait pointé de multiples défaillances au niveau de l’entretien des infrastructures, de la prévention, de l’alerte et de la gestion des urgences. Le Maroc a enregistré 40 épisodes d’inondations entre 1990 et 2019, avec des crues soudaines capables de transformer les lits secs des rivières en torrents violents et destructeurs, selon cette étude du groupe Zurich Insurance.

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