Les Marocains menacés de soif

LE CRI D’ALARME DE MOHAMMED VI

C’est la 5ème réunion présidée par le Souverain, dédiée à cette question hautement stratégique. Cela oblige ceux qui ne voulaient ni voir, ni croire, à prendre conscience que le Maroc manque déjà d’eau à boire.


Mercredi 17 janvier 2024, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a présidé, au Palais royal de Rabat, une séance de travail consacrée au suivi continu des mesures prises dans le cadre du programme national pour l’approvisionnement en eau potable et l’irrigation 2020- 2027, pour faire face au stress hydrique qui menace notre pays de soif. C’est la cinquième réunion présidée par le Souverain, entièrement dédiée à cette question hautement stratégique. Cela oblige aujourd’hui ceux qui ne voulaient ni voir, ni croire, à prendre conscience que le Maroc manque déjà d’eau à boire. Sans euphémisme, on a dépassé le stade de l’inquiétude. La situation va de pire en pis.

Les chiffres font peur : de septembre 2023 à mi-janvier 2024, le déficit pluviométrique a atteint 70% par rapport à la moyenne. Le taux de remplissage des barrages est de 23,2%, contre 31,5% à la même période de l’année dernière. Dans le bassin de l’Oum Er-Rbia, le taux de remplissage des barrages n’atteint même pas 5%. Le barrage d’Al Massira, qui approvisionne en eau entre autres le sud de Casablanca, Berrechid, El Jadida, ne contient que 32 millions de mètres cubes, pour une capacité de 2,7 milliards de mètres cubes. Tout compte fait, le taux de remplissage du bassin dépasse à peine 1% de sa capacité. Quel drame pour un pays qui s’est toujours vanté de sa politique pionnière des barrages !.

La quasi-totalité du pays est concernée par ce stress hydrique, et plus d’une vintaigne de communes se voient obligées de supporter des coupures d’eau potable de quelques heures par jour. C’est le cas d’Agadir, de Oujda ou encore de Skhirat. Même le nord de Casablanca et Rabat allaient être privés d’eau potable dès la dernière semaine de décembre 2023. Le pire des scénarios a été grâce aux mesures déployées par le gouvernement en application des directives royales. Il s’agit notamment de l’utilisation d’eaux non conventionnelles et de l’interconnexion des bassins hydrauliques du Sebou et du Bouregreg.

Que l’on se rende à l’évidence, la quantité d’eau disponible en surface et dans les nappes phréatiques ne suffit plus pour subvenir aux besoins en eau potable de la population marocaine. Depuis quelques années, le Maroc traverse un épisode de sécheresse historique. Au moment où nos ressources s’assèchent, certains regardent ailleurs comme si l’alerte ne les concernent pas : déperditions sur le réseau de distribution, gaspillages, pratiques aberrantes d’une agriculture qui représente 80% au moins de la consommation en moyenne annuelle... Que faudra-il encore pour les sensibiliser ? Tout bonnement, appliquer la loi, sans concession et sans faveur. Car même le plan d’action d’urgence présenté devant le Souverain prévoit, là où la situation l’exige, des mesures éventuelles de restriction de l’eau d’irrigation ou des débits de distribution.

Le changement climatique ne va pas s’inverser à court terme. La solution passe donc par un changement de nos comportements. A commencer par une agriculture plus responsable et plus consciente dont l’existence même, sans eau, sera remise en cause. Le dessalement d’eau de mer se révèle aujourd’hui comme une option incontournable pour approvisionner nombre de villes en eau potable et pour l’irrigation. Encore faut-il passer au peigne fin ses conséquences sur la faune et la flore et son coût faramineux ! La quasi-absence de débat sur ce sujet, sur l’irrigation, le gaspillage et les déperditions d’eau et la publication tardive des arrêtés préfectoraux restreignant la consommation d’eau et l’arrosage irresponsable des espaces verts et des Golfs démontrent à quel point même certains responsables ne prennent pas encore la pleine mesure de la situation. Le message sera-t-il entendu ? On peut toujours espérer... Heureusement - oui il faut en être conscient - que la plus haute autorité du pays ait fait sa priorité ce dossier !

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