À quand une autosuffisance en céréales?


Une bonne récolte de 98 millions de quintaux de blé pour la campagne 2017-2018


Bon an mal an, le Maroc continue d’importer du blé de l’étranger. La production nationale peine à atteindre l’autosuffisance malgré l’excellente récolte de cette année.

Il y a aura moins d’importations de céréales et notamment de blé cette année, mais l’on continuera à importer tout de même. Les prévisions de la campagne agricole 2017-2018, impactée positivement par les dernières précipitations généralisées sur l’ensemble du territoire national tablent sur une production céréalière excellente, soit 98,2 millions de quintaux, répartis entre le blé tendre (48,1 millions de quintaux), le blé dur (22,8 millions de quintaux) et l’orge (27,3 millions de quintaux).

Ces premières prévisions annoncées par le ministre de l’Agriculture, Aziz Akhannouch, à l’occasion des Assises de l’Agriculture à Meknès, viennent corroborer les estimations du département de l’agriculture américain concernant la récolte céréalière locale. Le ministère américain atteste que celle-ci sera cette année de 7,09 millions de tonnes, soit le double de la production enregistrée une année auparavant. Une évolution favorable qui tirera vers le bas les importations marocaines, devant chuter de 23%, précise encore la même source, relayée par le site économique américain Bloomberg.

Une récolte abondante qui permettra au Maroc de majoritairement couvrir ses besoins en blé, et donc, de ne pas avoir recours massivement à son premier fournisseur, la France, premier producteur et exportateur européen de blé, dont la récolte a été négativement impactée par les intempéries.Une tendance dépressive déclenchée en 2016, alors que les exportations françaises de blé ont baissé de 10 millions de tonnes, puis à six millions la campagne précédente. Une situation qui a poussé les acheteurs de blé africains à chercher des alternatives, notamment le blé russe.

Déficit commercial
Une importation conséquente en céréales et notamment en blé, en cette conjoncture économique actuelle, n’aurait pas été sans conséquences sur les équilibres macro-économiques et la balance des paiements surtout avec cette phase expérimentale du régime de change. Heureusement, les importations vont baisser de près de 25% par rapport à l’année écoulée.

Mais encore faut-il que les cours internationaux des céréales ne soient pas inscrits dans une tendance haussière pour que l’impact sur les réserves en devises ne soit pas important. Le cours du blé a de nouveau bondi mardi 1er mai 2018 à Chicago après la publication d’indicateurs sur la piètre qualité des récoltes d’hiver et sur la lente progression des récoltes de printemps, le maïs et le soja s’appréciant également. Le cours du blé a bondi de 8 à 10 dollars/tonne. Le cours du maïs a atteint un plus haut niveau depuis quasi deux ans. Les cours européens s’inscrivent aussi en hausse, amortis relativement par la hausse de l’euro face au dollar. C’est dire que la baisse de la quantité des importations sera tempérée par la hausse des cours internationaux du blé sachant que notre fournisseur principal, la France, connaît une baisse de production qui le poussera à revoir à la hausse ses prix.

Sécurité alimentaire
Une lecture des dernières statistiques des indicateurs mensuels des échanges extérieurs du mois de mars 2018 de l’Office des changes, montre une hausse du déficit de la balance commerciale de 10,6% à 48,70 milliards de dirhams (MMDH) à fin mars 2018, contre 44,02 MMDH lors de la même période en 2017. Ainsi, les importations ont atteint 117,14 MMDH fin mars 2018, contre 108,21 MMDH en mars 2017, soit une hausse de 8,2%. L’accroissement des importations est dû à l’augmentation des achats de tous les groupes de produits, particulièrement des biens d’équipement (+12,4%), des produits finis de consommation (+7,8%) et des produits alimentaires (+14,3%), notamment le blé (+29,2%).

L’expert américain en climat et en environnement à la Nasa d’origine marocaine, Lahouari Bounoua, avait mis en rapport le changement climatique avec la sécurité alimentaire dans une analyse publiée sur le site d’informations australien SBS en soulignant que la production de blé au Maroc va diminuer fortement après 2030. Selon lui, si le changement climatique affecte le monde entier, l’Afrique y est plus vulnérable en raison de la dépendance des économies africaines vis-à-vis de l’agriculture et de la démographie du continent. Si le Plan Maroc vert a pris en compte cet élément dans ses recherches agronomiques visant à mettre en place des variétés de blé tendre surtout résistantes à la sécheresse et économes en eau avec un rendement meilleur, le résultat se fait attendre toujours avec l’espoir d’atteindre l’autosuffisance en cette denrée vitale synonyme de sécurité alimentaire au Maroc.

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