Avec un taux de croissance culminant à 5,1% par an
Sans tomber dans un afro-pessimisme excessif, ni dans un afro-optimisme irréaliste, on peut considérer sans a priori que l’Afrique est un continent qui change vite dans sa globalité comme dans sa diversité. Hier afro-pessimistes, les observateurs internationaux, du moins la majorité d’entre eux, ont fini par changer leur discours sur le continent et son économie.
L’heure est de moins en moins aux analyses généralisantes sur un continent où les économies évoluent à des vitesses variées. De nouveaux secteurs d’activité émergent comme d’autres domaines connaissent des transformations structurelles; la distribution moderne, l’agro-industrie, les services financiers où les révolutions digitales sont en train de changer aussi bien l’assurance que la banque. Il ressort aussi de tous les rapports d’experts que non seulement les services mais aussi l’agriculture et la mobilisation des infrastructures, notamment dans le domaine de l’énergie, sont les secteurs à fort potentiel.
Certes, ceux qui opèrent en Afrique savent quels sont les problèmes quotidiens auxquels ils sont confrontés, des infrastructures au climat des affaires. Pour eux, l’optimisme béat n’est pas de mise. Néanmoins, le monde a changé et l’Afrique avec lui. D’ailleurs, les investisseurs internationaux, qu’ils soient chinois ou américains, ne s’y trompent pas: ils ne portent plus sur l’Afrique le même regard qu’il y a trente ou quarante ans.
C’est vrai, l’Afrique change, en bien, mais c’est aussi parce qu’elle profite au même moment du basculement de la richesse mondiale qu’elle a affiché, du moins jusqu’en 2014, des taux de croissance plus élevés et plus stables que par le passé. En effet, depuis le début des années 2000, le produit intérieur brut (PIB) réel du continent africain croît chaque année en moyenne de 5,1%. C’est deux fois plus que durant la décennie précédente et mieux que les autres régions du monde, notamment l’Europe depuis la crise de 2008/2009. Ce n’est pas pour autant un long fleuve tranquille. Cette tendance positive n’a pas manqué de connaître des accidents, notamment en 2009, lorsque la chute de la demande a affecté les pays industrialisés, touchés de plein fouet par la crise financière mondiale, et en 2011, quand le “Printemps arabe” a gelé soudainement la croissance de la Tunisie, de l’Egypte et de la Libye.
Dépendance à l’égard des marchés étrangers et fragilité politique et sociale restent ainsi des risques majeurs pour les économies du continent. Mais, à chaque fois, la croissance rebondit, et l’Afrique au sud du Sahara ou l’Afrique de l’Est confirment la tendance de moyen terme. Au-delà de la bonne performance des économies africaines, qui ont connu une envolée soutenue du niveau de la demande et des prix mondiaux des matières premières, qu’est-ce qui a changé par rapport aux années de l’afro-pessimisme ? D’abord, le nombre d’Africains. Ils sont officiellement plus de 1 milliard. Soit autant de personnes à nourrir, à vêtir, à loger, à équiper en téléphones portables.... La demande est devenue, et deviendra encore plus, un des principaux moteurs de la croissance des pays africains.
Par ailleurs, les économies africaines sont, dans l’ensemble, plus pacifiées. Moins de guerres intestines et transfrontières. Moins de conflits ouverts. Qui plus est, la nature des tensions civiles change. Pour preuve, la multiplication des manifestations revendiquant plus de transparence, d’équité et de probité dans la gestion des affaires publiques, qui l’emportent de plus en plus sur les violences politiques. Ajoutons à cela le fait que la gouvernance économique connaît une amélioration notable, en tout cas pour ce qui concerne la gestion des indicateurs macro-économiques.
Toutefois il ne faut se contenter de dire que tout va bien. Car, en dépit de cette accumulation de richesses des dernières années, le continent reste confronté à des difficultés aussi importantes que l’insécurité alimentaire, le chômage des jeunes, la pauvreté et une intégration insuffisante du continent dans l’économie mondiale.