DR. Ghita El Khayat, psychiatre : “L’Pouffa est un véritable danger public”


Docteur Ghita El Khayat pense que malgré la propagation de certaines drogues comme récemment L’Pouffa, le Royaume semble relativement indemne. Mais il n’en reste pas moins qu’il y a péril en la demeure, insiste-t-elle. Et qu’un grand effort de sensibilisation est encore à mener.

L’Pouffa est une drogue dont on parle beaucoup ces derniers temps et qui fait des ravages chez les adolescents marocains. Quelles sont les conséquences de cette drogue sur la santé mentale des consommateurs?
Ghita El Khayat : L’Pouffa est une drogue fabriquée à partir de restes de cocaïne mélangée à d’autres éléments qu’on ne connaît pas précisément. Déjà, la cocaïne est une horreur qui exerce des effets très graves sur la santé des consommateurs. Et le fait de la mélanger avec des produits toxiques rend cette drogue encore plus dangereuse. C’est un véritable danger public et il va falloir prendre des mesures beaucoup plus fortes que cela.

Est-ce que son danger réside dans le fait qu’elle soit financièrement accessible?
L’Pouffa est non seulement moins chère, mais elle s’avère plus efficace que la cocaïne elle-même. C’est-à-dire que l’effet recherché par les consommateurs, à savoir le “shoot” (planer) est rapidement trouvé. Il faut savoir que les drogues se démocratisent de plus en plus. Et cela touche toutes les classes sociales. En plus, c’est un phénomène mondial.

Mais les enfants de la rue sont probablement plus exposés que d’autres…
Oui, ils sont probablement plus exposés, mais on ne connaît pas leur nombre ni leur identité, parce qu’ils ne viennent pas nous voir. Il faut peut-être les forcer à une réadaptation sociale et une réhabilitation dans des centres spéciaux.

Quelles sont les conséquences de cette drogue sur la santé mentale?
Les conséquences sont gravissimes. Toutes les drogues sont toxiques. Pour moi, L’Pouffa produit les mêmes dangers psychiques que le tabac, le cannabis ou toute autre drogue nocive. Elles ont, toutes, des effets dévastateurs sur le système nerveux et la santé mentale de la personne.

Pensez-vous que le Maroc est une terre fertile pour les drogues dures?
Pour moi, le Maroc est relativement indemne des drogues puissantes par rapport à plusieurs pays comme les États-Unis où plus de 300.000 personnes meurent chaque année à cause de la consommation de la fentanyl qui est une drogue de synthèse peu onéreuse mais extrêmement puissante. Créée à l’origine pour soulager les patients atteints d’un cancer, la fentanyl est réputée 50 fois plus mortelle que l’héroïne et 100 plus que la morphine.

Que pensez-vous des efforts de l’État dans la lutte contre ce phénomène?
Je pense que l’État marocain est fort dans ce domaine. En matière de psychiatrie, les pharmacies ne donnent pas de médicaments si le patient ne présente pas d’ordonnance. Cela veut dire qu’il y a une surveillance dans ce domaine. Maintenant, sur le plan du trafic, il y a des “brigades de stups” qui ont un énorme boulot à faire.

Comment se passe la prise en charge des personnes toxicomanes au Maroc?
Dans la réalité, il est très difficile de soigner les personnes toxicomanes. Et ce, quelle que soit la nature de l’addiction. En plus, il faut avoir de l’expérience car certains patients peuvent se montrer violents ou encore pervers. Mais il y a des centres de traitement de la toxicomanie qui se multiplient de plus en plus dans notre pays.

Que peut-on faire pour lutter efficacement contre la consommation de la drogue?
Il faut intervenir dès les premières classes du collège. Il faut faire des campagnes généralisées, informer les gens et insister sur le fait que que cela détruit puissamment la personne, sa famille et son entourage. La drogue est une arme de destruction massivel

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