Couverture sociale des travailleurs domestiques: Des chiffres inquiétants

Seuls 4.523 travailleurs domestique ont été déclarés à la CNSS à fin septembre 2021, sur l’ensemble du territoire national, d’après les statistiques dévoilées par l’institution de prévoyance sociale. Un nombre très faible qui interpelle.

Nombreux ont été les travailleurs domestiques qui s’étaient réjouis de l’entrée en vigueur de la loi sur leur couverture sociale à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), le 3 juin 2019 et devenue effective un an plus tard, en juin 2020. Plusieurs Marocains, y compris les associations et ONG de défense des droits de l’Homme avaient vivement applaudi cette décision du gouvernement marocain qui ressemblait, à leurs yeux, à une réponse à une vieille doléance. Une manière aussi de bannir l’exploitation de cette catégorie par leurs employeurs.

Plus d’un an plus tard, cette réjouissance vire à l’étonnement. Les fruits n’ont pas tenu la promesse des fleurs. La lueur d’espoir cède la place aux leurres. Les chiffres officiels confirment ce triste constat. Seuls 4.523 travailleurs domestiques ont été déclarés à la CNSS à fin septembre 2021, sur l’ensemble du territoire national, d’après les statistiques dévoilées par l’institution de prévoyance.

«Nous restons à des niveaux très faibles par rapport aux objectifs initialement prévus dans le cadre du chantier de la généralisation de la couverture sociale», a déploré Hassan Boubrik, directeur général de la CNSS, lors du lancement de l’immatriculation de neuf nouvelles catégories professionnelles indépendantes à l’Assurance maladie obligatoire (AMO), le mercredi 1er décembre à Casablanca.

Digitaliser les procédures
A l’en croire, la complexité des procédures pourraient dissuader certains employeurs. «Aujourd’hui, si vous êtes employeur et que vous voulez déclarer votre employé de maison, il existe un contrat type. Il faut le signer, le légaliser, le déposer auprès du ministère du travail et de la CNSS par la suite pour réussir l’immatriculation. Une procédure extrêmement compliquée», reconnaît- il. Autre facteur qui pourrait aussi expliquer ce faible nombre d’immatriculation, l’instabilité de ce personnel qui peut changer d’employeur à plusieurs reprises. Les employés de maison ne sont pas toujours stables dans leur poste.

C’est compliqué pour un employeur de se déplacer et de refaire la procédure trois à quatre fois par an parce qu’il y a un turnover. Selon lui, «il n’y a pas de mauvaise volonté. Il faut simplifier le processus et le digitaliser au maximum si on veut que ça progresse », précise-t-il. Pour encourager les employeurs à déclarer leur personnel, il suggère de simplifier les démarches et surtout digitaliser les procédures. Un chantier dans lequel sa structure s’est engagée de fort belle manière et qui devrait inspirer les autres administrations concernées.

Si certains employeurs pourraient évoquer ces contraintes et lourdeurs administratives pour justifier la non-immatriculation de leurs femmes de ménage, chauffeurs, gardiens, jardiniers, etc., d’autres manquent d’arguments pour expliquer leur attitude. Ils préfèrent ignorer cette décision pour mieux exploiter leur personnel, en les privant de leurs droits les plus élémentaires comme la durée de travail fixée à 48 heures par semaine, contre 40 heures pour les personnes âgées entre 16 et 18 ans. Leur rémunération ne doit pas non plus être inférieure à 60% du SMIG.

Ces travailleurs doivent aussi bénéficier de l’Assurance maladie obligatoire, de l’indemnité pour perte d’emploi, du congé de maternité, des indemnités journalières de maladie, et des allocations familiales, comme le stipule la loi sur leur couverture sociale. Autant de manquements qui interpellent l’inspection du travail, dont le rôle est justement de veiller à l’application de ces dispositions. Le cas échéant, beaucoup d’employés de maison continueront à souffrir le martyre, dans l’anonymat

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