Relations économiques Maroc-Inde : Cap sur le sous-continent indien

Les relations économiques entre Rabat et New Delhi se développent, mais présentent un grand potentiel de croissance encore peu exploité. En dehors des phosphates, engrais et autres dérivés, les entreprises marocaines ont tout à gagner dans un marché de 1,4 milliard de consommateurs.


Depuis le début de règne de Mohammed VI, le Maroc a démontré qu’il est décidé à ne plus mettre tous ses oeufs dans le même panier. Sur le plan économique et géostratégique, le Royaume a multiplié ses partenariats avec de nombreux pays autres que les États-Unis et les ceux de l’Union européenne (UE) principalement: avec la Russie, la Chine,… et l’Inde, cinquième puissance économique mondiale. Ce géant asiatique, qui a enregistré une croissance remarquable de 6,8% en 2022, est fort d’un marché de 1,4 milliard de consommateurs et d’un produit intérieur brut (PIB) par habitant qui dépasse les 7.000 dollars par an.

Industrie en plein essor
Accéder au marché indien est aussi une occasion de s’ouvrir sur le grand marché d’Asie du Sud-Est. Les deux visites officielles de Mohammed VI en Inde, au début de son règne en février 2001 puis en octobre 2015 à l’occasion du Sommet Inde-Afrique, ont auguré d’une nouvelle ère dans les relations bilatérales, politiques et surtout économiques. Depuis, les échanges commerciaux se sont développés considérablement. En 2022, ils ont atteint le montant significatif de 4,1 milliards de dollars. Plus récemment, HCL Tech, un géant indien de l’outsourcing, s’est implanté en juillet 2023 au Maroc, devenant ainsi la 37e entreprise indienne à investir dans le Royaume. Grâce aux bonnes relations commerciales entre les deux pays, de nombreuses entreprises indiennes s’étaient installées au Maroc, parmi lesquelles Tata Motors, Mahandria -toutes deux spécialisées dans le secteur automobile, une industrie en plein essor au Maroc- et Samta, qui travaille les métaux.

Selon les informations rapportées par le quotidien The New Indian Express, en août 2023, Errachid Alaoui Mrani, le ministre conseiller et chef adjoint de la mission du Maroc à New Delhi, a indiqué que pour le Maroc, l’Inde représentait le principal marché asiatique pour l’exportation de phosphate. En effet, l’Inde importe 1,1 million de tonnes de phosphate naturel en provenance du Maroc, ce qui équivaut à 22% de ses importations totales, ainsi que 1,2 million de tonnes d’acide phosphorique, représentant 50% de ses importations totales.

De plus, le Maroc s’engage activement à renforcer sa relation avec l’Inde, en introduisant des visas électroniques pour les citoyens indiens. Le système de visa électronique mis en place par le Maroc a déjà attiré plus de 15.000 demandeurs depuis son lancement en juillet 2023. En réponse, l’Inde envisage également d’adopter une démarche similaire au profit des touristes marocains. Des discussions sont également en cours pour établir une connectivité aérienne directe entre les deux pays. Le Maroc a désigné un représentant officiel de l’Office national du tourisme du Maroc (ONMT) dans le but de renforcer davantage ses relations avec l’Inde. “Le partenariat stratégique entre le Maroc et l’Inde repose sur le commerce et l’investissement, la défense et la sécurité, la culture et la connexion entre les peuples et la résolution commune des défis mondiaux”, avait déclaré Errachid Alaoui Mrani.

Solidité des relations bilatérales
De son côté, l’Inde a augmenté ses exportations militaires vers le Maroc et approvisionne également le Royaume en téléphones portables, textiles et produits pétroliers. En termes de stock (encours) d’investissements directs étrangers, l’Inde occupe la 20ème position avec 2,17 milliards de dirhams en 2021. Ces investissements ont stagné en 2022.

“Depuis ces dernières années, les relations économiques et les échanges commerciaux entre le Maroc et l’Inde se sont bien développés mais restent peu diversifiés de manière générale. Ils se concentrent sur les exportations des phosphates et des fertilisants et dérivés, importants pour l’agriculture indienne. L’inde exporte des produits chimiques et des véhicules. Nombre d’entreprises se sont installés au Maroc comme TataMotors.

C’est dire qu’il y a une volonté accrue d’investissement au Maroc notamment dans le domaine pharmaceutique”, nous confie Ali Moutaib, directeur de l’Ecole de guerre économique (EGE) à Rabat. Pour ce spécialiste de la stratégie économique, du fait de la solidité des relations bilatérales, le Maroc a été avantagé lors de la crise sanitaire de la Covid-19, lorsque New Delhi a privilégié le Royaume par rapport aux importations des vaccins Astrazeneca anti-Covid, à un moment où il y avait des restrictions d’exportations. Il est vrai, explique- t-il, qu’il s’agissait de laboratoires britanno-suédois, mais leur plus grande usine se trouve en Inde. “L’Inde est un partenaire stratégique majeur pour les prochaines années eu égard à la taille de son marché et à son tissu industriel très dynamique.

Il y a moyen de booster ces échanges. C’est un pivot asiatique majeur bien présent sur les secteurs stratégiques comme l’agriculture, les technologies et l’aérospatial et l’intelligence artificielle, entre autres. Dans sa stratégie de multipolarité et de diversification, le Maroc aurait à gagner à créer des ponts entre l’Inde et l’Afrique. Aussi, le Maroc pourrait être un partenaire fiable et un pont pour les investisseurs indiens vers l’Afrique via la création de joint-ventures”, conclut Ali Moutaib.

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