L’Union générale des journalistes arabes condamne l’acharnement du Parlement et des médias européens contre le Maroc dans le cadre de l’affaire Pegasus. Elle constate non seulement l’absence de preuves mais aussi l’obstination des institutions européennes à ne pas prêter attention aux arguments du Royaume. Le point avec Younes Mjahed.
Vous avez participé tout récemment à une réunion de l’Union générale des journalistes arabes consacrée à l’affaire Pegasus. Quelle a été sa réaction face à l’acharnement des institutions et médias européens contre le Maroc ?
La campagne orchestrée par le Parlement européen contre le Maroc, sur fond d’accusations d’espionnage des téléphones des journalistes à l’aide du logiciel Pegasus, a pris des tournures inquiétantes. On ne peut pas tolérer que cette affaire continue d’être médiatisée en se basant sur des intox qui portent atteinte à l’image du Maroc. Nous n’avons décelé aucune preuve technique tangible. Toutes leurs fausses accusations sont basées sur les rapports Fobiden et Amnesty qui ne s’appuient sur aucune preuve. Puis, certains médias européens notamment français ont relayé les allégations contenues dans les rapports des ONG comme si c’était du Coran. Sans prendre la peine de vérifier et recouper les informations, faisant fi de la déontologie professionnelle.
Une délégation marocaine a assisté à la réunion du Secrétariat général de l’Union générale des journalistes arabes, le 21 février 2023, à Riyad. La délégation était conduite par Abdellah Bekkali, premier vice-président de l’Union et moi-même, en ma qualité de Consultant politique en relations internationales de cette organisation. Nous avons mis à nu les contre-vérités ciblant le Royaume. Les membres de l’Union générale des journalistes arabes se sont rendus à l’évidence de l’incapacité du Parlement européen et des ONG accusant le Maroc à fournir des preuves et des arguments techniques et que l’affaire demeure basée sur des allégations infondées.
L’Union s’étonne, dans ce sens, de l’attitude de la justice française qui a rejeté le droit du Maroc d’exiger des preuves des accusations infondées des ONG, colportées par la presse occidentale. Elle ne comprend pas comment les juridictions de l’Hexagone acceptent d’examiner les plaintes déposées par des journalistes français contre le Maroc pour espionnage de leurs téléphones, sans fournir d’expertise technique indépendante à ce sujet. L’Union condamne, dans la même lignée, la position du Parlement européen qui refuse d’examiner des rapports et des recherches menées par des experts, de diverses nationalités, qui confirment l’absence de fondements des allégations ciblant le Royaume, sans permettre à ce pays de présenter ses propres arguments et de se défendre pour prouver son innocence.
Elle est arrivée à la conclusion que la campagne de déstabilisation systématique est orchestrée par certains pays européens en vue de faire pression, politiquement et diplomatiquement, sur le Maroc. L’Union a pris le dossier en main. En plus du communiqué, elle va établir des contacts avec ces ONG pour demander des comptes. Il y aura d’autres réunions dans des pays arabes ou européens sur ce sujet.
En l’absence de preuves qui appuient leurs accusations, comment analysez- vous cet acharnement des institutions et médias européens sur le Maroc ?
L’affaire Pegasus n’est ni la première ni la dernière. Cette propagande politique et diplomatique, oeuvre de certains pays européens, enfantera d’autres affaires tant que les puissances européennes ont les mêmes intérêts. Je voudrais tirer la sonnette d’alarme. Car les agissements des Européens comportent des risques énormes, mal calculées. On a déjà assisté dans un passé récent à des rapports portant sur des accusations graves contre des pays qui se sont révélées fausses et sans fondement. Malheureusement, les choses ne se sont pas arrêtées à ce stade. Car certains de ces rapports ont servi d’alibi à des guerres avec des conséquences destructrices irréversibles. Quant à l’affaire Pegasus, les rapports disent que 20 pays ont utilisé Pegasus. Bizarrement, on ne parle que du Maroc.
Pensez-vous que la France est derrière cette campagne de propagande ?
La France ? Cela se reflète dans nombre de ses positions et dans l’attitude de ses médias publics, étatiques et même privés dont le tour de table capitalistique est lié au pouvoir. Les derniers développements géostratégiques dans notre région pénalisent en premier lieu la France. L’hexagone perd position et pied en Afrique et ne veut pas abandonner les accords qui mettaient ses anciennes colonies sous sa tutelle. Son moyen de pression consiste à garder le tracé post-colonial des frontières de l’Etat chérifien.
Le Maroc est le premier pays qui a commencé à casser cette hégémonie post-coloniale. La France ne tolère pas que l’ère nouvelle au Maroc ait balayé d’un revers de la main ce paradigme. Ce qui veut dire que les attaques récentes contre le Maroc n’est que la partie émergeante de l’iceberg. Il faut s’attendre au pire. Ce n’est que le début d’une guerre orchestrée par les puissances européennes contre le Maroc. Celles-ci vont encore sortir d’autres affaires. Les accords secrets concoctés entre la France avec le pouvoir politico-militaire en Algérie courent toujours, en dépit des contradictions et des désaccords diplomatiques entre Paris et Alger qui planent sur la surface de temps à autre.
Croyez-vous que le paysage médiatique nationale, confronté à des difficultés structurelles et technologiques, est à même de repousser ces attaques étrangères ?
Je vous mentirai si je dis oui. On ne peut défendre nos intérêts avec le paysage médiatique actuel. Son rayonnement régional, continental et international, est faible. Il va falloir qu’il y ait des investissements dans les ressources humaines (formation continue notamment) et dans la restructuration et la mise à niveau des entreprises de presse privées et publiques. On ne peut pas régler le problème avec des influenceurs ou des youtubeurs quand il s’agit d’une cause nationale ou d’un sujet d’une grande sensibilité politique ou géopolitique.
La presse marocaine a un faible impact sur le plan régional et continental. Contrairement au modèle égyptien qui est un cas d’école en la matière. Au sein du paysage médiatique national, il faut un plan stratégique de mise à niveau qui implique tous les acteurs (éditeurs publics et privés, Etat, Syndicat national de la presse marocaine), sans exception aucune. Quand on parle de la France, pays de la diversité et de la pluralité médiatique, les médias se forment en un seul bloc pour défendre leur pays.