Les Marocains, méfiants, n’ont pas été nombreux à télécharger l’application Wiqaytna, dont l’efficacité dépend d’une utilisation massive. Pourtant, le nombre de foyers épidémiques et de décès ne cesse d’augmenter.
Les applications de traçage peuvent s’avérer efficaces dans la lutte contre la propagation du Covid-19. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) l’a, d’ailleurs, rappelé cette semaine, en exhortant les pays à prendre toutes les précautions sanitaires nécessaires, avec un accent particulier sur la recherche des contacts, pour essayer de freiner la propagation du coronavirus.
«Les applications mobiles de suivi des contacts peuvent aider à la recherche de contacts, mais rien ne remplace les ressources et une présence sur le terrain», souligne, toutefois, l’OMS. Si ce genre d’applications de traçage a été très efficace dans la lutte contre la pandémie dans les pays asiatiques, dont la plupart les ont rendues obligatoires, au Maroc, les choses semblent être au ralenti. En dépit des campagnes de sensibilisation et de communication, l’application Wiqaytna n’a pu être téléchargée que 2 millions de fois, ceci sans compter les cas de désinstallation. Pourquoi cette application a été un flop? La méfiance.
Les Marocains n’ont pas eu recours massivement à son installation, de peur que l’Etat recueille leurs données personnelles. «L’application recueille des informations de proximité relatives aux identifiants cryptés et non pas d’informations de contact. Aucune donnée personnelle n’est collectée. La Commission nationale de contrôle de la protection des données à caractère personnel (CNDP) a été associée dès le début du développement de l’application, soit début avril, et a donné son accord.
Elle a même mis en place un comité ad-hoc pour suivre le développement de l’application et audité ce qui a été mis en place», a déclaré Zouheir Lakhdissi, PDG de Dial Technologies, l’un des développeurs de l’application Wiqaytna. De même, dans un souci de transparence, le code source de l’application a été partagé avec la communauté des développeurs. Une première au Maroc. Pour le DG de Dial Technologies, l’application a permis de digitaliser le processus de suivi de la propagation du Covid-19 et a démontré largement son efficacité, puisqu’elle permet de remonter des cas positifs et des cas contacts d’une manière précise.
Mais, pour être véritablement efficace, elle doit être massivement téléchargée. «Si certains doutent de la démarche des autorités et craignent qu’on exploite leurs données personnelles, malgré toutes les garanties apportés par l’Etat, ils ne lésinent pas sur le téléchargements d’applications connues pour leur exploitation des données personnelles. On ne télécharge pas Wiqaytna, dont le code source est public, mais on préfère installer des applications, notamment de réseaux sociaux, qui peuvent accéder, sans ta permission, à ta caméra, microphone, contacts, messages, photos, vidéos, et peuvent, même à ton insu, appeler d’autres contacts», nous déclare un expert en cyber-sécurité.
Une question de sécurité
Quand on voit la limitation spectaculaire de la propagation de la pandémie dans certains pays asiatiques comme la Chine ou la Corée du Sud, grâce particulièrement aux applications de traçage, on se pose des questions. Des applications qui rappelons-le, pour la plupart, recueillent vos informations personnelles et vos données GPS, «une violation de la vie privée», avaient décrié les défenseurs des droits de l’homme. Une violation qui, pour information, ne concerne par l’application marocaine, qui ne recueille aucune donnée personnelle.
Lorsque l’on assiste encore à l’apparition de plusieurs foyers épidémiques au Maroc et l’augmentation considérable de cas de décès ces derniers jours, pour des questions d’intérêt public, de santé et de sécurité, le Maroc, n’aurait-il pas mieux fait de rendre l’installation de Wiqaytna obligatoire?.