Tunisie... au-delà du désastre US, en fuite de Kaboul

Les Islamistes d’En-Nahdha n’ont jamais été de réels alliés, mais de simples pions de l’immense échiquier US.

Événement mondial considérable de la fin du mois août 2021: Le dernier soldat américain a quitté, avec un jour d’avance, l’Afghanistan. Suite à une défaite réelle, et après la plus longue guerre commencée par les États Unis de leur Histoire. Guerre de 20 ans, devenue désastreuse au fil de l’enlisement. Des milliers de morts, des dizaines de milliers de blessés et des pertes que des estimations de sources sérieuses, évaluent entre 1.400 et 2.300 milliards de dollars! Chiffres ahurissants, quand on sait que la Tunisie en panne économique a toutes les peines pour trouver, du côté des plus grandes institutions financières mondiales, 3 à 5 milliards de ces «précieux billets verts» pour clore son budget. Une Tunisie pillée par ses malfaiteurs.

Tirs de joie à Kaboul et dans l’aéroport évacué, du côté des Talibans, vainqueurs. Un mouvement islamiste, sunnite, radical, mais non de cet Islam à exporter, ailleurs, tel le wahhabisme et autres salafistes. Talibans, se «consolant» de vouloir être maîtres chez eux, résistant au modernisme, à l’occupation étrangère, et niant une période peu connue où l’Afghanistan a été un État qui se voulait sobrement moderne, donnant priorité à l’éducation, la santé, la culture, et femmes, années 60/70, en jupes presque courtes. Cet Afghanistan a existé, autant moderne que la Tunisie et le Liban des mêmes époques…

Depuis la Tunisie et le Liban ont, à leurs tours, pris de si mauvais chemins! Mais une résistance au bord des plages ne peut être celle dans les rageuses montagnes, certaines de plus de 5 mille mètres d’altitude… Ça donne à réfléchir! Ce départ du dernier soldat US de Kaboul sonne-t-il le glas de la puissance considérable américaine? Je ne le crois pas. Les États Unis ont connu d’autres grandes et mini défaites. La plus retentissante est celle de l’évacuation débâcle, en 1975 du Vietnam. Mais en 2021, les États Unis ne sont plus les maîtres incontestés, auréolés du Prestige de l’État de Droit, et Puissance numéro un du «Bien», contre les axes du «Mal»…

D’ autres forces montent en puissance. Parce que les États Unis n’ont plus la lucidité d’être toujours du côté du bon Droit des Peuples. Ils sont devenus aveugles et complaisants avec des régimes compromis, en dictatures et corruptions. Parce que les États Unis les considèrent comme leurs alliés, marchant à leurs ordres et désirs. Au-delà du soutien intense, aveugle à un Israël de plus en plus arrogant et expansif. Mais cela, c’est de la «politique intérieure américaine»...

La débâcle de l’Afghanistan a pour raison d’avoir fait confiance à des dirigeants afghans compromis, corrompus, d’où l’écroulement et de l’État Afghan et de son armée, gangrenée de l’intérieur. Le premier Afghan à fuir fut le Président qui, depuis des semaines, se prélasse dans les fameux faux paradis des pays du Golfe. Ceci, c’est pour dire qu’en Tunisie, les Américains, depuis 2011, ont aussi misé sur de mauvais «canassons», les Frères Musulmans.

Dans un cadre plus global, allant de l’Égypte au reste du Monde Arabe. C’était à la suite de réelles révoltes populaires contre d’anciens dictateurs… Notre 14 Janvier 2011 à Tunis, Sfax et ailleurs. Place Et-Tahrir, Le Caire … Dictateurs d’hier pour un grand nombre, amis et alliés des mêmes États Unis. De Ben Ali à Moubarak … En Tunisie, le choix de l’administration démocrate de Barack Obama-Mme Clinton fut les Islamistes d’En-Nahdha, filière alors inconditionnelle des autres Frères Musulmans d’Égypte et d’ailleurs. Le tout a tourné, grâce à l’Égypte et à la Syrie, à une confusion et défaites générales.

Dernier récent naufrage, celui des Frères Musulmans tunisiens… Voilà juste quelques mois, ils étaient sur un beau bateau de luxe, au large de Hammamet. Les voilà, depuis le 25 juillet 2021, presque, en petits groupes sur de frêles barques de sauvetage, naviguant chaque groupe dans des directions différentes. Et commençant à s’accuser les uns les autres. Leurs chances? Les eaux de Hammamet ne sont pas tant agitées, vagues modérées, sans quoi ils auraient plus vite sombré… Clémence du nouveau chef d’Etat tunisien Kaies Saied? Hier encore victime, méprisé, de leurs arrogances et sarcasmes… Hier, c’était l’aéroport de Kaboul… Demain l’aéroport de Tunis Carthage? Une opération américaine évacuant leurs alliés, aidés depuis 2011, à diriger la Tunisie, malgré leurs passés douteux et malgré leur incompétence?

J’ai des doutes, parce que l’Amérique, un certain temps, va se replier, dans un certain isolationnisme. Et que les Ghannouchi et compagnie n’ont jamais été de réels alliés, mais, côté tunisien, de simples pions de l’immense échiquier US, avec un grand adversaire en face, la Chine, la super grande puissance des prochaines décennies. Et un petit pion, à ce niveau planétaire, et autres conquêtes de l’espace, n’a aucune importance… Au-delà des petites vanités et arrogances locales.

PAR ABDELAZIZ DAHMANI

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