La Tunisie, dix ans après la révolution du Jasmin

Les manifestations se multiplient pour dénoncer la précarité

Des milliers de Tunisiens sont descendus dans les rues pour réclamer le départ du régime et la création d’emplois pour lutter contre la hausse du chômage causée par le Covid-19.

Vent de colère en Tunisie. Depuis le 14 janvier 2021, lendemain du 10e anniversaire de la chute de l’ancien président Ben Ali, le pays connait plusieurs vagues de manifestations après des appels lancés sur les réseaux sociaux. Des centaines de jeunes se sont ainsi mobilisés dans plusieurs villes du pays, notamment dans la capitale Tunis et à Sfax, deuxième plus grande ville du pays, pour dénoncer la politique du gouvernement et protester contre la pauvreté qui frappe actuellement beaucoup de leurs concitoyens. Des heurts ont aussi été notés à Sidi Bouzid, berceau de la révolution de 2011.

Ces foules, dans lesquelles on retrouve de nombreux étudiants, n’hésitent pas à braver le couvre-feu à partir de 20H en vigueur instauré depuis octobre 2020, pour faire entendre leurs voix. Ces manifestations ont pris une nouvelle tournure dans la nuit de lundi 18 à Mardi 19 janvier après que des centaines de jeunes de plusieurs quartiers de la banlieue de Tunis aient jeté des pierres et cocktails Molotov sur des forces de l’ordre, pour riposter aux tirs de gaz lacrymogène. Des protestataires ont également brûlé des pneus à Sfax. Des troubles qui ont poussé le ministre de la défense à annoncer dimanche 17 janvier, le déploiement de l’armée dans les rues pour protéger les bâtiments publics. Plus de 600 manifestants ont été arrêtés, d’après le ministère de l’intérieur.

Émigration irrégulière
Cette colère grandissante de la jeunesse a fait sortir les autorités de leur mutisme. D’abord, le président Kais Saied, largement élu en 2019 notamment par les jeunes, les avait appelé samedi 16 janvier, à ne pas s’en prendre aux personnes ni aux biens dans leur défense du «droit au travail, à la liberté et à la dignité», slogans entonnés lors de la «révolution du jasmin». Ensuite, le Premier ministre, Hichem Mechichi, qui, lors d’un discours télévisé mardi 19 janvier, a déclaré que «la crise est réelle et la colère est légitime et les protestations aussi, mais la violence est inacceptable et nous y ferons face avec la force de la loi».

D’après le chef du gouvernement tunisien, cette colère est «légitime». «Votre voix est entendue et le rôle du gouvernement est de transformer vos revendications en réalité», indique-t-il, tout en précisant que le droit de manifester «ne doit pas se transformer en droit de piller, voler ou casser». La plupart de ces manifestants dénoncent la politique du gouvernement pour lutter contre la hausse du chômage causée par le Covid-19, qui a plongé plusieurs familles dans la précarité. Une pandémie qui a lourdement impacté des secteurs clés comme le tourisme, la restauration et la sous-traitance aéronautique. Une baisse de l’activité économique qui a entraîné une chute historique de 9% du PIB pour 2021. Pour échapper à cette situation, de nombreux Tunisiens tentent l’émigration irrégulière pour rejoindre l’Europe, via l’Italie.

Ces évènements interviennent quatre mois après la nomination d’un nouveau gouvernement, déjà remanié samedi 16 janvier. Une nouvelle équipe en attente de validation par le parlement et qui devra calmer la colère de la rue.

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