Les universités marocaines sont confrontées à une crise sans précédent. Selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE) publié le 21 octobre 2024, les établissements à accès ouvert affichent un taux d’occupation de 258 %, largement au-delà de leur capacité d’accueil.
L’année universitaire 2024-2025 a vu le nombre d’étudiants atteindre 1,3 million, soit une augmentation de 5,9 % par rapport à l’année précédente. L’ex-ministre de l’Enseignement supérieur, Abdellatif Miraoui, a déclaré à la Chambre des représentants que 344 679 nouveaux étudiants ont intégré les universités cette année, dont 91 % dans des établissements publics.
Le ratio enseignant-étudiant atteint 69 étudiants par enseignant dans le secteur public, alors qu’il est de 10 dans le privé. Cette disparité contribue à un taux d’abandon préoccupant de 49,4 % dans les universités publiques.
Le privé plus attractif
Face à ces défis, le ministère poursuit la mise en œuvre du Pacte ESRI 2030. Cette réforme s’appuie sur la digitalisation et les méthodes pédagogiques hybrides pour réduire la surcharge des infrastructures, avec un objectif de baisse de 30 à 40 %. M.Miraoui a insisté sur l’importance de ces changements «Il n’est plus possible d’enseigner comme auparavant. La digitalisation et l’introduction de nouvelles méthodes pédagogiques sont essentielles pour améliorer la situation. »
Cependant, la croissance des inscriptions ralentit, en 2023-2024, elle n’a progressé que de 0,9%, bien en deçà du 3,24 % enregistré l’année précédente. Ce ralentissement contraste avec l’enseignement privé, qui affiche une progression constante de 13 % en 2022-2023. Cette dynamique révèle un glissement vers les institutions privées, perçues comme offrant de meilleures conditions d’apprentissage.
De plus en plus de familles se tournent vers les universités privées, même si les frais de scolarité y sont élevés. Pourquoi ? Parce que ces établissements offrent des conditions d’apprentissage bien plus attrayantes. Ils disposent d’infrastructures modernes, de classes moins surchargées, et d’un encadrement qui répond mieux aux besoins des étudiants. En matière de recherche et d’innovation, le Maroc accuse encore du retard. En 2022, le pays comptait 10 128 brevets en vigueur, loin derrière l’Afrique du Sud avec 13 990. Parmi les principaux déposants de brevets figurent l’Université Internationale de Rabat (32 brevets) et l’Université Sidi Mohammed Ben Abdallah (22 brevets). Pourtant, le nombre de doctorants a diminué de 2,7 %, atteignant 43 970, un signe préoccupant pour l’avenir de la recherche.
Malgré une légère augmentation de la part du budget dédiée à la recherche (passée de 0,92 % en 2022 à 1,1 % en 2023), le Maroc a reculé à la 70e place du classement mondial de l’innovation en 2023. Toutefois, le Maroc se distingue par ses performances dans le design industriel, où il se classe 10e mondial, et dans le secteur de la haute technologie, où il occupe la 23e place.
Pour répondre aux besoins du marché du travail, le ministère a diversifié les filières. Plus de 4 000 filières sont désormais accréditées, dont 3 000 dans le secteur public.
Si la digitalisation et la diversification des filières sont des initiatives prometteuses, elles doivent bénéficier d’un renforcement des infrastructures. La modernisation de l’enseignement supérieur est donc essentielle pour garantir une éducation de qualité, tout en soutenant les ambitions économiques du pays.