LES DEUX STRATES DE LA RELANCE ÉCONOMIQUE

Benchaâboun tire la sonnette d’alarme

Voici la réalité du choc de notre économie. Tout le monde était ces derniers temps occupé à relayer les mesures de solidarité et d’aide. Le Comité de veille, que préside M. Benchaâboun, a enchaîné réunion après réunion. Les doléances fusaient de partout. En même temps, quelque chose se passait sous l’ombre.

Si ailleurs, les grands économistes s’accordent à dire que tous les ingrédients d’une crise mondiale sont réunis, engendrée par la pandémie du coronavirus, qui ne ressemble en rien aux crises antérieures et que le tableau actuel laisse présager «les pires conséquences économiques depuis la Grande Dépression» de 1929, pour reprendre les propos de la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), au Maroc, le discours de Mohamed Benchaâboun, ministre des Finances, au Parlement, ne trompe pas.

L’économie marocaine frôle la crise cardiaque. Nos réserves en devises tarissent tellement qu’il va falloir dans les prochaines semaines faire une nouvelle sortie à l’international pour les reconstituer. Le comble, c’est que le Maroc a besoin de l’équivalent de ce qu’il a emprunté depuis décembre 2019, soit près de 4,5 milliards de dollars (dont 3 milliards de la LPL), pour boucler l’année en cours et garantir un approvisionnement du pays en produits de nécessité et des différentes matières premières.

Mais ni la conjoncture ni le moment ne sont opportuns. L’incertitude gagne les investisseurs étrangers, même dans la zone euro. Prêter de l’argent en ces moments où toutes les économies trinquent, même celles les plus robustes, est miné. La maturité, le taux d’intérêt et d’autres conditions peuvent faire d’une opération de cet acabit une mésaventure. Dans le cas du Maroc, le risque est encore plus élevé. Le pays est surendetté (un taux d’endettement public équivalent à 92% du PIB) et toute dette supplémentaire n’arrange en rien la situation. Elle hypothèquera le présent et le futur de plusieurs générations de Marocains. Si le scénario d’endettement, apparemment inévitable, se déroule comme prévu, le Maroc empruntera l’équivalent de trois ou quatre fois le montant moyen qu’il a l’habitude d’emprunter ces dernières années.

Voici la réalité du choc de notre économie. Tout le monde était, ces derniers temps, occupé à relayer les mesures de solidarité et d’aide. Le Comité de veille, que préside M. Benchaâboun, a enchaîné réunion après réunion. Les doléances fusaient de partout. En même temps, quelque chose se passait sous l’ombre. Les importations se poursuivaient malgré les décisions de les freiner. Utiles et inutiles, y compris même un médicament que notre pays pouvait produire localement, ces importations ont fait pencher leur poids dans la balance commerciale et celles des paiements au moment où les exportations ralentissaient drastiquement. Et c’est au vu de cette analyse que l’on peut comprendre le coup de gueule de M. Benchaâboun au Parlement, le lendemain du discours du Chef du gouvernement quand il avance que chaque jour de confinement fait perdre au Maroc 1 milliard de dirhams.

La plupart des gens ont vu dans son appel aux opérateurs économiques à reprendre leur activité une contradiction avec l’annonce de prorogation du confinement de son chef. Mais non ! Le ministre a tiré la sonnette d’alarme. Certains milieux d’affaires importent et tirent profit de cette crise, pompant nos devises. Il va falloir que les exportations rééquilibrent la balance et colmatent le trou creusé davantage en cette période. En lançant «Relance TPE» et «Damane Relance», nouvelles garanties de l’Etat pour soulager la trésorerie des entreprises et pour les préparer à la période post-crise, c’est la deuxième strate de relance économique.

Car ce qui est attendu des opérateurs économiques, c’est du patriotisme, de la confiance en leur pays et en leurs institutions, plus que jamais. C’est investir à fond pour booster la croissance économique afin de pouvoir payer ses dettes sans que celles-ci ne soient un alibi pour arrêter l’investissement public, qui a toujours tiré vers le haut l’investissement privé.

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