Après quelques jours de suspens, le Roi Mohammed VI s’est finalement rendu à Marrakech, mardi 13 septembre 2023. Les images du Souverain au CHU en train de s’enquérir de l’état de santé des blessés, et faisant don de son sang, ont profondément marqué les Marocains.
Mardi 12 septembre 2023 au matin, à Marrakech. Dans son luxueux bureau au deuxième étage d’un bâtiment proche du prestigieux quartier Ennakhil, un haut responsable de l’autorité locale ne lâche plus son téléphone portable. Nerveux, il consulte sa montre sans cesse, se tient prêt à recevoir les prochains ordres, alors qu’une seule question taraude son esprit: la visite très anticipée visite du roi Mohammed VI à la cité ocre après le séisme dévastateur du 8 septembre, aura-t-elle encore finalement lieu aujourd’hui? Ou bien serat- elle reportée comme cela fut le cas la veille? Les secondes, les minutes et les heures continuent de filer, mais pas de réponse claire pour l’instant. Le mystère persiste toujours.
Visite attendue
Un suspens qui ne se dissipera qu’en fin d’après-midi, lorsque les médias officiels lanceront la diffusion en direct des premières images du cortège royal arpentant les grandes artères de la ville, en direction du Centre hospitalier universitaire (CHU) où le Souverain se rendra au chevet des blessés du tremblement de terre. Il faut dire que les habitants attendaient imaptiemment un déplacement royal. “Nous venons de vivre une tragédie. On a besoin de mesures effectives, mais on a surtout besoin de réconfort, d’être rassurés. Sa Majesté est comme un père pour nous tous. Seul lui saura nous rassurer dans ces moments difficiles”, nous confie au lendemain du séisme un artisan dont l’atelier situé au coeur de la médina a été sévèrement endommagé.
Certes, Marrakech a été relativement épargnée en termes de dégâts humains et matériel comparativement à d’autres communes qui ont été rasées, mais il n’en demeure pas moins que les images des minarets et autres bâtiments vétustes effondrés de la mythique médina ont fortement marqué les esprits, aussi bien des Marocains que des touristes étrangers qui affluent en masse.
Dégâts et attentes
C’est le cas par exemple de la mosquée Kharbouche, monument emblématique de la place Jemaa El Fna, dont le minaret a été partiellement détruit par la secousse. Encore plus emblématique et plus ancienne, le mosquée de la Koutoubia n’a pas été endommagé, mais son minaret haut de 77 mètres été filmé avec des nuages de poussière s’échappant de son sommet, au moment du séisme.
“Les autorités doivent bouger, et venir nous débarrasser des décombres qui nous rendent la vie pénible, et surtout trouver une solution aux bâtiments fragilisés qui peuvent s’effondrer à tout moment”, dénonce Lahcen, salarié dans une agence de voyage à la médina, tandis qu’à côté de lui, son ami n’hésite pas à gronder les quelques touristes qui, trop curieux à son goût, se sont arrêtés pour prendre des photos de ce qui reste d’une ancienne maison détruite par la secousse. “Qu’ils nous lâchent un peu! On n’est pas dans un cirque. Je me sens humilié quand je les vois faire ça”, se révolte- t-il.
En s’aventurant un peu plus dans les ruelles de la médina, les dégâts sont de plus en visibles, jusqu’à ce qu’on atteigne le Mellah. Le quartier qui abritait autrefois la population juive de la ville, a été particulièrement touché par le séisme. Et c’est là que s’est rendu, dimanche 10 septembre matin, le patron de la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN), Abdellatif Hammouchi, sur instructions du Roi. Le haut responsable a examiné les dégâts engendrés et s’est montré à l’écoute des griefs des riverains. Mais pour beaucoup, son déplacement a surtout pour but de préparer une visite royale qui, selon les rumeurs qui fusent, allait avoir lieu lundi.
“Ça fait plaisir de voir Ssi Hammouchi parmi nous. On sait que quand il s’occupe d’une mission, il la réussit avec brio”, souffle un riverain, au moment même où le patron de la DGSN quittait les lieux aux alentours de 12h30, au bord d’un Volkswagen Touareg noir. Finalement, ce n’est que mardi après-midi que les vrais préparatifs seront lancés. La façade du CHU a droit à un lifting, alors que les boulevards et les rues qui l’entourent sont soigneusement ratissés et nettoyés par des agents d’entretien de la commune. Des milliers de citoyens s’assemblent derrière des barrières de fer, sur les deux côtés de l’artère menant vers l’établissement hospitalier. “Vive le Roi!” scandent-ils, certains les bras levés, d’autres portant des portraits du Souverain.
L’effervescence monte de plusieurs crans vers 17h30, alors que le cortège royal s’approche de sa destination. Une demi-heure plus tard, Mohammed VI apparait au chevet des blessés pour s’enquérir de leur situation, avant d’effectuer un don de sang. Un geste émanant du plus haut sommet de l’État qui va encourager davantage des Marocains à faire don de leur sang, dans un contexte difficile où cette matière vitale est très demandée.