SANCHEZ ET NÚÑEZ FEIJÓO, BLANC BONNET, BONNET BLANC

Le Sahara au centre des élections espagnoles


Que Pedro Sanchez mène le futur gouvernement ou pas, l’engagement et la position claire et sans ambages sur le plan d’autonomie est une politique d’Etat et non pas d’un parti au pouvoir.

Il est sûr qu’il y a plus d’une leçon à tirer des résultats des élections communales et régionales du 28 mai 2023 en Espagne. Ces résultats ont prouvé, qu’on le veuille ou pas, que le Maroc pèse lourdement dans le jeu politique espagnol. Le Parti populaire (PP), le plus grand vainqueur de ce scrutin, ainsi que d’autres partis de droite et d’extrême droite avaient mené depuis un an une pré-campagne implicite par le truchement de leurs dirigeants et députés au Cortès. Ils avaient pour cible le parti socialiste de Pedro Sanchez et sa politique étrangère, notamment ses relations avec le Maroc.

Ils ont certes réussi à faire du brouhaha autour d’eux mais cela n’avait rien à avoir avec la question du Sahara. Car au comble de sa joie, le président du PP, Alberto Núñez Feijóo, n’a même pas évoqué le Maroc ou la position espagnole vis-à-vis du plan d’autonomie. C’était prudent de sa part. C’est dire qu’au-delà des tractations et des manigances électorales, tout parti politique espagnol, quelle que soit son idéologie, sait qu’une fois au pouvoir, il n’a d’autre choix que de composer avec le Maroc, son voisin avec lequel il est uni par la géographie, l’histoire, le destin, l’économie et la culture.

Et puis, depuis quelques mois déjà, les sondages mensuels prédisaient la perte relative de la popularité du parti de Pedro Sanchez et la montée du PP. Donc rien de surprenant. Au Maroc, à vrai dire, il y a un sentiment général qui prévaut et qui veut voir Pedro Sanchez reconduit pour un nouveau mandat, lui, qui incarne, depuis son investiture, la sagesse, le bon sens et le realpolitik de l’Espagne profonde. N’est-ce pas lui qui a écrit dans la lettre qu’il a adressée à S.M. le Roi Mohammed VI : «La prospérité du Maroc est liée à celle de l’Espagne, et inversement». Mais que ce soit Pedro Sanchez ou Alberto Núñez Feijóo, on ne change pas tous les jours la politique extérieure d’un pays comme l’Espagne.

L’histoire commune des deux Royaumes a été toujours faite, du moins depuis six siècles, de colonisation, de résistance, de coopération et de guerre, d’échanges et de violences. En 2023, les deux pays sont condamnés à renforcer leurs liens et leur union et à collaborer pour le bien-être des deux peuples. L’Espagne a besoin du Maroc pour accéder au continent africain et pour lutter contre l’immigration clandestine et le terrorisme. Et le Maroc a besoin de l’Espagne, son pont le plus proche vers l’Europe et son désormais interlocuteur privilégié au sein des institutions européennes. Et là, la mémoire évoque la métaphore ingénieuse de feu Hassan II dans son livre Le Défi: « Le Maroc ressemble à un arbre dont les racines nourricières plongent profondément dans la terre d’Afrique et qui respire grâce à son feuillage bruissant aux vents de l’Europe». On ne peut se passer des racines par lesquelles on s’alimente ni des feuilles par lesquelles on respire.

Mais arrêtons-nous à ce stade de la raison pour basculer vers le ridicule qui heureusement ne tue pas. Ici, le ridicule est algérien. La junte militaire du voisin de l’Est s’est amusé à faire une analyse géopolitique inédite comme personne d’autre ne sait le faire mieux qu’elle. Elle a lié la défaite du parti de Pedro Sanchez à la position du gouvernement mené par ce dernier vis-à-vis du dossier du Sahara et dans laquelle, non seulement, elle appuie le plan d’autonomie marocain, mais elle reconnait tacitement son rôle en tant qu’ancienne puissance coloniale dans la genèse du conflit et l’alimentation des prétentions délétères de l’Algérie qui veut créer un micro-Etat fantoche pour avoir un accès à l’Atlantique.

Des médias algériens affidés au pouvoir ont, en outre, attribué la défaite de Sanchez à la dégradation de ses relations avec l’Algérie. C’est plus que ridicule. Alger cherche toujours à récupérer à son avantage des faits dont elle n’est jamais à l’origine ni de près ni de loin. Mais de quoi se mêle-t-elle ? Les relations avec le Maroc ont une importance cruciale pour l’Espagne. A peine douze kilomètres séparent les deux royaumes. Quant à ses intérêts avec l’Algérie, le voisin ibérique a signalé à la junte militaire que nouer de bonnes relations diplomatiques ne peut se construire sur un chantage économique notamment gazier. Ce sont deux poids, deux mesures. Quant à la question du Sahara, que Pedro Sanchez mène le futur gouvernement ou pas, l’engagement et la position claire et sans ambages sur le plan d’autonomie est une politique d’Etat et non pas d’un parti au pouvoir.

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