Reporters sans Frontières tire la sonnette d'alarme


Recul de la liberté de la presse au Maroc


Outre les critiques formulées contre le nouveau code de la presse, dont certaines clauses renvoient au code pénal, les professionnels dénoncent une situation économique étouffante que vivent les entreprises de presse. La faute à l’Etat, qui a lâché ce secteur pourtant considéré comme un pilier de toute démocratie.

Le moins que l’on puisse dire est que la situation est difficile, sinon dramatique, pour la presse au Maroc. Dans un rapport, rendu public mercredi 25 avril 2018, par l’organisation internationale Reporters sans Frontières, le Maroc est très mal classé sur le plan mondial. Il se retrouve ainsi dans la zone rouge, dégringolant à la 135ème place, perdant dans la foulée 2 places par rapport au classement de 2017. RSF estime que la tendance est la même au niveau des pays de l’Afrique du Nord, où les journalistes continuent de subir de multiples pressions. C’est ainsi que l’Algérie est classée 136ème et la Libye, 167ème.

Le rapport cite plusieurs raisons ayant contribué à la régression de la liberté de la presse dans notre pays. Parmi elles: les cadres législatifs restrictifs, les entraves à l’exercice du journalisme sur le terrain, en particulier lors des manifestations. Mais, il y a aussi les nombreux sujets tabous, qui représentent, pour RSF, autant de contraintes qui empêchent les journalistes de remplir pleinement leur rôle et d’assurer une information indépendante, plurielle et libre. Entre mai et juillet 2017, les journalistes couvrant les manifestations populaires d’Al Hoceima ont été la cible d’une vague d’arrestations. RSF recense ainsi 14 arrestations de journalistes, ainsi que plusieurs cas d’expulsions de journalistes étrangers. RSF cite le cas du journaliste et directeur du site Badil.ma (suspendu), Hamid El Mahdaoui, en détention depuis juillet 2017. Arrêté dans le cadre des événements d’Al Hoceima, El Mahdaoui avait été condamné en première instance à trois mois de prison ferme et à une amende de 20.000 dirhams. En appel, sa condamnation a été élevée à un an de prison ferme.

Un avenir sombre
Mais le ministre chargé des Relations avec le Parlement, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, ne l’entend pas de cette oreille. Pour l’ancien ministre de la Communication, le rapport de RSF est inéquitable. Si M. El Khalfi parle du dernier code de la presse, entré en vigueur en 2016, comme une avancée notable dans l’exercice de la profession, il n’en demeure pas moins que ce texte a été vivement critiqué par les professionnels eux-mêmes. Ces derniers dénoncent, en effet, le fait que le nouveau code de la presse renvoie au code pénal en cas de poursuites judiciaires engagées contre les journalistes. Autre épée de Damoclès qui pèse sur la profession: la faillite économique des entreprises de presse.

Face à une offre publicitaire qui se raréfie de plus en plus et l’absence de l’Etat à garantir un soutien financier confortable, les entreprises de presse risquent de mettre la clé sous le paillasson. Un risque d’une extrême gravité car il met en péril des emplois et participe à la dégradation de la situation matérielle des journalistes professionnels. Par conséquent, ce que le monde considère comme le quatrième pouvoir entrevoit un avenir sombre dans notre pays, en l’absence d’une volonté politique pour sauver la presse marocaine.

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