
MORTALITÉ. Depuis de très nombreuses années, l’association Goutte de lait, encore peu connue du grand public, oeuvre pour maintenir en vie les enfants prématurés. Avec son centre hospitalier ultramoderne, au centre de Casablanca, elle arrive à soigner environ 1.100 bébés par an.
Comment ne pas s’émouvoir à la vue de ces bébés prématurés, placés dans des couveuses et des berceaux médicalisés, pour tenter de les sauver et les maintenir en vie? Avec des tuyaux accrochés au nez, à la tête et aux bras, ces petits anges, à l’âge très précoce (6 à 7 mois) et au poids moindre (900 grammes), s’accrochent encore à la vie, grâce à une équipe médicale multidisciplinaire et un équipement ultrasophistiqué. Nous sommes à l’association Goutte de lait, dans le centre de Casablanca. Les images renvoyées par les salles des opérations permettent ainsi de mesurer toute la tâche complexe et hautement humaine de cette association peu connue du grand public.
De l’extérieur, l’édifice, niché dans l’ancienne médina de la métropole économique, au centre ville, apparaît d’une banalité déconcertante. Mais de l’intérieur, on découvre un véritable centre hospitalier pour prématurés. Avec 30 couveuses et berceaux, au prix de 140.000 dirhams chacun, 7 tables chauffantes, 8 appareils respiratoires, 7 appareils de photothérapie, 2 appareils de radiologie et un échographe, l’association dispose d’un matériel médical parmi les plus évolués au Maroc.
Présidée par Docteur Abdellatif El Alami, spécialiste en pédiatrie, l’association est l’une des plus actives dans la lutte contre la mortalité infantile. «Nous traitons environ 1.100 bébés prématurés chaque année. Ils nous viennent des CHU, des cliniques privées ou encore des sages femmes. Nous couvrons non seulement la région de Casablanca, mais également une bonne partie du sud du Maroc, jusqu’à la ville de Marrakech», explique Docteur El Alami.
Une demande pressante
L’histoire de cette association remonte au temps du protectorat français, plus précisément en 1915, année de sa création par Inès de Bourgoing, épouse du maréchal Lyautey, célèbre résident général du Royaume. Connue pour être une femme d’action dans le domaine social, Inès de Bourgoing créa la Goutte de lait pour venir en aide aux enfants souffrant de malnutrition.
Elle commença à distribuer du lait en poudre aux plus démunis avant d’évoluer vers une prise en charge des enfants dénutris. Puis, en 1950, après l’apparition d’une épidémie de méningite tuberculeuse à Casablanca, l’association crée un petit service d’hospitalisation pour les enfants atteints de cette maladie. Petit à petit, elle se spécialise dans le traitement des enfants prématurés, et c’est Docteur Rémi Pichon qui a introduit les trois premières couveuses pour prématurés.
En 1964, Docteur Abdellatif Berrada préside aux destinées de la Goutte de lait. Contre de nombreux avis, il décide de répondre à une demande de plus en plus pressante concernant le traitement des bébés prématurés.
Docteur Berrada a été soutenu par l’ancien gouverneur de Casablanca, le colonel Boulhimz. C’est ainsi que le premier service de néonatologie voit le jour au sein de l’association en 1970. Au fil des années, l’association prend de l’importance dans le milieu médical. En 2007, ses locaux subissent une rénovation de fond en comble, avec la construction et l’équipement du centre de néonatologie, du service des nourrissons ainsi que d’une salle de conférence.
Un partenariat de qualité
L’opération de rénovation a coûté la bagatelle de 9 millions de dirhams. Plusieurs partenaires ont participé au financement des travaux. Outre les généreux bienfaiteurs, avec leurs 5 millions de dirhams, il y a eu également la contribution de l’INDH, de l’Agence du développement social et du ministère des Affaires sociales.
Actuellement, le centre s’étend sur deux étages avec 640 mètres carrés chacun. Ce centre est composé du service de néonatologie, qui comprend 35 postes, entièrement équipés aux normes internationales les plus modernes, avec, entre autres, une dizaine de respirateurs. Ce service, inauguré officiellement par la princesse Lalla Meryem en novembre 2008, est doté d’une équipe de 6 pédiatres néonatologues bénévoles, d’une psychologue clinicienne, d’une gestionnaire bénévole et de près de 40 infirmières, sans compter une dizaine d’agents administratifs.
Financements insuffisants
Au second étage, on trouve le service d’hospitalisation des nourrissons, avec possibilité d’hospitalisation mère-enfant. En 2011, pour diversifier ses activités médicales, l’association s’est dotée d’un centre d’action médico sociale précoce, qui se charge de traiter les déficiences mentales et neurologiques des enfants. L’équipe de ce centre est ainsi constituée d’un pédopsychiatre, d’un neuropediatre, d’une ophtalmologue, un ORL, d’une psychologue, de deux psychomotriciennes et de deux orthophonistes.
Le financement de la Goutte de Lait est assuré par des subventions publiques versées par l’INDH et le ministère de la Santé. Elle bénéficie également des dons de bienfaiteurs et de la participation de certains parents d’enfants hospitalisés. Mais, «cela ne suffit malheureusement pas à couvrir les charges de l’association, qui deviennent de plus en plus importantes », explique son président, Docteur Abdellatif El Alami. Mais il demeure néanmoins optimiste quant à la qualité de son partenariat, notamment avec l’INDH et le ministère de la Santé publique.