Avec cette rentrée politique 2023/2024, le gouvernement Akhannouch entame sa troisième année aux commandes. Au menu, plusieurs chantiers à mettre en place, et autant de défis et de contraintes auxquels il devra faire face.
Poursuite des grands chantiers sociaux, réforme des lois, lutte contre l’inflation et élaboration de la loi de Finances 2024 … Décidément, le gouvernement Akhannouch et le parlement auront du pain sur planche pour cette rentrée, alors que de nombreuses contraintes comme la sécheresse, le ralentissement de la croissance et le contexte international difficile continuent de peser sur l’économie marocaine. L’équipe gouvernementale devra redoubler d’efforts pour pouvoir honorer un des ses principaux engagements sociaux, à savoir le lancement des allocations directes en faveur des familles vulnérables avant la fin de l’année 2023. Le roi Mohammed VI a d’ailleurs insisté, dans son dernier discours du trône, sur l’importance de cette échéance. “Nous attendons que les prestations sociales commencent, comme prévu, à être servies aux ménages ciblés, à la fin de l’année en cours”, avait souligné le Souverain.
Le casse-tête de l’inflation
L’entrée en vigueur du soutien financier direct pour les familles marquera le parachèvement de la deuxième grande phase du chantier de la protection sociale, après la première phase qui a permis la généralisation de l’assurance maladie obligatoire (AMO) dès le 1er décembre 2022.
Pour ce qui est de la question de l’inflation, talon d’Achille du cabinet Akhannouch depuis son investiture il y a presque deux ans, les prochains mois s’annoncent difficiles. Rien que durant la période allant du 2 au 15 août 2023, le prix du gasoil a augmenté quatre fois passant de 11,70 à 13,30 dirhams/litre en moyenne. L’essence a connu deux hausses sur la même période, passant de 14 à 15 dirhams/ litre en moyenne. Le prix du gasoil et de l’essence ont été augmentés à quatre reprises entre le 2 et le 15 août 2023 pour passer , ce qui aggrave davantage les difficultés des ménages. À cela s’ajoute également la hausse des prix des denrées alimentaires, qui n’est plus temporaire mais semble s’installer dans la durée.
Une source au sein du Parti de la justice et du développement (PJD) estime qu’”il ne faut pas s’attendre à grand-chose à ce niveau de la part du gouvernement, puisque cela fait un an et demi qu’il préfère ne pas mettre en place des mesures pour soulager les ménages impactés malgré les multiples appels de l’opposition”. Quoi qu’il en soit, les allocations familiales prévues avant la fin de 2023 devraient en principe permettre aux catégories les plus démunies de mieux supporter la flambée des prix. Toujours en lien avec les volets économique et social, le gouvernement aura la tâche d’élaborer un PLF capable de répondre aux attentes pressantes des populations, notamment en matière d’emploi, de santé, d’éducation et de pouvoir d’achat, tout en prenant en considération les principaux paramètres dont certains comme les fluctuations des prix sur les marchés de l’énergie et l’année agricole, restent pour l’instant difficiles à anticiper.
Prévisions économiques
Selon le rapport d’exécution budgétaire et de cadrage macroéconomique triennal 2024-2026 publié le 6 septembre, le PLF 2024 table sur un taux de croissance économique de 3,7% en 2024, après une croissance estimée à 3,4% en 2023, avec à la clé une production céréalière à 75 millions de quintaux, et un cours du gaz butane à 500 dollars la tonne, et une parité euro-dollar à 1,081.
Sur un autre volet, la rentrée politique devrait être marquée par la poursuite voire l’accentuation des querelles idéologiques autour de la réforme du Code pénal et du Code de la famille (Moudawana). Attendu au tournant par les courants conservateurs, Abdellatif Ouahbi prévoit de dévoiler sa mouture finale du nouveau Code pénal dans les semaines à venir. Le ministre de la Justice a provoqué la polémique à maintes reprises notamment pour avoir exprimé au parlement son souhait d’interdire le mariage des filles mineures. La patron du Parti authenticité et modernité s’est également prononcé en faveur de la dépénalisation de certaines pratiques relevant des “libertés individuelles”, comme les relations hors mariage ou encore la rupture publique du jeûne durant le mois de Ramadan.
Débat politique et idéologique
Au-delà de l’action gouvernementale ellemême, la question de la cohésion au sein de la majorité se posera encore une fois, à fur et à mesure que l’appareil politique reprend et que d’éventuels signes de divergence commencent à refaire surface. Bien que les patrons des trois partis de la coalition gouvernementale n’ont pas cessé de répéter qu’ils sont solidaires, il n’en demeure pas moins que les rivalités internes et les ambitions personnelles viennent perturber cette solidarité. Cela concerne en particulier le PAM, qui s’est distingué à plusieurs reprises par son ton assez critique avec le gouvernement notamment sur la question de la cherté de la vie.
De son côté, l’opposition qui se trouve en nette infériorité numérique au sein des deux chambres du Parlement en comparaison à la majorité, semble incapable de faire entendre sa voix. Il faut souligner que les partis de l’opposition, aussi bien de gauche que de droite, appellent depuis début septembre 2023 à un remaniement ministériel pour remplacer les ministres qui “sous-performent” ou qui ont fait preuve de “manque de compétence”. Un scénario peu probable pour l’instant.