QUELLE CGEM POUR DEMAIN ?

La grande tâche que doit assumer et porter la CGEM dans la présente conjoncture; c’est celle-ci: relancer l’économie et restaurer la confiance.

La Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM) va-t-elle enfin connaître une normalisation de sa gouvernance avec la prochaine élection de sa direction, le 22 janvier 2020? Le binôme Chakib Alj-Mehdi Tazi est le seul en lice. En principe, c’est là un gage de nature consensuelle pouvant pousser dans ce sens. Mais c’est évacuer au passage qu’un autre binôme formé de Hakim Abdelmoumen et de Youssef Mouhy s’est retiré non sans accuser les deux concurrents de mener une campagne électorale sans attendre la validation des candidatures par le conseil d’administration le 13 décembre. Cela ne laissera-t-il pas des traces ? Tout aussi sympathique sinon plus est la double crise traversée par la CGEM au cours du deuxième semestre 2019. En juillet, des profils de premier plan ont ainsi démissionné: Fayçal Mekouar, vice-président, Ahmed Rahhou, président du CIH en poste aujourd’hui d’ambassadeur auprès de l’UE à Bruxelles, Hamad Kassal, président de commission… Trois mois plus tard, c’était au tour de Salaheddine Mezouar, nouveau président de la CGEM, de remettre son tablier à son tour par suite de ses déclarations en date du 12 octobre 2019 sur l’Algérie lors d’un forum à Marrakech.

Cela dit, les deux candidats présentent tout de même des traits distincts. Chakib Alj, 54 ans, est un opérateur dans l’agro-industrie avec des entreprises employant quelque 4.000 personnes. Quant à Mehdi Tazi, 44 ans, c’est un ingénieur télécom, vice-président de la CGEM et ancien président de Saham Assurance. Il relève de l’équipe de Moulay Hafid Elalamy, président de ce grand groupe et par ailleurs ministre de l’Industrie et du Commerce depuis 2015 après avoir présidé la CGEM de 2006 à 2009. C’est dire qu’il garde la main sur la confédération patronale, son statut de ministre depuis près de sept ans ne pouvant que conforter ses réseaux et son influence dans le monde économique. Un autre groupe, autour du relationnel de Meriem Bensalah Chakroun, ancienne présidente de la CGEM de 2012 à 2018 n’a pas réussi, semble-t-il, à peser dans le processus actuel d’élection d’une nouvelle présidence de l’organisation patronale.

S’il y a bien une grande tâche que doit assumer et porter la CGEM dans la présente conjoncture, c’est celle-ci: relancer l’économie et restaurer la confiance. Ce qui implique une implication accentuée dans la refonte du modèle de développement, qui a montré ses limites et qui doit être remodèle et réarticulé sur de nouvelles bases plus officiantes, bien sûr, mais aussi plus équitables. La CGEM est partie prenante dans ce grand chantier national inscrit au chapitre d’une ambition nationale d’avenir. Un nouvel élan doit imprimer l’action dans le sens du développement privé solide, fortement créateur de valeur, de richesse et d’emploi. L’heure est à la mobilisation d’un capitalisme non plus rentier et spéculatif mais entrepreneurial, innovant aussi. Le nouveau binôme a effectué des tournées dans les régions du Royaume. Il a fait part de ses projets, des axes de son programme et des formes de gouvernance que la CGEM doit mettre en oeuvre à cet égard. La croissance, c’est d’abord un environnement d’affaires et réglementaire; il faut donc veiller à lever les barrières à l’investissement pour toutes les entreprises et dans toutes les régions. C’est aussi le renforcement du capital marocain dans l’industrie nationale, ce qui commande, d’une manière ou d’une autre, une certaine préférence nationale aux entreprises locales. C’est également de favoriser une concurrence loyale avec son corollaire, à savoir une politique opératoire contre l’informel et la contrebande. C’est encore l’amélioration de l’export pour les entreprises en renforçant leur compétitivité avec des dispositifs d’accompagnement. Et puis, il y a tout le reste: la réorientation de la formation, la valorisation du capital humain, la promotion du partenariat public-privé dans les régions, une bonne gouvernance à généraliser dans les PME...

Dans les mois qui viennent, il importe que la CGEM donne des signes forts de cette mobilisation. Elle aura pour interlocuteurs les banques, la DGI pour asseoir des relations de confiance, l’administration pour la simplification des procédures et enfin le gouvernement et les partenaires syndicaux autour du dialogue social. Représentative? La CGEM l’est et elle regroupe, directement ou non, quelque 90.000 entreprises réalisant 60% du PIB. Elle doit cependant transcender des intérêts catégoriels corporatistes, pour faire prévaloir le développement équitable avec des fruits pour tous. Cela relève de sa responsabilité sociale.

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