PJD, mon amour...

Amale Samie Amale Samie

Le Maroc est en état de  choc. Il vient de sortir d’un  traumatisme profond. Alors,  encore hébété par ce terrible  mois où nous ignorions si l’amour né  sous la Coupole comme un frêle brin  de muguet ne risquait pas de déraper  pour finir dans le mur, je me rends  compte qu’on a survécu au pire des  cauchemars: un gouvernement ébréché  du quart de ses membres. Mais le  frère Lahbib et la soeur Soumia vieilliront  ensemble, après avoir donné à  la patrie une pléthorique marmaille  faite de futurs ministres. Yasmina  Baddou avait attiré le courroux  du peuple quand elle s’était fendu  la poire à l’écoute d’un bougre de  député qui lui demandait ce qu’elle  comptait faire pour enrayer l’invasion  des puces de poulets à Nador.  On peut tout reprocher à Yasmina  Baddou, y compris sa manie de faire  du camping devant les bureaux de  vote à la veille des élections, mais elle  ne faisait pas sécher son linge intime  au Parlement.

Et là, à peine sorti de ma stupeur,  j’y suis retombé après avoir reçu la  newsletter de OEF qui rapportait les  termes d’un dialogue politiquement  stratégique entre Abdelilah Benkirane,  l’homme qui balaie d’un revers  de la main les micros quand il pérore  dans une conférence de presse,  et Mohamed Sebbar, secrétaire  général du CNDH: Benkirane aurait  demandé à Sebbar ce qu’il ferait s’il  entrait dans sa chambre à coucher  et qu’il trouvait sa femme aux bras  d’un homme. D’abord, sa femme ne serait pas au bras d’un homme mais au  lit, parce qu’on aurait dépassé de loin  le stade de la galanterie et des gestes  délicats pour passer aux cabrioles. Et je  dis cabrioles parce que je suis islamiste,  je m’interdis de parler de galipettes.  Mais je le comprends, notre stentor  national, c’est un homme à l’éducation  irréprochable. Mais passons, Sebbar  lui aurait répondu qu’il irait porter  plainte au parquet et qu’il demanderait  le divorce ensuite. Ben mince alors, si  je surprenais ma chère femme dans  une position délicate, je la truciderais  et je ferais passer l’intrus à la moulinette  et cela m’éviterait le divorce faute de divorçable. J’ai enregistré avec  une grande satisfaction la réponse du  premier ministre: «En faisant cela, on  ajoute une humiliation à la première ».  Il est vrai que Benkirane est un vrai mec  plus soucieux de son amour propre que  d’une loi stupide.

Pourtant, la vraie question était celle-ci:  «Que ferais-tu si ta femme et son amant  se faisant passer des billets doux au  parlement et au conseil de gouvernement?  »
Le Maroc, comme je l’ai dit, m’a replongé  dans la stupeur: on peut y obliger un  homme offensé à passer par le tribunal  au lieu de le laisser rétablir son honneur au couteau de boucher. Finis  les crimes d’honneur.  Alors un gouvernement bancal  deviendrait le cadet de mes soucis.  Jean-Pierre Chevènement avait dit  exactement: «Un ministre, ça ferme  sa gueule; si ça veut l’ouvrir, ça  démissionne». Je crois, moi, qu’un  ministre doit fermer sa gueule et  démissionner pour éviter de dire  des conneries. Hassan II avait fait  cette déclaration devenue célèbre:  «Je peux prendre mon chauffeur et  le nommer ministre»!

Mais en ce début de 21° siècle, le  recrutement est devenu difficile.  Voilà pourquoi la triste réalité nous  vaut une fournée de candidats  médiocres tout juste bons à devenir  chefs de partis après avoir mis la  main dans un fatal engrenage.  Le PJD s’est tristement distingué  par les injures de son chef, après  les noms d’oiseaux, le caquètement  des poules. Comment s’étonner  que Saâd Eddine El Othmani, un  homme estimable, qui malgré ses  convictions intégristes savait se  tenir, ait refusé un portefeuille  qui aurait dignement remeublé la  dentition clairsemée du gouvernement?  C’était pourtant l’ancien  chef de la diplomatie marocaine!  On dit qu’il a préféré consacrer  son temps à ses patients, dans  son cabinet de psy. Il a raison, il va  bientôt compter dans sa clientèle  tout le bureau politique du PJD,  voire celui du MP. A commencer  par notre tout nouveau ministre de  la jeunesse et des sports.

Amale Samie

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