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La paix promise par les Accords d'Abraham menacée


Les attaques répétées du gouvernement israélien contre la sainte mosquée Al-Aqsa à Jérusalem et la poursuite de la construction de colonies et des raids meurtriers continus contre les Palestiniens remet en question les Accords d’Abraham signés avec des Etats arabes dont le Maroc.

Les escalades de violence au Proche-Orient et les agressions menées par le gouvernement israélien de Netanyahu contre le peuple palestinien renvoient aux calendres grecques la promesse de paix des Accords d’Abraham. Un récent rapport d’Arab Center Washington DC, think tank américain, le souligne clairement. Il impute « au gouvernement israélien d’extrême droite et à sa politique draconienne envers les Palestiniens » la responsabilité de l’échec « des efforts visant à élargir les accords d’Abraham, un processus qui a vu plusieurs Etats arabes établir des relations diplomatiques avec Israël fin 2020 ».

Le rapport revient notamment sur « les attaques répétées contre la sainte mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, la poursuite de la construction de colonies et des raids meurtriers continus contre les Palestiniens ». Des exactions qui ont contraint « l’Arabie saoudite à appuyer sur le bouton pause, et ce malgré la coopération en matière de renseignement signalée » entre Ryad et Tel-Aviv.

La brouille diplomatique a contaminé même les relations d’Israël à des pays arabes qui avaient maintenu un lien politique avec l’Etat hébreu. « Même les Etats qui entretiennent depuis longtemps des relations diplomatiques avec Israël, comme l’Egypte et la Jordanie, ont fortement accentué leurs critiques à l’égard de la politique israélienne », relève le think tank.

Une colonisation renforcée
Plus inquiétant encore, le même rapport note que la normalisation remporte certes l’adhésion des Etats, mais pas des peuples arabes. C’est le cas, entre autres, du Maroc. Un sondage réalisé en août 2022 par le Baromètre arabe, réseau de recherche indépendant et non partisan, a montré que seulement 31% des Marocains sont favorables à la normalisation avec Israël, soit une baisse de 10% par rapport à une enquête d’opinion menée en juin 2021. Et pour cause ? Cinq jours après l’investiture de l’Exécutif mené par Benjamin Netanyahu, il y a eu la visite à haut risque, mardi 3 janvier 2023, de Itamar Ben Gvir, nouveau ministre de la Sécurité nationale et figure de l’extrême droite israélienne, à l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, troisième lieu saint de l’islam mais aussi appelé Mont du Temple par les juifs, situé dans le secteur palestinien occupé et annexé par Israël.

Itamar Ben Gvir, condamné par le passé à de nombreuses reprises pour incitation à la haine, avait ouvert le bal des provocations et annoncé la couleur. Il avait appuyé par des actes le ton utilisé par le Premier ministre fraîchement réélu à la tête d’Israël, Benjamin Netanyahu, qui a présenté jeudi 29 décembre 2022 sa nouvelle coalition gouvernementale à la Knesset, et qui s’est déjà exprimé pour une colonisation renforcée en Cisjordanie.

Composée de six partis, l’extrême droite et les ultraorthodoxes sont surreprésentés dans cette nouvelle coalition, surtout dominée par l’extrême droite. Celle-ci est composée du parti de Netanyahou, le Likoud (droite), ainsi que de deux formations ultraorthodoxes et de trois d’extrême droite. Parmi elles, les partis Sionisme religieux de Bezalel Smotrich et Puissance juive d’Itamar Ben Gvir, connus pour leurs propos anti-palestiniens et leurs positions favorables à l’annexion d’une partie de la Cisjordanie.

Dans le cas du Maroc, la reprise des relations diplomatiques a été conditionné justement à cette paix que le gouvernement israélien d’extrême droite menace. En vue d’une relance des relations entre Rabat et Tel-Aviv, des parlementaires américains se sont rendus au royaume, en janvier et en février 2023, où ils ont eu des entretiens avec le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, et le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita.

Le retour de Netanyahu aux commandes de l’Exécutif israélien, officiellement acté le 29 décembre 2022, n’a pas empêché le Royaume de condamner par exemple la prise d’assaut par les forces israéliennes, la visite du ministre israélien de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir, dans l’esplanade des Mosquées à Al Qods-Est ou encore de rejeter l’intensification des colonies israéliennes. Entre temps, les traditionnels échanges entre ministres des deux pays se font rares ces derniers temps. Normalisation ou pas, le Royaume a inlassablement fait bloc face aux agissements de l’État hébreu et exprimé sa solidarité avec les Palestiniens. Sur un plan officiel, S.M. le Roi Mohammed VI, qui suit de très près avec une profonde inquiétude ce qui se passe en Cisjordanie, a toujours considéré les violations et les agressions israéliennes comme inadmissibles et alimentant les tensions.

Grands défis
Cette appréhension par rapport à l’attitude du gouvernement Netanyahu a été relevée de l’intérieur de l’Etat d’Israël par l’Institut de recherches pour la sécurité nationale (INSS), relevant de l’Université de Tel Aviv. Dans un rapport en date du 29 décembre 2022, à l’occasion du 2e anniversaire de la normalisation des relations entre le Maroc et Israël, cet Institut a souligné que l’un des grands défis auxquels sera confronté le nouveau gouvernement israélien de Netanyahu sera de maintenir l’élan positif de la normalisation religieuse et culturelle entre les deux pays.

L’INSS avait souligné que la dynamique positive dans les relations israélo-marocaines ne peut être tenue pour acquise à la lumière des défis auxquels ces relations sont confrontées, au premier rang desquels la position du Maroc vis-à-vis des Palestiniens et la question de la ville sainte d’Al Qods.

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