Comme l’Espagne et l’Allemagne, la France doit, aujourd’hui plus que jamais, choisir son camp. Jouer un double jeu ne nuit pas seulement au Maroc, mais il sert sur un plat d’argent les caporaux de la junte militaire algérienne.
Le succès et l’influence diplomatiques du Maroc sur les plans régional et international rendent jaloux voire font peur à certaines puissances européennes comme la France. Ce postulat suffit, à lui seul, pour décortiquer les enjeux de l’actualité politique qui a marqué fin août et début septembre 2022. Ce qui s’est passé le 26 août à Tunis et les rebondissements politiques qui s’en sont suivis ont marqué un nouvel épisode d’une série d’hostilités masquées que mène l’Hexagone avec la complicité de l’Algérie.
Les images du président Kaïs Saïed accueillant, avec les honneurs dignes d’un grand chef d’Etat, le chef du front Polisario, Brahim Ghali, s’entretenant avec lui dans le salon présidentiel de l’aéroport, ont été perçues comme une trahison. Elles ont suscité moult interrogations et surtout de l’incompréhension quand on sait que les Tunisiens n’ignorent point la sensibilité de ce dossier pour le Maroc, s’agissant de son intégrité territoriale. Ce n’est pas tant la participation de Brahim Ghali à ce sommet qui choque, mais bien l’accueil qui lui a été réservé par Kaïs Saïed.
Au pic de la crise sanitaire que le pays du Jasmin a connue, le Roi Mohammed VI a ordonné l’envoi d’aides médicales et la construction d’hôpitaux de campagne à Tunis. En 2014, le Roi Mohammed VI s’était rendu en Tunisie, en proie à des attaques terroristes dans une conjoncture post-Printemps arabe. Il avait parcouru les rues de la capitale tunisienne en signe de soutien à tout un peuple et au tourisme de ce pays maghrébin boudé par les touristes étrangers. Ce qu’a fait Kaïs Saïed n’est pas qu’une preuve d’immaturité politique de la part d’un président omnipotent qui a chassé de son périmètre tout contre-pouvoir. C’est bien plus que cela. C’était une manigance fomentée ailleurs, de Paris à Alger, et mise à exécution à Tunis.
C’est d’autant plus flagrant que la visite du leader du Polisario en Tunisie est venue en pleine escalade des tensions entre Rabat et Alger, dans un contexte caractérisé par des relations «froides» entre Rabat et Paris et par la récente visite d’Emmanuel Macron en Algérie qui a été «couronnée» par la suspension des restrictions des visas Schengen octroyés aux Tunisiens.
Cette trahison cache mal la naissance d’une coalition (secrète du moins en apparence) qui a pour axe Paris et qui agit contre les intérêts stratégiques du Royaume. La Tunisie de Kaïs Saïed, elle, n’est qu’un pantin au service d’un stratège français et d’un bailleur de fonds algérien. Le timing de cette manoeuvre politico-diplomatique a été concocté à quelques jours du discours royal du 20 août dernier à l’occasion du 69ème anniversaire de la Révolution du Roi et du Peuple, dans lequel le Souverain a réaffirmé le nouveau paradigme de la diplomatie marocaine, qui interpelle sans détours les anciens et les nouveaux «partenaires» au sujet de leur position mitigée sur le dossier du Sahara marocain.
S.M. le Roi n’a fait que souligner mordicus ce qu’il a annoncé dans son discours de novembre 2021. Il avait expliqué que le Royaume ne conclura désormais aucun accord commercial avec des pays qui tiennent une position ambiguë ou hostile quant à son intégrité territoriale.
Depuis le quiproquo né du rapatriement des mineurs marocains de France, la consigne (ou plutôt la punition) visant à réduire de moitié les visas Schengen délivrés aux Marocains ou encore l’affaire Pegasus ont enclenché un certain gel dans les relations diplomatiques.
La France a, certes, historiquement, soutenu le Maroc dans le dossier du Sahara. Mais sa position a toujours su garder ses distances afin de préserver ses intérêts stratégiques avec l’Algérie.
Comme l’Espagne et l’Allemagne, la France doit, aujourd’hui plus que jamais, choisir son camp. Jouer un double jeu comme elle l’a toujours fait ne nuit pas seulement au Maroc qui cherche à parachever son intégrité territoriale, mais il sert sur un plat d’argent les caporaux de la junte militaire algérienne qui exploitent à outrance le concept de l’«ennemi» pour voiler avec un tamis leur répression du peuple algérien en général et Kabyle en particulier.