Le nouveau Nouakchott à l'épreuve d'Alger

Il faut compter sur une diplomatie performante pour ramener Nouakchott du côté du droit. Le Sahara est marocain, sans ambiguïté.

Un nouveau président en Mauritanie est un événement politique majeur pour le Maghreb et pour tout le Nord-ouest africain. Avec une note particulière pour le Maroc. Le samedi 22 juin 2019, la Mauritanie se réveille avec un nouveau président, élu dès le premier tour des élections présidentielles. Il s’appelle Mohamed Ould Ghazouani. Ses 52% font tiquer dans les chancelleries qui n’apprécient pas beaucoup ce genre de score à l’africaine. Même si, dans certains cas, ces mêmes représentations diplomatiques les suscitent et les maintiennent en poste à bout de bras, parfois à la limite du ridicule et de la caricature.

Honneur à ceux qui s’installent et qui sont soupçonnés de porter un projet de coopération et d’avenir. Les promus, frais émoulus, sont d’abord suspectés de reproduire chez eux les mêmes pratiques politiques que leurs prédécesseurs. Par contre, certains sont l’objet de jugements de valeur d’emblée positifs. Ils sont même soupçonnés de porter un espoir de vrais changements dans la conduite des affaires d’État, avec effet immédiat et partenariat gagnant-gagnant à la clé.

Une chose est sûre, tous les regards se portent vers ce politique du nom de Mohamed Ould Ghazouani venu des dunes désertiques. Quel que soit le poste d’observation, l’infiniment grand est à portée de main, coucher de soleil compris. Un paysage de carte postale pour une invite touristique qui peut s’avérer d’un grand apport pour la connaissance du pays. (Lire notre article page 21). C’est précisément ce que les Mauritaniens ont longtemps vécu pratiquement en silence. Une tourmente politique permanente depuis l’indépendance du pays, le 20 août 1961, à ce jour. Ce qui caractérise le plus la vie politique de Mohamed Ould Ghazouani, sur la durée, c’est justement la succession sans répit de coups d’État militaires. À chacune de ces tentatives de putsch, il a su garder un juste équilibre entre une implication franche et directe et une prise de distance lui permettant d’éviter une éventuelle accusation de complicité. Une posture difficile pour un chef d’État-major au plus proche des faits et gestes d’un coup d’État avorté en 2008. Il fait beaucoup mieux dans la mesure où il prend du grade par une nomination à la tête du ministère de la Défense.

Entre Mohamed Ould Ghazouani et Mohamed Ould Abdelaziz, c’est une ancienne amitié qui remonte à l’académie d’officiers de Meknès. Les deux y ont reçu une formation militaire de pointe. Comme son prédécesseur, Mohamed Ould Ghazouani est également un général de son état. Comme si ces relations n’étaient pas suffisamment intimes, Ould Ghazouani a épousé Meriem Lahah, nièce du président Ould Abdelaziz. Cet aspect familial compte beaucoup dans une société à structure tribale; une clé qui peut expliquer les difficultés de compréhension de certains faits politiques.

Pour que la boucle soit bouclée, rien de mieux qu’un saupoudrage politique. Tout se passe comme pour dire aux concitoyens civils, vous ne pouvez être gouvernés que par nous, les militaires ordonnés. Même si Ould Ghazouani est fraîchement élu et même s’il est le candidat préféré et officiellement déclaré du président sortant; même si la connivence politique entre les deux hommes est plutôt susceptible de continuité que de changement; même si cinq candidats de l’opposition se plaignent du traitement anti-démocratique auquel ils ont eu droit…, le slogan qui prime a été celui d’une forte demande de changement. Tel que ce paysage politique se présente, il n’y a que deux attitudes à adopter sans que le prix à payer ne soit totalement négatif. Prendre une position de défense des principes fondateurs de la démocratie, ce qui revient à livrer Nouakchott pieds et poings liés à Alger. Ou ignorer toutes les entraves qu’a connues ce scrutin et passer pour un Maroc qui ne voit aucun inconvénient à ce que la démocratie soit foulée aux pieds…

Quoi qu’il en soit, il faut s’attendre à ce que l’armada politique d’Alger se dépense sans répit et sans compter. L’objectif étant, comme cela n’a pas changé depuis quarante ans, de faire le vide autour du Maroc sur la scène internationale. Il se peut que l’on en arrive à demander à Nouakchott d’être un peu moins dans le giron d’Alger; un peu plus indépendante, y compris et surtout sur la question du Sahara marocain, d’abord entre nous autres Maghrébins

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