Nabil Benabdallah : "Il y a des règlements de comptes au sein de ce gouvernement"

Questions à Nabil Benabdallah, Secrétaire Général du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS)

Comment avez-vous réagi à la divulgation du projet de loi 22.20 relatif aux réseaux sociaux?
Le contenu de ce texte pose un véritable problème. Il y a certains articles qui sont clairement liberticides et qui vont limiter le rayon d’actions et d’expression des internautes et des usagers des réseaux sociaux. Il s’agit en particulier de leur capacité à s’exprimer sur certains produits ou sur certaines entreprises ou autres qui ne peut pas être limitée ou freinée. Avec les textes actuels, la police arrive parfaitement à faire son travail concernant la lutte contre les fake news et je pense que cela suffit amplement.

Maintenant, si nous allons utiliser la situation dans laquelle nous sommes pour passer des choses qui ont probablement pour objet de réglementer le boycott par exemple, ceci est visiblement liberticide. Je me suis clairement exprimé, au nom du PPS, à l’encontre de ce texte. Ce qui est gravissime, c’est que ce texte ne semble pas être une formule définitive. Dans un contact que j’ai eu avec le chef du Gouvernement, il m’a affirmé, et les documents sont là pour le prouver, qu’un conseil de gouvernement s’est tenu le 20 mars 2020, que ce texte a été adopté sous réserve d’être revisité par une commission ministérielle qui avait pour mission de revoir quelques articles sur lesquels il y avait polémique.

C’est une pratique courante. A aujourd’hui, ce texte n’est toujours pas au Parlement alors que les traditions veulent qu’il soit mis dans le circuit législatif quelques jours après son adoption.

Pourquoi dites-vous que ce n’est pas une formule définitive?
Lors de mon entretien avec le Chef du gouvernement, il m’a affirmé qu’il y a eu une deuxième mouture au sujet de laquelle il y avait aussi discussion et qu’une réunion pour discuter d’une troisième mouture est programmée. C’est dans ce cadre-là que quelqu’un s’est amusé à faire sortir ce texte du sein même du gouvernement.

En tant que parti d’opposition, que comptez-vous faire?
C’est d’abord un acte irresponsable. Nous estimons que ce n’est surtout pas le moment pour nous balancer un texte de ce genre. C’est inacceptable pour nous, ce contenu, parce qu’il est liberticide. Sortir ce texte de cette manière montre qu’il y a des règlements de comptes au sein de ce gouvernement. Mais que cela ne se fasse pas au détriment de l’intérêt national. Faire fuiter ce texte alors même que tous les esprits sont concentrés sur cette unité et union nationales, sur cette grande mobilisation autour de la lutte contre la pandémie du coronavirus, c’est inacceptable. Cela a mis le feu sur les réseaux sociaux.

Cela porte atteinte à la nécessité de conforter cette mobilisation dont nous avons énormément besoin aujourd’hui. Qui est à l’origine de cette “fuite”, cela m’importe peu. Moi, j’ai affaire à un gouvernement qui doit assumer ses responsabilités. Si les articles 14, 15 et 18 de ce projet de loi sortent en l’état, nous comptons clairement nous opposer à ce texte. Le pays est dans l’union nationale. Nous espérons que le gouvernement révisera les articles suscités avant de le soumettre au Parlement.

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