
Rêveur un jour, rêveur toujours
Profil. Dans ce qu’il identifie à un «roman personnalisé», le premier de sa carrière littéraire, Mehdi Fath dresse avec «J’ai trahi mon destin» un panégyrique au rêve. «Si rêver est un crime», clame-til, «alors je plaide coupable».
À la confluence du rêve et de la littérature, dans la cuisse de l’anticonformisme, Mehdi Fath dit avoir choisi d’ourdir son destin. Mais pas celui auquel, explique-t-il, la société aurait voulu l’assigner. Lui, poursuit-il, préfère trahir son destin, ce pesant et suffisant destin.
J’ai trahi mon destin, voilà le titre du premier roman de ce jeune (25 ans) écrivain de la capitale, Rabat. Une formulation déclinée sous forme de sentence et dont l’auteur a fait son mantra, raconte-t-il, depuis sa lecture de La Cinquième Montagne, de l’écrivain brésilien Paulo Coelho. «Cette phrase de «La Cinquième Montagne», «l’homme est né pour trahir son destin», m’avait bouleversé», se rappelle-t-il. J’ai trahi mon destin, présenté dans la ville de Kénitra samedi 11 septembre 2015, ambitionne de se poser en panégyrique du rêve. Faire de sa vie son rêve et de son rêve sa vie. Un des nombreux crédos de l’auteur.
Yassine, l’ami parti trop tôt
«Et toi Mehdi quel est ton rêve?»: c’est sur cette interrogation de son ami Yassine que débute le destin de Fath. Fath a quatorze ans. Son père, Aziz, veut en faire un matheux. Lui commence à rêver (déjà) d’autre chose. Pendant «des heures et des heures», calfeutré dans sa chambre, il écoute Tupac Shakur, the Notorious B.I.G. et Sean Combs, ses musiciens de rap préférés. Avec Yassine, ils projettent de monter leur propre groupe. Mais le destin en décide autrement. Yassine part trop tôt. Par pudeur, il élude le sujet. Fath décide de poursuivre l’aventure, seul cette fois. La réalité artistique du pays le contrarie cependant. Aucune infrastructure ne le prend en charge. Il met en place sa propre maison de production, M.F Production, comme ses initiales. Celle-ci prend sous son aile de jeunes artistes qu’elle révèle. Entre autres Khaoula El Moujahid, Maria Nadim, Salim Bensalem et Simo Saïdi sont passés par M.F Production.
C’est en animant en 2013 une conférence à Kénitra dans le cadre du TEDxKenitra, lors de laquelle il relate son parcours à la tête de M.F Production, qu’il prend conscience de la nécessité de consigner son expérience dans un livre. Ce qu’il identifie à un «roman personnalisé». «Si rêver est un crime», répète-t-il souvent, «alors je plaide coupable». C’est la libraire Dar Essalam qui l’édite. Les internautes pouvaient cependant consulter les premiers chapitres depuis septembre 2014 sur le site web Moroccan Writers, réunissant une foultitude de jeunes écrivains marocains. Social media manager, Fath ne manque d’ailleurs pas de jouer des réseaux sociaux. Près de 4.000 personnes aiment sa page Facebook.
La thématique du rêve pourrait confiner à l’ingénuité. Fath s’en défend. Il cite les retours «très positifs» des premiers lecteurs – cent la première semaine. «Sortir du troupeau», il y croit dur comme fer. Son histoire a déjà reçu une proposition d’adaptation cinématographique, nous confie-t-il.