Le Maroc et l’élection présidentielle Américaine

Entre Rabat et Washington, il existe tout un matelas d’intérêts mutuels. Pour autant, le Maroc n’est pas aligné sur Washington: il a des intérêts nationaux propres et une pleine souveraineté sur sa diplomatie.

3 novembre 2020! Voilà que le monde entier, malgré la pandémie Covid -19, est suspendu à cet agenda: celui de l’élection présidentielle aux Etats-Unis. Trump ou Biden? En tout cas, par-delà cet agenda, il faut rappeler les intérêts supérieurs du Royaume avec les Etats-Unis, que ce soit avec l’élection de l’un ou la réélection de l’autre. Globalement, la référence à la continuité prévaut. Avec Trump à la Maison Blanche depuis quatre ans, l’on a eu un mandat qui a permis d’appréhender le niveau et la dimension des relations entre Washington et Rabat; il faut même dire que leur qualité s’est sensiblement renforcée -à la différence de son prédécesseur, le démocrate Barrack Obama.

Qu’en sera-t-il avec l’élection éventuelle de Joe Biden, démocrate? Il devra bien prendre en compte la nature des liens entre les deux pays et les multiples composantes de leur partenariat privilégie, stratégique même. C’est qu’en effet le Royaume coche pratiquement beaucoup de cases. Il y a là un acquis. Un socle. Un matelas d’intérêts mutuels important.

Pour autant, le Maroc n’est pas aligné sur Washington: il a des intérêts nationaux propres et une pleine souveraineté sur sa diplomatie notamment pour ce qui est de la question palestinienne et du statut d’Al Qods Acharif, S.M. Mohammed VI étant par, ailleurs président du Comité Al Qods. Nul doute que sur cet aspect-là et sur d’autres, il pourrait y avoir des «frottements », des ajustements, voire même des points de divergence pouvant polariser un certain climat bilatéral.

Qu’en sera-t-il, en particulier, du dossier de la question nationale du Sahara, qui a bénéficié au Conseil de sécurité de l’ONU d’un ferme et constant soutien de l’administration Trump? Avec l’administration Obama, l’on se souvient que bien des ambigu?ités avaient été enregistrées, notamment au Conseil de sécurité. Il ne faut pas exclure à cet égard le regain d’activisme de certains cercles et réseaux: ils voudront pratiquement reprendre du service pour soutenir les séparatistes -Mary Kerry Kennedy, nièce de Robert Kennedy et présidente du centre éponyme, ne sera sans doute pas la dernière à se remobiliser.

Reste que, sur la table, Biden trouvera une coopération féconde, multiforme aussi: l’accord du Millenium Challenge Coopération Compact avec une enveloppe de 450 millions de dollars signé en 2017; l’Accord de libre-échange signé en 2005; la forte hausse des échanges commerciaux, d’un montant de 51 milliards de dirhams en 2019, soit un triplement en quatre ans; les Etats-Unis au 7ème rang des investisseurs; et quelque 160 entreprises américaines installées au Maroc: autant de secteurs d’une coopération dense. A côté de ce premier volet, un autre: celui de la nature, de la dimension et de l’étroitesse des rapports diplomatiques entre les deux pays.

Le Maroc est un allié majeur non membre de l’OTAN - comme la Jordanie et de l’Egypte. La coopération militaire est optimale avec des dons de matériel, des achats d’avions F-16 et autres, des programmes de formation, des manoeuvres conjointes dans la région, etc… En termes géostratégiques, Washington apprécie hautement le rôle du Maroc dans la région, au Maghreb et surtout dans l’espace sahélo-saharien. Sans oublier la diplomatie marocaine dans le continent pour la paix, la stabilité, la sécurité, le développement, etc...

Par ailleurs, deux autres facteurs pèsent et solidifient les rapports entre les deux pays. Le premier concerne le rôle particulier du Maroc dans la lutte antiterroriste qui participe de préoccupations politiques internes mais qui en même temps s’insère dans la constante de la diplomatie américaine de manière structurelle, depuis les attentats du 11 septembre 2001. Il s’agit là d’un actif précieux, apprécié par Washington. Le second intéresse, lui, ce que l’on pourrait appeler le «Made in Morocco » pour ce qui est d’une politique citée en exemple et relative à la coexistence religieuse et au dialogue interreligieux. Rabat prône et défend un Islam modéré, tolérant -une vision alternative à un certain Islam politique et à ses dérives extrémistes et radicales.

Au total, une capitalisation qui ne pourra que peser de tout son poids durant le prochain mandat présidentiel américain, celui de Trump ou celui du démocrate Biden...

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