Mali: six ans plus tard, les accords d'Alger en échec

Ce n’est certainement pas grâce à la voisine de l’Est que Bamako parviendra à apaiser le ton avec les rebelles touaregs, dont la menace de la reprise des armes est à peine voilée.

Tout le monde se souvient de la façon peu cavalière dont la diplomatie algérienne s’est emparée du conflit du Nord-Mali au milieu des années 2010, en écartant les autres médiateurs, dont le Maroc, et en imposant ses accords d’Alger -car ils étaient, in fine, davantage les siens que ceux des propres belligérants. Un peu plus de six ans après la signature de ces accords -en 2015-, le constat d’échec est implacable, et il se dit même qu’une reprise des affrontements serait carrément dans le pipe.

Personne ne le souhaite bien sûr, mais telle est la conclusion que l’on peut du moins tirer de la sortie de ce 20 juin 2021 de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), qui représente les anciens rebelles. “Les résultats ne sont pas satisfaisants,” a, ainsi, déclaré le porte-parole de la CMA, Maouloud Ould Ramadane. Ce dernier, a, dans le détail, fait porter le chapeau au nouvel Exécutif malien, formé le 7 juin 2021 suite au coup d’État effectué quinze jours plus tôt par le colonel Assimi Goïta -“la faute incombe au gouvernement”, a notamment dit M. Ould Ramadane; ceci étant, pour de nombreux observateurs, le ver était d’ores et déjà, avec les accords d’Alger, dans le fruit.

Groupes séditieux
“Si ces accords avaient été faits dans les règles, s’ils avaient été véritablement consensuels et non, pour ainsi dire, imposés, nous n’en serions pas aujourd’hui à de tels discours,” analyse une source diplomatique ouest-africaine qui renvoie au discours public du 4 juin 2021 du nouveau Premier ministre malien, Choguel Kokalla Maïga, qui sans les citer nommément avait laissé entendre que les accords d’Alger étaient contraires “aux intérêts fondamentaux du peuple du Mali” -il s’était également toujours montré féroce, avant son investiture, à leur encontre.

Et notre source de poursuivre: “C’est un secret de polichinelle qu’Alger n’avait laissé que deux choix à IBK (Ibrahim Boubacar Keita, président malien déposé par le colonel Goïta en août 2018, ndlr): soit accepter de signer, soit voir les groupes séditieux continuer de le déstabiliser et déstabiliser son intégrité territoriale, car tout le monde sait les accointances de la capitale algérienne avec les groupes jihadistes de l’époque, notamment Ansar Dine”.

L’objectif de l’Algérie à l’époque était de fait, alors, surtout de s’affirmer en tant que puissance régionale, notamment au dépens du Maroc, auprès duquel se sont tournés les principaux chefs touaregs, à l’instar du secrétaire général du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MLNA), Bilal Ag Acherif, reçu fin janvier 2014 par le roi Mohammed VI au palais royal de Marrakech, ou encore le président d’honneur du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), Intalla Ag Attaher, qui avant son décès en décembre 2014 avait été hospitalisé de longs mois durant à l’hôpital militaire de Rabat.

Car ces chefs étaient les premiers à être conscients du jeu trouble de la voisine de l’Est. De son côté, M. Keita avait tenu à ce que participe, en septembre 2013, à son investiture le Souverain, qui s’était à cette occasion signalé par un discours largement commenté. L’Algérie, dont le président Abdelmadjid Tebboune assurait en octobre 2020 qu’elle “est le seul pays au monde qui connaît parfaitement le Mali” n’avait toutefois pas goûté, avec le résultat que l’on voit.

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