Natif de Missour, dans la province de Boulemane, en 1980, Mustapha Elhasnaoui a longtemps été une des plumes les plus en vue de l’islamisme politique marocain. Journaliste, son nom pouvait se rencontrer, au tournant des années 2010, dans différentes publications à inclination clairement “verte”, à l’instar d’Assabil, un hebdo dont la ligne éditoriale peut même être qualifiée de salafiste. Et c’est alors qu’il travaille à Assabil, justement, qu’en mai 2013 il est arrêté pour appartenance à une organisation terroriste. Lui a toujours nié. Dans les faits, M. Elhasnaoui explique qu’il devait se rendre en Syrie pour effectuer un reportage auprès des réfugiés de la guerre civile, avant d’être refoulé par les autorités turques.
Le soupçonnaient-ils de vouloir rejoindre le Front Al-Nosra, comme allait l’en accuser plus tard le parquet? En tout cas, la chambre criminelle près l’annexe de la cour d’appel de Salé a la main lourde et le condamne, en juillet 2013, à quatre ans de prison, dont il ne finira toutefois par faire que trois. Dans la sphère des ONG, son cas suscite beaucoup d’émoi, et il bénéficie même de l’appui du groupe de travail de l’Organisation des Nations unies (ONU) sur la détention arbitraire qui, en janvier 2014, demande sa libération.
Son argument est que “le légitime exercice de ses droits humains à la liberté de pensée, d’opinion, d’expression et de religion” ont été bafouées. Les services onusiens avaient notamment estimé que M. Elhasnaoui avait payé le soutien et journalistique et politique qu’il avait apporté, dans le cadre de son engagement dans le Forum Al-Karama, une organisation de défense des droits humains d’obédience islamiste, aux salafistes arrêtés au lendemain des attaques terroristes du 16 mai 2003.
Quand, en septembre 2019, M. Elhasnaoui demande l’asile en Suède, les nombreux plaidoyers qu’il avait reçus en sa faveur l’aident à obtenir une issue favorable. Mais ce qui est sans doute le plus ironique est qu’en même temps qu’il s’installait en Scandinavie, les raisons qui avaient motivé son passage derrière les barreaux et donc son départ ultérieur pour la Scandinavie n’étaient plus d’actualité. D’islamiste, M. Elhasnaoui est devenu aujourd’hui un militant laïc, premier adversaire de ce qui constitue pour lui un “obscurantisme” et dont il fut, dans sa précédente vie, un de tenants les plus coriaces. Outre “Le Vrai Créateur et le créateur imaginé”, il a été, au mois de juillet 2023, l’auteur de “L’Islam putschiste au Maroc”, qui dénonce les velléités de prise de pouvoir par la force de certains groupes islamistes nationaux.