Ça se précise, petit à petit. Ce que l’on perd sur le marché de l’Union européenne, on le gagne sur le marché russe. Cette année encore, les exportateurs marocains de fruits et légumes se livrent à une nouvelle course de positionnement sur le marché russe. Pour la saison 2015-2016, ils tablent sur une exportation de près de 250.000 tonnes d’agrumes. Ce qui explique cette ruée inhabituelle sur ce marché russe de 146 millions de consommateurs, c’est un enjeu purement économique. Depuis l’embargo imposé par la Russie sur les produits en provenance de l’UE faisant suite à la crise ukrainienne, le Maroc veut gagner sa part dans un marché de plusieurs dizaines de milliards d’importations de fruits et légumes, de produits halieutiques… Une aubaine pour les exportateurs marocains d’agrumes pour booster leurs ventes sur ce marché. D’autant plus que 50% des exportations marocaines d’agrumes sont absorbées par le marché russe. La Russie est le premier client du Maroc en agrumes. Aussi, elle est le 2e client mondial des tomates marocaines.
Après le “World Food Moscow” à la mi-septembre 2015, les exportateurs marocains préparent ainsi le Grand festival du Maroc à Moscou, qui se tiendra du 6 au 20 novembre 2015. C’est le deuxième événement de cet acabit et de cette envergure qui se passe à quelques encablures seulement de la participation en septembre de 26 entreprises marocaines au World Food Moscow. Mais, cette fois, l’enjeu est beaucoup plus grand. Durant les deux semaines que la manifestation va durer, plus de 200 produits marocains seront exposés dans des magasins de la capitale russe. Après le succès de la première édition en 2014, Maroc Export s’attend à un retour encore plus positif cette année.
Bonne récolte
Positif, car la récolte de la campagne de l’année dernière en termes de croissance des exportations a été vraiment bonne, d’autant plus que la Russie n’a toujours pas levé son embargo sur les produits provenant de l’Union européenne (UE). L’Association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes a communiqué des chiffres rassurants. La saison 2014-2015 a connu une augmentation des exportations marocaines vers la Russie entre 14 et 20%. L’association assure que la tomate, le concombre et le poivron ont fait l’objet d’une forte demande. Particulièrement la tomate cerise, qui devient de plus en plus prisée par les consommateurs russes. La Russie l’importait d’Europe du Sud. Suite à l’embargo, ils ont goûté les tomates cerises marocaines. Et la différence est remarquable.
Actuellement, les opérateurs espèrent que le maintien de l’embargo leur permettra de grignoter encore plus de parts de marché pour la campagne 2015-2016. Dans la région du Souss, à Agadir notamment, les négociations sont en cours avec les Russes pour discuter des quantités et modalités d’exportation d’agrumes. Concernant la tomate, si le marché russe absorbait, il y a 4 ans, 15.000 tonnes de tomates marocaines au maximum, l’année dernière, il a fait la demande de 70.000 tonnes.
Bureau permanent
Les pouvoirs publics oeuvrent également pour permettre aux opérateurs de renforcer leur présence sur un marché à fort potentiel. Ainsi, à partir de janvier 2016, l’EACCE sera l’organe exclusif pour la promotion des exportations de produits agricoles marocains. L’établissement a également ouvert un bureau permanent à Saint-Pétersbourg pour assurer un meilleur contrôle sur l’arrivée des conteneurs, l’étiquetage, les prix... Mais cette croissance ne se déroule pas sans encombres. Des difficultés existent. A commencer par la faiblesse de la monnaie locale, qui a beaucoup baissé en un an. C’est devenu un souci lancinant pour les professionnels à la veille du démarrage de la campagne d’exportations. En un an, le rouble a perdu près des trois quarts de sa valeur. Il y a aussi les défauts de paiement des importateurs russes, aggravés, notamment, par la baisse de la valeur du rouble. Les choses s’améliorent mais pas vraiment. Surtout que les exportateurs marocains ont beaucoup investi pour améliorer la qualité des produits.
Sur le plan de la logistique, des faiblesses persistent. Jusqu’à présent, une seule desserte hebdomadaire assure de façon permanente la liaison entre Agadir et Saint-Pétersbourg. En 2014, deux dessertes supplémentaires ont été mises en place pendant la saison pour répondre à la forte demande russe suite à l’embargo. Elles seront maintenues encore cette saison pour répondre à la forte demande exprimée. Des solutions pérennes à ces inconvénients pour saisir véritablement l’aubaine que présente le marché russe.