“Les conditions climatiques difficiles dans l’Anti Atlas marocain perturbent gravement la vie quotidienne, ce qui nous confronte à une sécheresse persistante et à un accès limité à l’eau potable,” introduit Jamila Bargach, marquant le début d’une réflexion profonde lors de la journée d’étude à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Ben Msik, le 23 février 2024. Sous l’égide du laboratoire Communication, société et organisation, avec Pr.Jaouad Bennis etPr.Hayat Zirari à la présidence, cette rencontre sous le thème «Anthropologie et Communication» a dépassé le simple cadre académique pour s’interroger sur la capacité de l’anthropologie à adresser les enjeux sociétaux contemporains.
Lors de cette journée, l’anthropologue et activiste Jamila Bargach a partagé «les leçons apprises au fil d’une décennie de collaboration avec l’ONG Fog Quest, révélant comment le plus grand projet de collecte de brouillard au monde a transformé la région d’Ait Baamrane.» Elle insiste sur l’impact tangible de cette initiative : «Chaque mètre carré de filet capte environ 22 litres d’eau, ce qui change radicalement le quotidien des communautés locales.»
Besoins concrets
Cependant, son discours ne s’est pas cantonné à une simple présentation de succès. Mme Bargach a mis en lumière les défis persistants: «Si la demande pour cette eau du brouillard augmente de manière excessive, ou si sa valeur n’est pas pleinement reconnue par les communautés, nous risquons de voir ce projet échouer.» Cette mise en garde soulève des questions cruciales sur la durabilité des initiatives de développement et la capacité des innovations technologiques à résoudre des problèmes sociétaux de manière isolée.
Mme Bargach a également abordé des sujets plus larges, touchant aux droits humains et à l’émancipation des femmes, illustrés par son parcours et ses publications, notamment «Orphans of Islam», où elle explore «les dynamiques complexes de genre, d’abandon et d’adoption secrète au Maroc.» Ce livre ouvre un débat essentiel sur les stigmates et les structures familiales, démontrant l’importance de l’anthropologie pour comprendre et transformer nos sociétés.
La journée d’étude a offert une réflexion sur le rôle de l’anthropologie dans le monde actuel, soulignant «l’importance de lier la connaissance académique aux besoins concrets des communautés», comme l’a rappelé Mme Bargach. Son intervention a servi de pont entre la science et l’activisme, rappelant que «sans une approche intégrée qui respecte les dynamiques communautaires, les solutions technologiques restent insuffisantes pour adresser les défis sociaux.»
Malgré l’inspiration générale, cette rencontre a aussi exposé les limites des solutions scientifiques face aux problèmes sociaux. La critique implicite de Jamila Bargach, soulignant que «la technologie, dépourvue d’une réflexion anthropologique et sociale approfondie, peine à provoquer un changement social durable,» invite à une interrogation sur le rôle des chercheurs et des scientifiques dans le processus de transformation sociétale.