L'accord de Skhirat incontournable

Mustapha Sehimi

CRISE LIBYENNE


Le Maroc appuie les efforts de l’envoyé spécial de l’ONU en Libye et compte apporter sa contribution à la résolution de la crise que vit ce pays maghrébin.

A l’occasion de la visite à Rabat, le 29 octobre 2018, de l’envoyé spécial des Nations Unies en Libye, Ghassan Salamé, une nouvelle évaluation a pu être faite de la situation actuelle dans ce pays maghrébin. A l’issue d’une rencontre avec le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, Nasser Bourita, un état de la question a pu être fait. Où en est-on? Le Maroc a été consulté en l’occurrence sur les possibilités offertes à propos des «étapes à venir au service de la stabilité de la Libye», comme l’a déclaré le responsable de notre diplomatie. Il y a, en effet, encore du chemin à faire pour que les protagonistes concernés dans ce dossier puissent finaliser et surtout acter un nouveau pacte national mettant fin à des rivalités et à des conflits qui ont marqué la vie politique avec l’après-Kaddafi, voici sept ans.

Ce cadre-là de réconciliation nationale existe, c’est l’accord de Skhirat, laborieusement conclu et signé le 17 décembre 2015, après plusieurs sessions de négociations inter-libyennes. Il est ainsi prévu la formation d’un gouvernement, la mise en place d’un conseil présidentiel et d’un haut conseil d’État. Ce plan est soutenu par des puissances internationales (France, États-Unis, Allemagne, Italie et Royaume Uni) ainsi que par le Conseil de sécurité. Mais les dissensions persistent et les camps demeurent tout aussi divisés en Libye notamment entre les autorités de Tripoli, avec à leur tête Fayez Al Sarraj, et celles de Benghazi, sous la direction du maréchal Khalifa Haftar. La localisation du gros de la production de pétrole dans cette région orientale, la Cyrénaïque, complique les voies de la paix et de l’unité.

Après bien des épisodes marqués par des affrontements entre les uns et les autres, le Conseil de sécurité a confirmé, à la mi-décembre 2017, que l’accord de Skhirat est le seul «cadre viable» à une paix en Libye. Il a en effet permis la formation d’un gouvernement d’union dirigé par Fayez Al Sarraj. Même si ce cabinet a pu étendre son influence dans la capitale et d’autres villes de l’ouest libyen, il n’a pas pu imposer son autorité sur de larges pans du pays, en particulier à l’Est.

Le constat qui est fait alors –et qui est toujours valable– c’est qu’il n’y a pas de solution militaire à la crise et qu’il faut respecter le cessez-le-feu pour aider à créer un climat favorable à l’instauration de la paix, de la sécurité et de l’union. Mais comment unifier et renforcer les forces armées libyennes sous une supervision et une autorité civile? Comment réconcilier le gouvernement Al Sarraj, basé à Tripoli, reconnu par la communauté internationale alors qu’il y a un autre gouvernement parallèle, sous la coupe du maréchal Haftar, à la tête de l’Armée nationale libyenne? A la suite d’une initiative du président français, Emmanuel Macron, à la fin mai 2018 qui a permis de réunir à Paris les deux frères ennemis, un accord a pu se faire sur la tenue d’élections présidentielles et législatives avant le 10 décembre de cette même année 2018. Un objectif chimérique puisque les textes appropriés n’ont pas pu être finalisés. Comme pour compliquer les choses, se pose de plus en plus le problème de la situation à Tripoli et du contrôle des milices qui s’y trouvent.

Il est admis aujourd’hui que malgré l’adoption d’une loi sur le référendum constitutionnel par la chambre des représentants, la perspective d’un scrutin pour la fin de cette année n’est plus envisageable. Le Conseil de sécurité en a pris acte le 11 septembre en prorogeant d’un an la mission de Ghassan Salamé, envoyé spécial, et en appelant à la tenue «aussitôt que possible» d’un «scrutin crédible».

Le Maroc oeuvre dans ce sens, à la différence de l’Algérie, qui s’immisce dans les divisions inter-libyennes –son ministre des Affaires étrangères, Abdelkader Messahel, s’est ainsi rendu dans le sud libyen, voici cinq mois, sans aucune autorisation pour s’y entretenir avec des personnalités hostiles au maréchal Haftar. Le Maroc, lui, appuie les efforts de l’envoyé spécial de l’ONU et compte apporter sa contribution à la résolution de la crise libyenne

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