
RESTRUCTURATION. Grâce à l’accord signé avec la Direction générale des impôts, le notariat marocain se met à l’ère numérique. Ahmed Amine Touhami El Ouazzani nous explique les nouveautés dans le processus d’organisation de la profession.
Maroc Hebdo: Vous venez de signer un accord avec la Direction générale des impôts en vue de faciliter aux notaires le règlement de leurs obligations fiscales. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani : Tout d’abord, je tiens à vous préciser que cet accord s’inscrit dans le cadre de la stratégie de modernisation de la profession adoptée par le conseil national de l’ordre en 2013. La modernisation fait partie des priorités de la direction générale des impôts dans le cadre de l’administration numérique. Je souligne également que ce projet qui a pour objet l’échange de données informatisées, est inscrit dans le plan d’action du comité national de l’environnement des affaires (CNEA) au titre de l’année 2015. Cet accord définit les modalités d’échange de données entre la DGI et le notaire via leur système d’information respectif. Il concerne la procédure d’enregistrement des actes notariés auprès des services de l’administration fiscale dont le délai seront considérablement réduits et passeront ainsi de plusieurs semaines à 48 heures. Ce qui impactera positivement le climat des affaires, participera à la construction d’une relation de partenariat et de confiance avec le contribuable et améliorera l’exercice de la profession du notaire.
Est-il généralisé à tous les notaires du Royaume?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: Effectivement, c’est un système qui est dédié à tous les notaires du Maroc. Il est à préciser que le système est opérationnel, le premier acte a été enregistré avec succès le jour même de la signature de cet accord. Nous comptons démarrer le déploiement dans les prochains jours.
La profession essuie des critiques acerbes liées à des affaires à scandales provoquées par des notaires peu scrupuleux. Comment comptez-vous remédier à cette situation?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: A l’instar de toutes les professions, le notariat n’est pas à l’abri de certains dérapages. Cependant, nous avons la chance de vivre dans un Maroc en pleine mutation qui fait de la moralisation une priorité nationale.Le notariat à travers le conseil de l’ordre s’est engagé pleinement dans ce processus de réforme et a mis en place en concertation avec différents départements ministériels et partenaires institutionnels une batterie de mesures pour immuniser la profession et protéger l’intérêt du citoyen.
Comment ces notaires peuvent-ils se permettre des abus?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani : Notre profession a souffert durant des années d’un grand déficit législatif et réglementaire qui a eu un impact négatif sur son organisation et par conséquent sa performance et son développement. Aujourd’hui et malgré les multiples reproches que l’on peut enregistrer sur les textes qui régissent notre profession, je peux vous assurer que nous sommes sur la bonne voie. Les chantiers que nous avons lancés récemment ainsi que ceux que nous comptons mettre en oeuvre dans les prochains jours sont incontestablement le fruit de ces réformes. Bien entendu, il reste beaucoup à faire. Nous avons besoin de conforter notre capital confiance, multiplier les efforts pour moderniser nos outils de travail et relever davantage le niveau de notre savoir faire. Tout cela, nous devons le faire dans un contexte juridique et économique extrêmement difficile et particulièrement fragilisé par une concurrence féroce et hostile.
Qu’en-t-il du fonds de garantie tenu par la CDG et censé indemniser les clients victimes?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: Le fonds de garantie des notaires a été institué par le Dahir de 1925 et a été repris par la loi 32.09 actuellement en vigueur.
Ce fonds qui est destiné à indemniser les victimes des sinistres, contient des sommes très importantes dont nous ignorons malheureusement le solde actuel, auquel s’ajouteront les intérêts sur les dépôts des notaires confiés à la CDG.
Ce fonds sera activé dès publication du décret d’application. Le ministre de la justice et des libertés est conscient de l’importance de mettre en place ce mécanisme d’indemnisation et nous a promis de mettre tout en oeuvre pour accélérer le processus d’adoption de ce décret.
En vertu de la nouvelle loi, les notaires sont tenus de déposer tout l’argent des clients chez la CDG. Dans quelle mesure cette disposition est-elle respectée?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: En effet, à compter du 27 juillet 2015, l’ensemble des notaires sont tenus de déposer tous les fonds qu’ils détiennent au compte ouvert en leur nom à la CDG.
Dans ce cadre, le conseil national a lancé une campagne de sensibilisation destinée au grand public pour les informer de cette nouvelle procédure et a publié des insertions dans plusieurs supports de presse. En outre, le conseil national et la caisse de dépôt et de gestion tiennent régulièrement des réunions de concertation. Par ailleurs, les notaires sont soumis à un double contrôle mené par le parquet général et par les conseils régionaux.
A propos des contrôles, le parquet de Casablanca avait déclenché début 2015 une campagne contre les études des notaires. A quel rythme fonctionne ce contrôle?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: D’abord, ce n’est pas une campagne lancée contre les notaires. Il s’agit d’un contrôle annuel prévu par la loi dont l’objectif est de veiller au respect de la réglementation en vigueur. Comme tous les autres conseils régionaux, le conseil régional de Casablanca a participé à ces opérations de contrôles.
Vous venez de vous réunir avec le ministre de la justice, Mustapha Ramid, pour discuter, entre autres, de votre bras de fer avec les adouls. Pourquoi êtes-vous contre le fait qu’ils exercent le notariat?
Ahmed Amine Touhami El Ouazzani: La profession de notaire est régie par une loi spécifique, conforme à des standards internationaux, nous veillons à ce que toute personne qui exerce la profession de notaire réponde aux conditions imposées par cette loi. Nous ne permettrons ni aux adouls ni à aucune autre profession d’usurper notre fonction.