La Banque mondiale tire la sonnette d’alerte sur la prédominance du secteur informel au Maroc. Un frein majeur au développement économique du pays.
La Banque mondiale (BM) dresse un tableau inquiétant de la situation du marché de l’emploi au Maroc. Dans son récent rapport intitulé «Informalité et croissance inclusive au Moyen-Orient et en Afrique du Nord», rendu public début juillet 2023, l’institution de Bretton Woods révèle que le secteur informel représente 77,3% de l’emploi total au Maroc. En d’autres termes, 3 travailleurs marocains sur 4 sont dans l’économie informelle.
Un chiffre nettement plus élevé même en comparaison à des pays de la même région qui sont relativement similaires au Maroc sur le plan économique comme la Tunisie et l’Égypte où l’informel pèse 49,3% et 62,5% du marché du travail respectivement. Rappelant le contexte actuel marqué par la remise en cause du poids du secteur public dans les pays de la région, le rapport de la BM explique que l’hégémonie de l’informel pose plusieurs problèmes, comme la protection sociale limitée, les obstacles à la productivité et à la croissance, contraintes budgétaires, ou encore les difficultés structurelles.
Frein pour l’économie
Un constat que le Maroc ne peut contester, puisque même les chiffres officiels le confirment. Le Compte satellite de l’emploi (CSE) élaboré par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) en partenariat avec l’Organisation internationale du travail (OIT), indique que le secteur informel représente 67,6% de l’emploi total dans le pays. Sans grande surprise, l’agriculture est le secteur le plus touché par ce phénomène, avec une part de 97% de travailleurs dans l’informel, suivi du commerce (80,4%), et le BTP (45,7%). Une situation qui impacte fortement la productivité sectorielle, comme on peut le constater par exemple avec le secteur agricole qui ne contribue qu’à 12% du PIB du pays, alors qu’il emploie 40% des travailleurs. De manière globale, la productivité du travail dans le secteur formel est 3,7 fois supérieure à celle du secteur informel.
Toujours selon le CSE, les employés du secteur informel travaillent en moyenne 145 heures de plus que leurs homologues formels, tout en percevant une rémunération cinq fois inférieure en moyenne. La BM souligne toutefois que l’informel “n’est pas une fatalité”, puisqu’elle est, en grande partie, le résultat de problèmes juridiques, réglementaires et institutionnels, qui peuvent bien évidemment être réglés. L’institution internationale rejoint ainsi les experts nationaux qui ont appelé à maintes reprises à mettre en place des mesures urgentes comme la simplification des procédures administratives et la réduction des charges pour faciliter le passage au formel. Sans oublier les incitations financières pour les employeurs formels afin de les encourager à recruter davantage. Sans oublier une application plus stricte de la loi pour protéger les droits des travailleurs et enrayer l’informel.