GOUVERNER, C’EST PRÉVENIR !

Aucune anticipation par rapport à la décision d'Alger d'arrêter la livraison du Maroc en gaz

Aujourd’hui, à cause de cette mentalité handicapante, celle de ne pas prévoir, le Maroc paye les pots cassés. Il tente de s’en sortir, certes, pour le moment, mais à quel coût?

Tout le monde, ou presque, connaît cette maxime: Gouverner, c’est prévoir. Voilà ce que, depuis vingt-cinq ans, les gouvernements qui se sont succédé au Maroc ne semblent pas avoir fait. Un exemple: du 1er novembre 1996, date de l’exploitation commerciale du gazoduc Maghreb-Europe, considéré par nombre d’observateurs comme l’unique projet emblématique d’une coopération énergétique maghrébine tant rêvée, aucun gouvernement, aucune coalition gouvernementale, aucun ministre de l’Énergie ou de la planification, n’ont vu venir ce moment fatidique, celui que nous avons vécu, avec amertume, le 1er novembre 2021.

Peut-on croire qu’aucun ministre n’a prévu que l’hostilité algérienne allait conduire un jour à une rupture des relations commerciales et en particulier de l’approvisionnement du Maroc en gaz naturel? Sincèrement, non.

Pourquoi continue-t-on à gérer le pays au jour le jour, sans prévenir l’avenir? Le mieux qu’un responsable marocain ait pu faire, c’est de parler d’une stratégie quinquennale sectorielle, sur cinq ans. Puis vient un nouveau ministre fraîchement nommé pour nous dire que son prédécesseur a failli et nous faire la promotion de sa propre stratégie, qui, elle, enterre à jamais celle qui la précède. Bref, nos responsables ne se sont jamais inscrits dans la continuité. L’individualisme l’emporte toujours sur l’intérêt général.

Ne rien prévoir, c’est courir à sa perte. Le Maroc percevait des droits de transit du gaz algérien sur son territoire 25 ans durant. En novembre 2011, un contrat signé entre l’ONEE et la Sonatrach est entré en vigueur. Il portait sur la livraison de plus d’un milliard de mètres cubes de gaz par an qui alimentait les deux centrales électriques de Aïn Beni Mathar, d’une capacité de 470 MW, et de Tahaddart (385 MW).

Cet accord, qui rapportait au Maroc 160 millions de dollars par an, devait prendre fin le 31 octobre 2021. C’était en 2011. Au moment où nos responsables ont jugé «précoce» de lancer la construction de terminaux dédiés au gaz naturel liquéfié (GNL), ce gaz qu’on rend liquide pour pouvoir le transporter et l’acheminer par voie maritime. Ils ont décidé, sur la base de l’on ne sait quelle étude, de reporter ces projets à 2028. Pourquoi 2028? Dieu seul le sait. Quelle signification a cette date? Pas la moindre idée.

A l’époque, l’Algérie, empêtrée dans ses problèmes internes, ne manifestait pas aussi publiquement et de manière hystérique son animosité envers le Royaume. Nos responsables ont alors décidé de s’endormir sur leurs lauriers. Celles et ceux qui ont occupé le poste de ministre de l’Énergie se contentaient de gérer l’existant et les contrats de prospection dont on ignorait beaucoup de détails sur leurs clauses et les résultats obtenus.

En matière de gestion ou de gouvernance, il faut toujours anticiper et diversifier ses fournisseurs, de peur qu’un jour le fournisseur unique ne décide de tout arrêter ou d’augmenter les prix comme bon lui semble. Aujourd’hui, à cause de cette mentalité handicapante, celle de ne pas prévoir, le Maroc paye les pots cassés. Il tente de s’en sortir, certes, pour le moment, mais à quel coût? Et puis, les besoins en matière d’électricité augmentent d’année en année. Qu’at- on prévu aujourd’hui pour demain? A-t-on vraiment retenu la leçon?.

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