
Les déchets italiens sont loin d’être politiquement enfouis pour qu’on n’en parle plus. Ils continuent à occuper les devants d’une scène politique qui, de toute façon, avait bien besoin d’être secouée.
Plus les officiels en parlent, plus la question devient encore plus opaque. On aura tout de même compris une chose: Cette histoire rocambolesque de déchets italiens est une affaire maroco-marocaine. Notre gouvernement, naturellement en première ligne, semble complètement dépassé, pour la simple raison qu’il n’a aucune maîtrise technique du dossier, aucune connaissance des conventions internationales que le Maroc a signées, voire même sur la réglementation nationale en la matière. Le choix semble être fatal pour une coalition qui avait déjà bien du mal à parler d’une seule voix. Elle offre le spectacle d’un effritement à vue d’oeil et en temps réel. C’est à se demander si nous avons un pouvoir exécutif capable de faire face à des situations bien plus graves exigeant des réactions adéquates et immédiates.
L’héroïne de ce feuilleton à rebondissements est toute indiquée; Hakima El Haité, ministre déléguée de l’Environnement auprès du ministre de l’Énergie et de Mines. D’une intervention à l’autre, elle s’est littéralement perdue en déclarations contradictoires.
Ceci dit, Hakima El Haité était bien seule à la Chambre des représentants lors des questions orales du mardi 12 juillet 2016. Elle a été la cible d’un tir groupé venant de toutes les étiquettes politiques. Parmi les tireurs d’élite, ses propres alliés au gouvernement. Un député du PJD a proposé de renvoyer ce maudit chargement à l’expéditeur. Solution peu probable côté italien, où l’on est content d’avoir trouvé preneur. Même l’appui du parti de Mme El Haité, le MP, était plutôt tiède pour la circonstance. (Lire notre dossier de couverture, pages 10-17). L’occasion était trop belle pour que l’opposition la rate. Après le PAM, qui a jeté la première pierre, comme attendu; l’Istiqlal a enfoncé le clou.
Mme El Haité avait une expression pathétique, face à cette batterie de questionnements. En fait, le lâchage a commencé dès le conseil de gouvernement du 5 juillet 2016, lorsqu’en son absence, c’est Mohamed Hassad, ministre de l’Intérieur, qui a pris la parole sur le sujet, en lieu et place de Abdelkader Amara, le ministre de tutelle de Mme El Haité. Une tutelle gouvernementale qui a été d’un mutisme total depuis le début de cette affaire. Quant à M. Hassad, il a été chargé de conduire une commission d’enquête lors du conseil de gouvernement du 12 juillet 2016. C’est à se demander ce que vient faire un ministre de l’Intérieur dans une question qui touche à l’écosystème. Erreur grossière d’affectation anachronique. Car, on se croirait subitement retombé dans les travers d’une époque où Driss Basri était omniprésent, sur tous les fronts.
Le Maroc est à quelques mois des assises mondiales sur les mutations climatiques et leurs conséquences sur l’environnement naturel et humain; la COP22 qui se tiendra à Marrakech en novembre 2016. Il n’y avait donc pire moment pour provoquer une affaire aussi nauséabonde, dans tous les sens du terme. Sabotage ou sabordage?, au choix.