Les opérateurs touristiques agonisent, en silence. La crise liée au Covid-19 a mis à genoux un secteur vital pour l’économie du pays et les répercussions socio-économiques se font d’ores et déjà sentir. Fouzi Zemrani, Vice-président de la Confédération nationale du tourisme (CNT), appelle les autorités à prendre les devants et assumer leurs responsabilités, en sauvant ce qu’il reste des meubles.
Le tourisme est aujourd’hui à l’agonie. Comment entamez-vous ce mois ? Les professionnels sont-ils prêts pour la reprise ?
Les professionnels naviguent à vue et ne disposent d’aucune visibilité. Plusieurs établissements d’hébergement n’ont pas encore repris leur activité, puisque deux des principaux pôles touristiques du pays, à savoir Marrakech et Tanger, sont toujours en confinement. De même, nous ne savons pas quand est-ce que les frontières devront ouvrir. Une situation qui laisse présager le pire pour un secteur vital pour l’économie du pays et qui fait vivre des millions de familles.
De même, les mesures sanitaires que la situation impose pour reprendre, à savoir la réduction de 50% d’exploitation de capacité pour cause de distanciation, les équipements d’hygiène à mettre en place et les dépistages que doivent subir les salariés pour reprendre le travail, vont alourdir considérablement la facture des hôteliers, sachant qu’aucune rentrée d’argent n’a eu lieu depuis 3 mois et que le carnet de commande est encore vide.
On crie sur tous les toits que le salut viendra du tourisme interne. Croyezvous vraiment que les nationaux sauveront la saison 2020 ?
Je ne pense pas que le marché local, qui représente à peu près 33% des nuitées, sera au rendez-vous cette année. Malgré les efforts de promotion et de réduction des hôtels, la demande n’est toujours pas là. Le pouvoir d’achat des ménages a été impacté par la crise et leurs dépenses seront dirigés vers d’autres postes comme la rentrée scolaire et Aid Al Adha. En outre, les gens ont encore peur d’une éventuelle contamination au Covid-19.
Avez-vous été entendus par le ministère du Tourisme ?
Nous avons transmis nos doléances au ministère de tutelle. Nous avons mis en place un plan de relance qui reprend les principales mesures à même de sauver les meubles et maintenir les emplois. Il nous faut un véritable plan Marshall au vu du risque social que cette crise risque d’engendrer à partir de ce mois. Pour le moment, c’est le silence radio. Nous n’avons pas reçu de réponse et les professionnels ne savent plus à quel saint se vouer.
Quel est le coût de ce plan Marshall ?
Nous avons établi une première estimation pour faire face au manque à gagner durant les premiers mois de la pandémie. Le coût du plan d’action représente les pertes du secteur qui culminent aujourd’hui à plus de 138 milliards de dirhams. Des pertes colossales qui ne seront pas sans répercussions sur le secteur. L’impact socio-économique commence déjà à se faire sentir avec les annonces de plans sociaux et les faillites qui se multiplient.
La saison d’été est-elle d’ores et déjà morte ?
A cause du manque de visibilité et de communication, notamment par rapport à l’ouverture des frontières, nos partenaires, en l’occurrence les compagnies aériennes et les tours opérateurs se dirigent vers les destinations concurrentes notamment dans le bassin méditerranéen. Aujourd’hui, on peut dire effectivement que la saison été est morte. L’année 2020 est à oublier. Maintenant, il faudra mieux se concentrer sur la saison automne, réputée pour une demande orientée davantage MICE (Meetings, Incentives, Conventions and Events).