L'électorat anti-migration en ligne de mire?

La France réduit de 50% les octrois de visas pour les marocains

Paris indique que cette décision a été prise après le refus par les autorités consulaires marocaines de délivrer des laissez-passer nécessaires pour le retour des immigrés refoulés de France. Ce que dément la diplomatie marocaine.

Ne soyez pas surpris de voir votre demande de visa pour la France rejetée même si vous avez respecté toutes les conditions exigées. La donne a changé. Les autorités françaises ont décidé de durcir les conditions d’obtention de ce prestigieux sésame pour les ressortissants du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie. Selon Paris, la raison est simple: ces trois pays refusent de délivrer des laissez-passer consulaires nécessaires au retour des immigrés refoulés de France. Cette information, révélée par la radio Europe 1 dans la matinée du 28 septembre 2021, a été confirmée quelques heures plus tard sur cette même antenne par Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement français.

«C’est une décision drastique, c’est une décision inédite, mais c’est une décision rendue nécessaire par le fait que ces pays n’acceptent pas de reprendre des ressortissants que nous ne souhaitons pas et ne pouvons pas garder en France», déclare-t-il, tout en déplorant leur attitude, qui «freine l’efficacité des reconduites effectives» à la frontière après la délivrance des obligations de quitter le territoire français (OQTF).

Concrètement, Paris a décidé de réduire de 50% les octrois de visas pour les Marocains et Algériens et de 30% pour les Tunisiens, en tenant en compte le nombre de visas octroyés en 2020. Selon lui, cette décision a été prise «il y a quelques semaines» et «va être mise à exécution» pour «pousser les pays concernés à changer de politique et accepter de délivrer ces laissez-passer consulaires». A en croire Europe 1, les autorités consulaires marocaines n’ont délivré que 138 laissez-passer de janvier à juillet 2021 sur 3.301 OQTF émises par la France.

Seulement 80 personnes ont pu être refoulées, soit 2,4% des exécutions d’expulsion. D’après M. Attal, la diplomatie française est passée à la vitesse supérieure après avoir constaté que les dialogues et menaces qui n’ont pas eu l’effet escompté. Il cite, notamment, les visites effectuées par le Premier ministre français Jean Castex et des membres du gouvernement, dont le ministre de l’Intérieur, au Maghreb, de même que des réunions avec leurs ambassadeurs.

Réaction marocaine
Le Maroc n’a pas tardé à réagir à cette décision, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita. «Le Maroc a toujours agi avec responsabilité face à la question de l’immigration clandestine. La décision de la France est injustifiée pour diverses raisons», a-t-il déclaré le 28 septembre à Rabat, lors d’un point de presse animé avec le ministre mauritanien des Affaires étrangères, Ismaël Ould Cheikh Ahmed, en visite de travail dans le Royaume.

M. Bourita déplore ce durcissement, qui, selon lui, va pénaliser les cadres et les malades marocains. D’après le chef de la diplomatie, les consulats marocains en France ne refusent pas d’octroyer des laissez- passer aux clandestins arrêtés sur le sol français puisqu’ils en ont délivré près de 400 ces derniers mois. D’après M. Bourita, le fond du problème, c’est plutôt l’absence des tests PCR des personnes concernées. «La France doit assurer un PCR avant tout embarquement dans l’avion. Or, ces personnes en sont démunies », indique-t-il, non sans préciser que les justifications apportées par les autorités françaises n’étaient «pas appropriées».

Cette annonce française serait loin d’être fortuite. Le timing choisi suscite les interrogations puisque nous sommes à huit mois des élections présidentielles en France. Une période durant laquelle la question de l’émigration constitue l’un des arguments de campagne phares de plusieurs candidats, particulièrement le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen, vaincue par Macron lors du deuxième tour de la présidentielle de 2017 et considérée comme son principal challenger lors du prochain scrutin.

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