DUPLICITÉ QATARIE

Al-Jazeera a invoqué le droit de réserve pour légitimer le licenciement d’Abdessamad Nacir. Mais pourquoi détourne-t-elle les yeux à l’encontre de Hafid Derradji et de Khadija Benguenna?

Dans un autre monde, ce serait le Maroc qui s’apprêterait à accueillir, en 2026, la Coupe du monde de football. Mais ce n’est pas celui dans lequel nous vivons: c’est au ticket constitué par le Canada, les États-Unis et le Mexique qu’en juin 2018 la FIFA, l’instance suprême du ballon rond, avait attribué l’organisation. Le poids politique de Washington, bien mis en avant par le président américain Donald Trump dans un tweet publié quelque deux mois avant le vote final, avait certes joué, mais l’oncle Sam avait aussi pu compter sur le soutien actif de l’Arabie saoudite: c’est ainsi que celle-ci avait voulu faire payer au Royaume d’avoir rechigné à prendre son parti dans la crise qui avait commencé à l’opposer, à partir de juin 2017, avec le Qatar.

Il faut dire aussi que la partie marocaine était allée loin dans la “neutralité constructive” qu’elle avait, dès le départ, choisi d’adopter; elle avait notamment, on se le rappelle, fait envoyer, à titre de “solidarité” et d’“entraide” alors que l’on se trouvait en plein Ramadan, des avions chargés de produits alimentaires à destination de l’émirat du Golfe, et en se rendant directement, en novembre 2017, depuis Abou Dhabi à Doha, le roi Mohammed VI avait même été le premier à briser le blocus mené conjointement avec Bahreïn et les Émirats arabes unis.

De prime abord, on serait tenté de dire qu’il en va de soi du fait des relations qu’entretiennent le Maroc et le Qatar, et on pourrait même mettre en exergue certaines déclarations bien choisies pour dire que de toute façon Doha s’est, en contrepartie, toujours positionnée de notre côté par rapport au “prisme à travers lequel [on] considère [notre] environnement international” -dixit le dernier discours de la Révolution du Roi et du peuple du 20 août 2022-, c’est-à-dire le Sahara marocain. Et ces déclarations ne manquent, il est vrai, pas; en novembre 2020, l’émir Tamim avait, à titre d’exemple, été un des premiers chefs d’État et de gouvernement étrangers à appeler Mohammed VI pour le féliciter de la réussite de l’opération menée par les Forces armées royales (FAR) au niveau de la zone de Guergarate, à la frontière maroco- mauritanienne, pour rétablir la circulation des biens et des personnes, que bloquait alors le mouvement séparatiste sahraoui du Front Polisario. Sauf que, comme on le dirait anglais, ces différents éléments, pour significatifs qu’ils soient, font toutefois “rater une partie de l’histoire”.

L’autre revers, tout au moins important à souligner, c’est la mobilisation continue des canaux médiatiques qataris à l’encontre du Maroc et de ses intérêts, et ce comme vient de l’illustrer le licenciement, le 1er juin 2023, du journaliste marocain Abdessamad Nacir d’Al-Jazeera suite à ses critiques sur les réseaux sociaux envers la machine de “fake news” algérienne. Que la chaîne invoque, comme des sources officieuses l’ont laissé entendre, le droit de réserve auquel sont astreints ses salariés tombe bien évidemment sous le sens, mais pourquoi détourne-t-elle, de l’autre côté, les yeux à l’encontre du commentateur sportif Hafid Derradji alors que ce dernier en était pratiquement arrivé, en septembre 2022, à qualifier les Marocaines et les Marocains dans les termes les plus orduriers? Pourquoi laisse-t-elle sa présentatrice vedette Khadija Benguenna, déverser, sans être inquiétée, tout son fiel anti-marocain, allant jusqu’à lui confier, en mars 2023, une interview toute en complaisance au président algérien Abdelmadjid Tebboune? Est-ce que le fait que M. Derradji et Mme Benguenna soient des ressortissants de la voisine de l’Est les rend-il moins comptables? Et là on ne parle pas d’un incident isolé pour qu’on le mette sur le compte de la simple affaire administrative. La même semaine que M. Nacir se voyait montrer la porte, Al-Jazeera English diffusait sur les réseaux sociaux -le 4 juin 2023- une carte de la pauvreté dans le monde où non seulement le Maroc se voyait tronqué de son Sahara, mais où ce dernier était, littéralement, effacé, comme s’il n’existait même pas.

Et on passera aussi sur les articles régulièrement à charge du journal électronique “Middle East Eye”, qui est actuellement devenu un des principaux organes de propagande du ministère des Affaires étrangères qatari; plus une semaine ne passe, en effet, sans qu’il ne s’attaque au Maroc et à son Roi, sans compter sa promotion du séparatisme sahraoui et de “l’engagement de la diplomatie algérienne en faveur des causes justes” (selon une tribune publiée le 16 janvier 2023 par un soi-disant “spécialiste” des relations entre le Maroc et l’Algérie). Dans son discours de la Révolution du Roi et du peuple dont nous avons fait mention plus haut, Mohammed VI avait mis en cause l’ambiguïté de “certains pays comptant parmi nos partenaires, traditionnels ou nouveaux”. Avec la duplicité qui est la sienne, le Qatar en fait indéniablement partie et se doit de clarifier ses positions.

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