Après l’épisode de Talsint, au début des années 2000, on évite de donner de faux espoirs aux Marocains. Depuis, la rétention de l’information sur les découvertes de gaz, les gisements, les potentiels, les estimations et les retombées est de mise.
Nos responsables parlentils chinois? Dès qu’il s’agit d’une découverte de gaz ou de pétrole au Maroc, c’est le même langage qui ressort: technique, imprécis et ambigu. A telle enseigne que personne ou presque n’y croit vraiment. «Encore une découverte, et après?», entend- on souvent. Lundi 10 janvier 2022, l’Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM), dirigé par Amina Benkhadra, l’ex-ministre de l’Énergie, fait état de «résultats encourageants» de la découverte du gaz naturel au niveau du forage off-shore anchois-2, situé à 38 kilomètres au large de Larache et à 87 kilomètres de la ville de Kénitra. Le communiqué de l’ONHYM a été divulgué quelques minutes après celui de la société britannique Chariot, chargée du forage.
Celle-ci a souligné, dans sa communication, «une découverte importante de gaz» dans la région. «Résultats encourageants », «découverte importante», mais de quoi s’agit-il au juste? En substance, «l’interprétation préliminaire des données confirme la présence d’accumulations importantes de gaz dans les objectifs d’évaluation et d’exploration du puits Anchois-2, avec une valeur nette calculée de gaz totalisant plus de 100 m, comparativement à 55 m dans le puits de découverte Anchois-1 original », retient-t-on. Mais, c’est trop technique et cela ne veut rien dire pour les non-spécialistes et les citoyens lambda.
Deux sites ont été sondés. Ils recèlent un grand potentiel de gaz. De combien? Pour combien de temps? Quel impact sur le coût de l’énergie produite à base de gaz? Personne ne le sait. Et pourtant, en 2019, la même société britannique a laissé entendre que le premier site sondé renferme une réserve de gaz récupérable qui avoisine les 2.000 milliards de pieds cubes. D’aucuns avancent qu’il faudra du temps pour tout savoir mais pas pour le faire savoir.
Les annonces de ce type sont faites avec prudence et parcimonie. L’épisode de Talsint, au début des années 2000, du nom d’un projet marocain dont les réserves avaient été très largement surestimées –une découverte de 100 milliards de barils avait été annoncée, finalement ramenée à 1 milliard de barils, et qui s’est révélée, selon la version officielle, non exploitable. On évite de donner de faux espoirs aux Marocains. Admettons! Mais depuis, la rétention d’information sur les découvertes, les gisements, les potentiels, les estimations et les retombées est de mise. Sans l’aval des hautes sphères du pays, ni le Chef du gouvernement, ni le ministre de l’Énergie ou la patronne de l’ONHYM ne peuvent se prononcer sur ce sujet.
Le gisement de Tendrara, dans la province de Figuig, est un exemple de ce silence troublant qui entoure les projets de découvertes d’hydrocarbures au Maroc. Ce n’est qu’après l’arrêt de l’approvisionnement du Maroc par l’Algérie en gaz naturel via le gazoduc Maghreb-Europe, le 31 octobre 2021, que l’information a été rendue publique: une convention signée entre la société britannique Sound Energy pour fournir la production issue du bassin de Tendrara à l’ONEE, pour alimenter les centrales thermiques de Tahaddart et de Aïn Béni Mathar, et à Afriquia Gaz, pour approvisionner les industriels marocains. A quel prix ce gaz a été vendu à l’ONEE? Les réserves de Tendrara dépassent-elles la quantité achetée par l’Office sur une durée de dix ans? C’est le black-out total.
Le contribuable marocain est en droit d’être informé. C’est un droit garanti par la Constitution de 2011, la loi suprême. Ce n’est pas normal de continuer à cacher l’information sous couvert du qualificatif «stratégique». Le Maroc ne va pas tout de même produire une bombe nucléaire!
Au final, ce qui intéresse tout Marocain, ce sont les retombées de ces découvertes sur son budget qui se réduit comme une peau de chagrin eu égard notamment à l’inflation des prix que le gouvernement Akhannouch ne veut même pas reconnaître.