L’ouverture de la cop22 met le cap sur le problème du financement
Selon une analyse détaillée du climat mondial de 2011 à 2015, le quinquennat le plus chaud jamais enregistré dans l’histoire de l’humanité, livrée par l’Organisation météorologique mondiale (OMM), une organisation onusienne, mardi 8 novembre 2016 au lendemain de l’ouverture de la COP22 à Marrakech, le lien entre les phénomènes météorologiques extrêmes et le réchauffement de la planète paraît de plus en plus étroit.
Il en ressort que l’année 2015 a été la plus chaude jamais enregistrée et l’année 2016 risque de lui voler la vedette. Les conséquences sont souvent tragiques: ainsi, la sécheresse qui a sévi en Afrique de l’Est de 2010 à 2011 a causé plus de 250.000 décès. L’Afrique est donc la région qui subit le plus les conséquences fâcheuses de ce bouleversement climatique. L’accord de Paris, signé lors de la COP21 et ratifié le 4 novembre 2016, vise à contenir la hausse de la température planétaire nettement en dessous de 2° par rapport à l’ère préindustrielle. Or, comme le rappelle l’OMM: en 2015 le seuil de hausse de 1°C a déjà été atteint.
C’est ce constat alarmant qui a incité représentants des États, des médias, du secteur privé et de la société civile à se donner rendez- vous à Marrakech, du 7 au 18 novembre 2016, pour la 22ème conférence des Nations unies sur le climat qui se déroule presque un an après la signature de l’Accord de Paris. Présidente de la COP21, Ségolène Royal, ministre française de l’Environnement, a lancé, à l’ouverture officielle de la Conférence lundi 7 novembre, un appel aux retardataires: les 96 pays qui n’ont pas encore ratifié l’Accord de Paris.
Inventer le monde de demain
En passant le témoin de la présidence de la COP au Maroc, aux mains de Salaheddine Mezouar, ministre des Affaires étrangères et président du comité d’organisation de la COP22, Ségolène Royal a donné le ton à cette COP organisée en terre africaine. «Sur près de 50 pays meurtris par les effets climatiques, 36 se situent en Afrique subsaharienne», dont la population va doubler d’ici 2050 pour atteindre 2 milliards d’habitants. «Les Africains sont ceux qui sont le plus mobilisés, le plus créatifs, et ils sont en train d’inventer le monde de demain, notamment avec le plan de 50% des énergies renouvelables à l’horizon 2030», a-t-elle souligné.
La ministre française faisait allusion au Plan marocain qui ambitionne à l’horizon 2030 de produire plus de 50% de ses besoins en énergie à partir d’énergies renouvelables. Si le Maroc a déjà pris de l’avance dans ce sens, la prise de conscience dans le reste du continent s’est à peine installée. D’où l’intérêt de mettre l’Afrique au centre de la COP22, un continent qui subit en grande partie les effets des changements climatiques dont les pays industrialisés du nord en sont les principaux responsables.
Après la ratification de l’accord de Paris, l’intérêt de la COP22 réside dans la discussion et l’entérinement des modalités de financement des projets d’adaptation notamment en terre africaine et le renforcement des capacités dans ces pays pour pouvoir mener à bien ces projets et surtout être éligibles pour les bailleurs de fonds qui octroient des financements Climat. On ne parle plus d’atténuation des effets du gaz à effet de serre. On parle désormais d’adaptation aux changements climatiques, restée longtemps dans l’ombre de l’atténuation des émissions des gaz à effet de serre (GES). Ce qui suppose que les projets futurs doivent s’intéresser plus à l’agriculture, à la gestion de l’eau...
La Conférence de l’espoir
Et dans ces domaines, notamment l’agriculture et la gestion de l’eau, les dégâts constatés en terre d’Afrique sont plus alarmants. Le lien étroit qui existe entre sécurité alimentaire et changements climatiques permet de se tourner enfin vers le continent africain. Et c’est l’heure de l’action. Jamais une conférence des Nations unies sur le climat n’a suscité autant d’espoir que celle de Marrakech. Tous ses invités officiels plaident pour le passage aux actions concrètes pour faire face à la menace des changements climatiques. Tout le monde a mis le cap sur le financement des projets d’adaptation aux changements climatiques notamment en Afrique qui en subit les effets néfastes sans en assumer la responsabilité. «Une injustice écologique», comme la qualifie Ségolène Royal, qui a demandé de rendre justice à l’Afrique à l’occasion de la COP22.
Du concret, il y en a. Plusieurs institutions ont quantifié leurs engagements. La Banque mondiale, par exemple, travaille en collaboration avec l’International Finance Corporation pour lever 16 milliards de dollars pour l’énergie solaire, l’hydroélectricité, et les projets d’énergie géothermique à travers le continent africain. De même, d’autres institutions se bousculent au portillon pour soutenir l’investissement en faveur du climat. Il s’agit, entre autres, de la Banque européenne d’investissement( BEI), qui prévoit de fournir au total 100 milliards de dollars pour les investissements liés au climat dans le monde au cours des cinq prochaines années.
A ce jour, l’Afrique ne profitait que de 4% des financements climat. Insignifiant! Paradoxalement, le même taux représente la part du continent dans les émissions mondiales de gaz à effet de serre. D’autant plus que les conditions d’éligibilité sont draconiennes. Sans compter que le déficit en capacités des ressources humaines africaines compromet grandement l’éligibilité des projets de beaucoup de pays africains. Au Maroc, le partenariat public-privé, qui a déjà fait ses preuves, est appelé à être relancé et soutenu davantage. Le secteur privé et les banques locales se sont déjà investis dans le financement climat. Un investissement à renforcer pour faire naître des projets importants à l’instar de la station Noor de Ouarzazate.
Financements insignifiants
La question de l’aide aux pays en voie de développement accapare donc les discussions et les négociations entre délégués et experts de 196 pays. Sur les 100 milliards de dollars promis chaque année d’ici 2020, 67 milliards ont déjà été annoncés par les différents acteurs (Etats, banques multilatérales...), selon l’OCDE. Mais ce n’est pas suffisant. L’Afrique accueille la 22e conférence avec l’espoir de relancer le financement des projets de développement durable, notamment par rapport à la réduction des impacts des changements climatiques. Après l’état des lieux soulevé à Paris, Marrakech donnera la priorité aux actions concrètes visant l’investissement financier en faveur du climat.
Une cinquantaine de chefs d’Etats, dont 26 présidents africains, se déplaceront le 15 novembre à Marrakech, sur invitation de S.M. le Roi Mohammed VI. De ce sommet des décisions importantes seront annoncées