Coopération économique Maroc-Israël: L’agriculture, un terreau fertile

Spécialisé dans les technologies et les innovations agricoles, Israël apparait, pour le Maroc, comme un partenaire privilégié pour développer son système agricole et s’imposer sur le marché mondial.

En rétablissant ses relations avec Israël le 10 décembre 2020, le Maroc s’ouvre à un partenariat aux multiples opportunités. L’agriculture, secteur très stratégique du Royaume, constitue un terreau fertile pour semer les premières graines de cette nouvelle entente. Le groupe israélien Mehadrin, principal exportateur agricole du pays, l’a si bien compris en s’associant avec une entreprise marocaine pour cultiver et exporter des avocats, selon l’article publié, fin avril 2021, sur le site israélien Globes, spécialisé dans l’actualité économique. «Mehadrin a décidé d’étendre son activité de culture d’avocat à l’étranger. Il a signé un accord au Maroc, en vertu duquel il cultivera pour la première fois des cultures hors d’Israël», précise-t-il.

Un pays de croissance
Des cultures prévues sur une superficie globale de plus de 455 hectares qui seront loués. D’après les médias israéliens, l’investissement initial pour ce projet sera de 80 millions de dirhams durant les trois premières années. Les partenaires de cette première joint-venture maroco-israélienne tablent sur un rendement de 10.000 tonnes d’avocat qui seront principalement exportées sur le marché européen. Le reste sera écoulé au Maroc. Cette activité pourrait représenter un quart de la production d’avocat de Mehadrin, selon son PDG, Shaul Shelach, cité par la même source. «Le Maroc est un pays avec de bonnes conditions de croissance, avec des coûts bien inférieurs à ceux d’Israël, et il est un peu plus proche de nos principaux marchés en Europe», explique-t-il.

Innovation agricole
Cet investissement agricole est loin d’être une première sur le sol marocain. Malgré la rupture diplomatique officialisée en 2000, le Maroc et Israël entretenaient des relations économiques et technologiques, à l’abri des caméras. L’exemple le plus patent, c’est sans nul doute celui de l’entreprise israélienne Netafim Morocco, un des leaders mondiaux des solutions de gestion de l’eau dans l’agriculture, qui est implantée à Rabat depuis avril 2017, et qui dispose d’un bureau de représentation à Casablanca. Ce groupe, créé en 1965 par l’ingénieur en gestion de l’eau Simcha Blass, a été racheté pour 1,5 milliard de dollars en février 2018 par le groupe mexicain Mexichem, spécialisé dans les produits pétrochimiques. Sa spécialité: l’irrigation via le système du goutte-àgoutte. «L’ouverture de la nouvelle filiale (au Maroc) fait partie de la croissance du marché et de notre volonté d’améliorer la qualité de notre service et de notre assistance à nos clients et partenaires au Maroc», avait déclaré fin en août 2017, Shavit Dahan, directeur de Netafim pour l’Afrique du Nord et de l’Ouest, sur le site officiel de la Chambre de commerce franco- israélienne.

Sur son site web, l’entreprise annonce sa présence dans huit villes marocaines, en l’occurrence Rabat, Berkane, Casablanca, Kenitra, Agadir, El Jadida, Meknès, et Marrakech. La technique du goutte-à-goutte constitue d’ailleurs l’ADN de l’agriculture israélienne. Une alternative au système d’irrigation naturelle, qui y est bannie depuis cinquante ans. Epaulés par des agronomes, ces agriculteurs irriguent leurs cultures via cette méthode qui permet non seulement d’économiser l’eau, mais aussi d’augmenter la qualité de la récolte et la productivité.

D’ailleurs, d’après certains agriculteurs, l’irrigation goutteà- goutte permet de cultiver les fruits et légumes plusieurs fois dans l’année, en cas de sécheresse. Un benchmark intéressant pour le Royaume, notamment dans le développement de l’ambitieux Plan Maroc Vert. Hammou Bensaadout, directeur général de l’eau au ministère de l’Équipement avait signé, le 22 décembre 2020, un mémorandum d’entente sur l’innovation et le développement des ressources en eau avec Yechezkel Lifshitz, directeur général du ministère des Ressources en eau israélien, lors de la visite d’une délégation américano-israélienne au Maroc.

Autre niche à exploiter, le secteur de la technologie alimentaire, plus connu sous l’anglicisme «Food Tech». Un domaine dans lequel l’Etat hébreu se distingue, avec pas moins de 500 entreprises qui s’activement dans l’innovation alimentaire, notamment des startups.

Potentiels investisseurs
De potentiels investisseurs sur un marché marocain qui foisonne d’opportunités. C’est probablement ce qu’a compris l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX), qui a noué un partenariat, le 1er avril 2021, avec l’European Kosher pour la mise en oeuvre d’une stratégie de labellisation des cashers marocains. Le Maroc, qui devrait légaliser sous peu le cannabis à usage médical et thérapeutique, dispose d’un partenaire de choix pour la culture et l’exploitation de cette plante.

Ce pays, qui l’a autorisé depuis l’an 2000, compte une dizaine d’exploitations agricoles qui produisent et alimentent cinq usines de transformation. Un produit très consommé en interne avec 60.000 personnes qui l’utilisent chaque année, soit environ 25 tonnes par an. Après avoir conquis le marché local, les exportateurs déploient leurs ailes sur l’international, particulièrement en Europe et au Canada, via une licence d’exportation mise à leur disposition par le ministère de la Santé. Objectif: faire d’Israël un leader mondial sur ce marché de l’or vert, qui devrait peser 57 milliards de dollars d’ici 2026.

La participation d’une délégation marocaine au salon de l’Agriculture «Agromashov 2021» à Tel-Aviv les 14 et 15 juin 2021, composée de plusieurs professionnels du secteur, notamment Adil Simo Abdu, le plus grand producteur et exportateur d’avocat du Maroc, est un intérêt manifeste pour l’établissement de liens de coopération entre les deux pays dans ce domaine. Les thématiques de cette édition étaient axées sur les technologies et innovations agricoles? Bref, l’agriculture du futur.

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