Les conseillers veulent récupérer la cotisation de l'etat dans leur caisse de retraite

La rente résiste bien

Dans les deux chambres du Parlement, les élus se sont longtemps cramponnés à cette forme de rente qui n’a que trop duré. Sauf qu’au moment où leur pension de retraite vit ses derniers jours, les conseillers veulent rafler toute la mise: leurs cotisations et celles de l’Etat.

Adoptée par la Chambre des représentants le 21 décembre 2020, la proposition de loi visant la liquidation du régime de retraite fait le consensus à la Chambre des conseillers. C’est l’information tronquée qui a circulé. Jusqu’au 5 janvier 2021, date qui a marqué la suspension du vote à la suite des critiques acerbes sur les réseaux sociaux de citoyens qui dénoncent un détournement de l’argent du contribuable et la révélation au grand jour des non-dits qui ont justifié le report du vote.

En réalité, contrairement à la Chambre des représentants, où le consensus était autour de la restitution de 70% des cotisations des parlementaires dans leur caisse après sa liquidation, les conseillers, eux, ont été plus malins. Ils se sont mis d’accord, en catimini, sur une proposition de loi qui consiste à se partager l’intégralité des fonds injectés dans leur caisse de retraite y compris la part de l’Etat.

Au sein de la deuxième chambre, légion sont les voix qui se sont élevées pour réclamer la préservation des droits des cotisants. Mais de quels droits parle-t-on? Les droits à une rente dont ils ont profité des décennies durant! Pourtant, personne n’avait évoqué un jour le droit du contribuable, qui voit son argent profiter à nombre de «représentants de partis» au faible rendement et que seuls les intérêts personnels et ceux des ténors de leur parti animent.

Statut social
S’ils réclament leur dû et la part étatique, c’est parce que les conseillers savent pertinemment que contrairement à la caisse de retraite de la première chambre, leur caisse n’a pas encore enregistré un déficit et peut fonctionner encore pendant quelques années. Mais cela renseigne sur un état d’esprit rentier qui n’est pas prêt à disparaître pour de bon. La résistance à la suppression d’un avantage indu finira par se diluer.

Tôt ou tard. C’était le cas à la première chambre où même le président a défendu cette pension bec et ongles jusqu’à la dernière minute. Après les propos provocateurs de Driss El Azami, membre du groupe parlementaire du Parti de la Justice et du Développement (PJD) et maire de Fès, lundi 12 octobre 2020, lors d’une séance parlementaire de la commission des Finances et du développement économique, qui avait déclaré que les parlementaires ne peuvent travailler «Biliqui» (gratis) et qu’il va falloir préserver leur niveau de vie même après la fin de leur mandat, le lapsus de l’usfpéiste Habib El Malki, président de la Chambre des représentants, lors d’un échange avec le présentateur de l’émission Bila Hodoud de la chaîne TV qatarie Al Jazeera, a été révélateur quand il a déclaré: «Je défends le présent et le futur du parlementaire. Nous devons lui garantir toutes les conditions pour préserver son statut social symbolique.

Je ne pense pas que la demande de la réforme de cet écosystème de la pension des parlementaires soit une priorité pour le peuple marocain (…) Et puis, la conjoncture actuelle liée à la pandémie de Covid-19 ne se prête pas à une telle réforme parce ce que cette pandémie a eu des répercussions financières fâcheuses sur une large frange de la population et dans ce contexte, la situation financière du parlementaire doit rester intacte».

Difficile de laisser filer entre les doigts une «vache à lait». Dans les deux chambres du Parlement, les élus se sont longtemps cramponnés à cette forme de rente qui n’a que trop duré. Sauf qu’au moment où la pension de retraite vit ses derniers jours, les conseillers veulent rafler toute la mise: leurs cotisations et celles de l’Etat ou plutôt du contribuable.

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