Comment j’ai vécu le séisme du 8 septembre : Le jour d’après

De longues, très longues journées et semaines nous attendent pour mener à bien la mission «Agir pour reconstruire», le lancement du projet pilote
d’accompagnement au développement de trois villages dans le nord, et les actions liées autour de «Folles Sagesses” et du spectacle «The Wild Man Show».

Vendredi 8 septembre 2023, 21h30. Je suis avec ma fille Lila; nous sommes chez moi. Elle fait ses bracelets pour accompagner certains exemplaires de «Folles Sagesses”, je prépare la semaine à venir avec les rencontres-signatures, les actions à initier pour le projet Pilote Nord de l’Académie rurale d’excellence by Amal Biladi,... Bref, une soirée comme toutes les autres depuis quatre mois. Lila vient me voir en disant apeurée: papa, tu as senti le sol? Effectivement, le sol tremblotait depuis quelques minutes, et une petite boîte tombe par terre.
Je vais sur internet et me rends compte de quelque chose d’effroyable qui a touché les environs de Marrakech, ne prenant pas encore conscience de ce qui se passe. J’appelle Kawthar Bouachrine, notre ange communication et support médias qui habite Marrakech, et j’arrive à l’avoir. Elle me dit que tout le monde est dehors; je ne réalise pas, me dit qu’ils exagèrent, qu’il s’agissait juste d’une petite secousse. Ma fille angoissée appelle sa maman et n’arrive pas à la joindre. Elle pleure en silence et je commence à sentir une boule dans l’estomac, prenant petit à petit conscience de l’ampleur de la secousse.

Je m’endors peu rassuré, Lila n’est pas tranquille, et je m’en veux de ne pas avoir été aussi prévenant que je l’aurais pu. Samedi matin, je commence à apprendre les nouvelles, le nombre de morts par milliers, le nombre de douars impactés et les décès dans mon entourage. Bousselham, notre frérami de la famille qui vit avec nous depuis plus de 40 ans a perdu sept membres de sa famille, et il était sur place. Les larmes montent, et je me remémore les émotions que j’ai ressenti quand j’étais à Anfgou 11 ans plus tôt. Je me sens désemparé, désarmé, et prie pour être en mesure de pouvoir agir, sans précipitation, avec sagesse et raison.

Le lendemain matin, après ma prière d’al-Fajr, je vais au sport, très tôt, et même chose, je demande à pouvoir être utile.
En rentrant chez moi, c’est la profusion de messages et d’appels: le Canada, la France, la Belgique, les USA, la Suède et le Maroc bien évidemment: ma famille, mes amis, des Marocains qui aiment leur pays et veulent faire quelque chose.


J’appelle Elhachmi, notre secrétaire général, et on commence à contacter les autorités sur place pour savoir quels sont les dégâts. Nous décidons de nous orienter sur les provinces de Chichaoua et Taroudant, la majorité des aides ayant afflué vers la province d’Al-Haouz.

Nous prenons acte de l’orientation et axons notre humble contribution sur quatre axes :
- Distribution des dons provenant d’Ottawa et de Toulouse sur les cinq villages que nous avons présélectionnés suite à plusieurs échanges avec les autorités, des personnes sur place, des associations, et notre intuition.
- Mise en place d’une action de soutien psychologique pour les enfants et parents des villages concernés, en trois étapes: soutien de psychologues confirmés avec une forte appétence pour les thérapies alternatives (hypnothérapeuthe, méditations, respirations,...), mise en place d’une cellule de prévention au suicide avec un partenaire expert et sollicitation d’une équipe internationale de l’Art de vivre qui s’est spécialisée dans les soutiens aux victimes de séisme, de guerres, d’inondations,...
-Formation à la construction de nouala, avec le concept inventé par Ellie Moyal, un des meilleurs architectes utilisant la terre dans ses constructions, qui a conçu en quelques heures un modèle d’habitation provisoire de 15m2 à 75m2 pour permettre l’arrivée de l’hiver, à condition que les habitants construisent eux-même les nouala.
- Préparation d’une équipe d’entrepreneurs et d’experts pour travailler ensemble sur un modèle de reconstruction d’un douar pour 90 foyers, AVEC les habitants, et en s’imbriquant sur les actions initiées par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, puisse Allah le glorifier.
Depuis plus de quinze jours, nous sommes sur le terrain pour préparer avec autant d’efficacité que possible notre modeste contribution pour cinq villages impactés par ce séisme :
- Rencontre avec le directeur des associations du secrétariat général du gouvernement pour se renseigner sur les différentes possiblités d’appels aux dons, pour le projet «Agir pour reconstruire» et le projet Pilote Nord.
- Rencontre avec le secrétaire général du ministère de l’Aménagement du territoire et la cheffe de division de l’aménagement pour voir comment nous greffer sur les cartographies et actions initiées par ce ministère stratégique et leur permettre d’avoir un cas «réel» sur lequel benchmarker.
- Rencontre avec l’Entraide nationale et me ministère du Commerce et de l’Industrie pour nous assurer des procédures à suivre et pouvoir faire entrer sur le territoire marocains les dons que nous allons recevoir.
- Rencontre avec le président du conseil de l’eau, ministère de l’Equipement et de l’Eau, pour lui présenter le concept de notre partenaire Agua de Sol, qui est une solution permettant de résoudre plusieurs soucis dans les villages, à fortiori ceux impactés par le séisme, dont les habitants auront des difficultés à s’approvisionner en eau.
Et puis je suis parti en éclaireur, pour quatres jours, en visite dans les provinces d’Al-Haouz, cercle d’Amezmiz, Chichaoua et Taroudant avec plusieurs décisions pleine de sens hamdoulillah, et de l’espoir pour les cinq villages où nous allons agir.
J’ai pu visiter cinq villages dont trois totalement détruits, et un qui a perdu quarante-huit des siens. J’ai eu la chance d’avoir des moments privilégiés avec les autorités des provinces, et même une longue rencontre avec le wali de la région d’Agadir)Souss-Massa, à qui j’ai pu exposer notre longue expérience dans le développement rural, l’équipe d’Amal Biladi et les experts consultants partenaires de l’Académie rurale d’excellence.
Je suis rentré lundi en fin d’après-midi pour enchaîner sur une conférence autour de l’éco-tourisme organisée par le CRT de Casablanca, après avoir été invité par M. Othmane Cherif Alami, et finir par un meeting visio avec Zaineb Lazrek,  la nouvelle présidente du Centre des jeunes dirigeants Maroc et son bureau, que je retrouve avec beaucoup de bonheur.
J’ai pu discuter avec une équipe incroyable de l’antenne de la Fondation Mohamed V de la solidarité qui est prête à nous faciliter les actions de distribution des dons provenant de l’étranger et de soutien psychologique et m’a conseillé sur la démarche à suivre pour initier une collaboration plus étroite sur nos actions d’accompagnement au développement de villages en zones rurales et montagneuses
De longues, très longues journées et semaines nous attendent pour mener à bien la mission «Agir pour reconstruire», le lancement du projet pilote d’accompagnement au développement de trois villages dans le nord, et les actions liées autour de «Folles Sagesses” et du spectacle «The Wild Man Show», qui permettent de contribuer aux deux actions.

Je tiens à exprimer mes sincères remerciements et ma gratitude à mon équipe: notre secrétaire Général Elhachmi Choukri, qui est une clé extraordinaire pour ouvrir des portes nécessaires et identifier les personnes idoines. Je suis fier que notre trésorière Zineb Oukacha soit aussi experte dans le volet organisationnel et la remercie pour sa patience et sa sollicitude devant mon hyper activité. Et je remercie également le vice-président en développement durable, Salah Eddine Benmamous, qui nous permet d’entrevoir l’avenir de ces villages avec espoir. Et bien évidemment, je salue toutes les merveilleuses aides d’ombres du Maroc et de l’étranger qui nous soutiennent et donnent l’énergie pour supporter l’insupportable.
Amal Biladi remercie ses partenaires et notamment Reda Jabri et les assurances Lyazidi pour avoir permis un voyage en sécurité pour ces quatre jours.

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