
L’ouverture assumée
MONNAIE. Pour des analystes, les conditions semblent réunies pour adopter un régime de flexibilité du dirham.
La flexibilité du taux de change du dirham va-telle renforcer ou fragiliser l’économie marocaine? Voilà une question qui taraude plus d’un opérateur économique national, à un moment où les responsables de la politique monétaire semblent opter pour le remplacement du régime de taux de change fixe du dirham en un système plus flexible. Une décision majeure confirmée par Abdellatif Jouahri, gouverneur de Bank Al-Maghrib, à l’issue du Conseil de l’Institut d’émission le 24 mars 2015, à Rabat.
Puisque le Royaume est suffisamment avancé sur la voie de la libéralisation et de l’ouverture, certains observateurs pensent que c’est le moment où jamais pour s’ouvrir davantage. Les conditions préalables au changement du régime de change dans le sens de plus de souplesse sont aujourd’hui plus qu’hier, réunies, disent-ils. Selon Jean-Pierre Chauffour, économiste principal de la Banque mondiale pour le Maroc, «la réduction actuelle des déficits budgétaires et de la balance courante et les perspectives de réductions supplémentaires de ces déficits en 2015 et à moyen terme créent à nouveau les conditions d’une libéralisation possible du régime de change».
En effet, dit-il, les réserves de changes ont été reconstituées, le pays a conservé un accès favorable aux marchés financiers et les banques marocaines ont continué à renforcer leurs fonds propres et leur gestion des risques de change. Ajoutons à cela la baisse de l’euro, combinée au choc positif sur la balance des paiements de la chute des cours du pétrole, qui renforce actuellement ces conditions favorables.
Paiement par anticipation
En plus, du fait que le nouveau statut de Bank Al-Maghrib lui donne carte blanche pour utiliser les devises dans un objectif de défense et de préservation de la valeur du dirham dans le cadre d’un régime de change flexible, la libéralisation de la réglementation de change s’est déjà faite, bien qu’à petites doses. Plusieurs mesures prises dans ce sens le confirment.
À commencer par la fin des comptes convertibles à terme, suivie de la mise en place de deux régimes pour le paiement par anticipation des importations. Le premier, dit général, s’appliquera à toutes les entreprises et sera plafonné à 200.000 dirhams. Le second est destiné aux opérateurs catégorisés par l’administration des douanes et sera plafonné à 1 million de dirhams.
Une troisième mesure concerne les hommes d’affaires qui souhaitent investir à l’étranger et transférer les fonds nécessaires: ils ne seront plus, désormais, soumis à la condition d’ancienneté de trois ans. La quatrième mesure concerne la libéralisation complète des opérations liées aux voyages professionnels.
Quant aux dotations touristiques, elles sont plafonnées à 150.000 dirhams par an et par personne. L’acquisition d’appartements à l’étranger sera, désormais, autorisée pour les besoins de voyages des hommes d’affaires, scolarité des enfants ou soins médicaux. Enfin, les frais des filiales des multinationales seront librement transférables, sous conditions. A charge pour les banques d’en faire le reporting à l’Office des changes.