BÂTIR DES PONTS, PAS DES MURS

MUSTAPHA SEHIMI

PACTE MONDIAL POURLA MIGRATION


Le Forum mondial sur la migration, qui se tient à Marrakech, verra la participation de plus de 180 pays ainsi que celle du Secrétaire général de l’ONU.

Les 10 et 11 décembre 2018, à Marrakech, se tiendra la conférence internationale devant adopter le Pacte sur la migration. Cet agenda sera précédé, quelques jours auparavant, par le Forum mondial sur la migration dont les premiers co-présidents sont le Maroc et l’Allemagne en la personne de S.M. Mohammed VI et la chancelière Angela Merkel. Ce forum a adopté comme slogan «Vers un contrat social mondial sur la migration et le développement. » Le Maroc et l’Allemagne sont les premiers pays à assurer, pour 2017 et 2018, la coprésidence de ce Forum –une illustration d’un pont symbolique sur la Méditerranée ainsi qu’entre l’Europe et l’Afrique.

Le Maroc n’est pas que l’hôte de cette conférence qui verra la participation de plus de 180 pays ainsi que celle du Secrétaire général de l’ONU et d’autres responsables d’institutions internationales et régionales. Ces dernières années, en effet, le Royaume s’est activement engagé dans la gouvernance de la migration et ce à travers plusieurs dynamiques internationales comme nationales. Le Roi a été ainsi désigné, voici près de deux ans, comme «leader de l’Union Africaine pour la Migration.» En mai 2018, il a proposé la création d’un Observatoire Africain des Migrations qui a été adopté par l’UA. Au plan interne, cela fait cinq ans au moins que le Maroc s’est activement engagé dans une politique migratoire saluée par la communauté internationale: réforme législative de la politique d’asile et d’immigration; campagne de régularisation de près de 50.000 migrants en 2014 et 2017.

Le Pacte, qui doit être signé le 10 décembre –jour anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948–, marque un fait historique. C’est en effet le tout premier document de l’ONU traitant de la question de la migration dans toutes ses dimensions et cet instrument international portera le nom de Pacte Global de Marrakech. Son élaboration a été difficile mais elle a fini par finaliser et acter la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants adoptée par l’ONU en décembre 2016. Les mécanismes multilatéraux ont fait montre de leur capacité à apporter des réponses consensuelles à une problématique migratoire complexe et épineuse. Ce Pacte est consensuel mais aussi équilibré, éligible à une perspective réaliste, prenant en compte finalement les intérêts de tous. Il appelle à transformer la gouvernance mondiale des migrations; il érige aussi la responsabilité partagée en principe fondamental; enfin, il respecte la souveraineté des États en même temps qu’il renforce leur coopération.

Mais il y a plus. La Conférence de Marrakech est aussi un appel à l’action parce qu’elle doit délivrer ses promesses et ce en traduisant la cinquantaine d’articles qui l’articulent en politiques nationales ainsi qu’en mesures d’application concrètes. L’Afrique en particulier doit être à cet égard un moteur de l’architecture de la mise en oeuvre du Pacte. Une lecture commune de la migration doit être développée; elle doit en faire un levier de co-développement. Un pilier de la coopération Sud-Sud. Et un vecteur de solidarité.

Dans cette perspective, l’accent doit être mis sur la limite d’une certaine approche sécuritaire pesant sur la gestion des flux migratoires; et tout doit être fait en contrepartie pour la mise en oeuvre des dispositions du Pacte mondial en matière de formation et de valorisation des capacités humaines, d’assistance technique et de réduction des déséquilibres économiques. En somme, une nouvelle gouvernance continentale et régionale axée sur le capital humain et le développement économique. Bâtir des ponts donc, pas des murs!.

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