Arrêtez ces souffrances: Le cri de détresse contre le Mariage des mineures

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Du siège du Musée de la femme Henriette Bathily, sis Place du Souvenir à Dakar, un groupe de filles mineures de divers horizons ont choisi de lancer un cri de détresse et relater leur parcours conjugal émaillé de souffrances mais également d’espoir suite à un mariage précoce et forcé.

Il s’agit, en fait, de témoignages via des récits inédits de jeunes filles originaires de différents pays mais ayant vécu les mêmes conditions de misère et de souffrances provoquées par le mariage précoce, avec pour objectif de mettre à nu ces pratiques et de mettre fin au mariage des enfants mineurs qui est un problème mondial.

C’est le cas de Rahmatou du Bénin, Jennifer (Ouganda), Zalia (Pakistan), Mina (Bangal), Maruf (Ethiopie), Marguerite (Tanzanie), Aichatou (Gambie), Laksmi (Inde) ainsi que d’autres filles qui avaient subi les mêmes souffrances.

Toutes ces jeunes filles n’ont pas fait le voyage à Dakar pour assister au vernissage de l’exposition intitulée "Paroles de filles: ensemble contre le mariage des enfants", mais leur participation, à travers une trentaine de photos, met en évidence l’ampleur grandissante du mouvement mondial en faveur de l’abolition du mariage d’enfants.

Sur ces images s’affichent des témoignages poignants livrés par ces filles sur les souffrances endurées suite à un mariage à l’âge mineur.

Organisée du 14 juin au 10 juillet par l’ambassade du Canada, l’exposition témoigne aussi de la façon dont les gouvernements, les institutions multilatérales et régionales, les organisations de la société civile, les communautés et les filles elles-mêmes travaillent en partenariat dans la perspective de mettre fin à cette pratique.

L’exposition, qui entre dans le cadre de l’appui du gouvernement canadien pour mettre fin aux mariages précoces et forcés des enfants, est initiée en partenariat avec l’organisation "Filles, pas épouses".

Selon, le rapport 2015 du Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF), le nombre des mariages des filles mineures s’élève à 27 pc au niveau mondial, 40 pc en Afrique sub-saharienne, 45 pc en Asie du sud et 18 pc dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord).

Pour Mme Ruth Koshal, responsable du département Afrique à l’Organisation «Filles, pas épouses », l’objectif de cette exposition consiste à présenter au public des récits inédits de jeunes filles et à mettre en exergue la relation entre le mariage des enfants, la pauvreté, la scolarité, la santé reproductive, les pratiques culturelles et les législations traditionnelles.

Les visiteurs peuvent surtout admirer la photo de la jeune ougandaise Jennifer qui affirme dans un commentaire qu’elle allait entreprendre sa dernière année d’école primaire quand elle a perdu son père. "Je n’avais pas l’argent nécessaire pour retourner à l’école, dit-elle, j’ai donc cru que le mariage était la solution".

Le mari de Jennifer travaille en ville et lui envoie 2 dollars toutes les deux semaines, un montant insuffisant pour combler ses besoins et ceux de son enfant. "Ce serait bien si je pouvais suivre une formation et gagner de l’argent. Je n’ai pas pu terminer mon école primaire, donc il n’y a pas grand-chose que je puisse faire comme travail", dit-elle.

C’est aussi le cas de Zalia du Pakistan qui a vu sa vie bouleversée à l’âge de 14 ans, lorsque des inondations ont forcé sa famille à se réfugier dans un camp pour personnes déplacées. «Un jour, une femme est venue la voir, lui a donné de l’argent et des vêtements puis lui a dit: tu es ma fille maintenant. Zalia était sous le choc, son père et ses frères avaient décidé de la marier », souligne-t-elle dans un commentaire.

Aujourd’hui mère d’un garçon, Zalia prie pour ne jamais donner naissance à une fille, car, affirme-t-elle, «je ne souhaite à aucune fille de subir le même sort que moi ».

Relevant que le mariage des mineures constitue une entrave sérieuse au développement de l’Afrique et à sa croissance économique, Mme Ruth a fait observer que ces pratiques privent des millions de jeunes filles du continent de la scolarité et les empêchent de tirer profit des opportunités leur permettant de vaincre la pauvreté.

Elle a, cet effet, appelé à déployer davantage d’efforts en vue de mettre fin aux mariages forcés et précoces à travers notamment des actions de sensibilisation et des initiatives de la société civile.

Par Abdelatif ABILKASSEM

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