Signataire d’une convention avec les autorités pour l’institution d’un nouvel institut de formation professionnelle spécialisée dans les métiers de l’industrie pharmaceutique, la fédération sectorielle porte de grandes ambitions notamment dans l’accompagnement du chantier de la couverture médicale universelle.
Vous venez de signer avec les autorités une convention pour la mise en place d’un institut de formation professionnelle spécialisé dans les métiers de l’industrie pharmaceutique. Quels ont été les tenants de cette initiative?
C’est à notre demande que ce projet a été discuté avec Arafat Atmoun, secrétaire général du département de la Formation professionnelle depuis près d’une dizaine de mois, et a abouti à la signature de cette convention avec notre fédération, le ministère de l’Éducation nationale, le ministère de l’Industrie et le président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Chakib Alj.
Le secteur pharmaceutique marocain est un secteur de technologie de pointe développé depuis les années 1960 dans notre pays. Il est composé aujourd’hui de cinquante-et-un établissements pharmaceutiques, opérateurs nationaux et multinationales, et emploie environ 55.000 personnes de manière directe et indirecte dont au moins 98% sont des citoyens marocains. Ce secteur qui est aujourd’hui un patrimoine marocain fonctionne grâce à des ressources humaines de nombreuses disciplines scientifiques et autres.
Et ce dans les normes de qualités des pays les plus développés, comme ceux de l’Union européenne (UE) ou les États-Unis. Et ce nouvel institut aura pour mission de nous accompagner dans notre développement. Et encore plus que cela, il permettra à notre pays d’offrir une plateforme de formation pour les besoins des pays africains avec lesquels la volonté royale de coopération Sud-Sud concrétisée depuis des décennies nous apporte toute la dynamique nécessaire pour en assurer le succès.
Beaucoup avaient été surpris de découvrir, au début de la Covid-19, que ce soit au Maroc même que Sanofi fabrique sa chloroquine, utilisée par les autorités pour traiter les patients. Comment un laboratoire aussi prestigieux en est-il venu à faire confiance à l’industrie pharmaceutique marocaine?
Vous me permettez de souligner d’abord l’intérêt stratégique du médicament et de l’importance de la souveraineté nationale pour le bienêtre de nos citoyens. En effet, c’est grâce à la clairvoyance de nos autorités en plus haut lieu, et ce depuis l’indépendance, que l’investissement dans la fabrication locale a été encouragé et imposé.
Et c’est grâce à la confiance des groupes internationaux qui ont investi localement et au dynamisme d’opérateurs nationaux qui ont investi aussi bien dans l’innovation -les opérateurs de notre fédération représentent les médicaments d’environ 260 sociétés étrangères sur les 280 présentes au Maroc- que dans les médicaments génériques. Et ceci aux normes officiellement européennes -officiellement appliquées par notre ministère de la Santé.
Et ce avec une qualité cautionnée par notre laboratoire national de contrôle des médicaments du ministère de la Santé. Aujourd’hui c’est plus de 50% de notre consommation nationale en valeur qui est fabriquée localement. Soit la moitié du chiffre d’affaires annuel actuel qui est de 16 milliards de dirhams et dont environ 75% est assurée par les opérateurs de notre fédération.
Par ailleurs, aujourd’hui 40% de cette consommation totale est assurée par des médicaments génériques qui permettent une économie de plus de 3 milliards de dirhams par an par rapport au princeps. Avantage précieux pour le citoyen et les systèmes de prise en charge. Et encore plus appréciable à l’avenir avec la généralisation de la couverture sociale pour 2022 qui vient d’être royalement engagée pour nos citoyens.
Maryam Bigdeli, représentante de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) au Maroc, confiait récemment à Maroc Hebdo que le Royaume avait les capacités scientifiques et industrielles pour concevoir un jour un vaccin pouvant par exemple prévenir une maladie comme la Covid-19. Partagez- vous son optimisme?
Totalement. Il faut savoir que notre pays dispose déjà de toutes les infrastructures techniques et les compétences humaines -médicales, pharmaceutiques, biologiques et autres. Et de nombreux départements et institutions de recherche et développement -universités, Centre national pour la recherche scientifique et technique (CNRST), fondation MAScIR. Plusieurs experts marocains participent déjà à ces recherches au niveau international et souhaiteraient souvent apporter leur contribution à leur pays.
Malheureusement ce type de développement exige en général des financements importants. Et sans un soutien et un accompagnement de la part de l’État, cela reste aujourd’hui difficile à entreprendre. Mais il faut souligner par ailleurs que notre pays a déjà fait preuve d’un grand dynamisme en assumant localement la fabrication des masques, des tests de diagnostic, de respirateurs en cours de développement. Ce qui est à saluer dans cette pandémie.
Vous avez fait référence tout à l’heure au chantier de la généralisation de la couverture médicale; le ministre de l’Education nationale, Saaid Amzazi, a notamment mis l’accent, au cours de la signature de la convention relative au nouvel institut de formation professionnelle, sur le rôle que vous pourriez à cet égard. En quoi pourrait exactement consister ce rôle?
Il faut savoir que le médicament est l’outil indispensable et complémentaire dans les soins de santé. Il représente actuellement environ 25% des “dépenses” de santé prises en charge par l’assurance maladie. D’autre part, il est largement prouvé au niveau mondial son rôle dans le progrès médical et le prolongement de l’espérance de vie auquel il a largement contribué.
La souveraineté nationale en matière d’approvisionnement en médicaments de qualité et de coûts maîtrisés est une condition essentielle pour tout pays. C’est pour toutes ces raisons que notre industrie pharmaceutique revêt un intérêt stratégique pour l’accompagnement de la généralisation de la couverture médicale. Notre industrie assure aujourd’hui la disponibilité aussi bien de médicaments d’innovation que de médicaments génériques nécessaires pour l’amélioration de l’accès.
En plus de cela, elle contribue au développement socio-économique du pays -par l’emploi, l’amélioration de la balance commerciale, une valeur ajoutée locale, une contribution fiscale stable, la formation et le développement de la recherche.
Vous constituez depuis fin février 2021 une fédération affiliée à la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) alors que vous aviez jusqu’alors le titre d’association indépendante. Pourquoi ce choix?
Effectivement notre association, l’Association marocaine de l’industrie pharmaceutique (AMIP), existait depuis 1985 et a accompagné le développement du secteur -avec des membres aussi bien nationaux que des multinationales. Et ce avec beaucoup de dévouement et de persévérance des différents bureaux qui en ont eu la charge. Avec le temps nous avons réalisé que notre voix ne portait pas beaucoup -probablement pas par l’âge mais plutôt par le manque d’écoute des interlocuteurs.
Aussi, nous avons jugé utile de faire porter notre parole par une institution de plus grande envergure, à savoir la CGEM, dont la mission est de soutenir et d’accompagner le développement de l’ensemble des industries du pays et qui ne ménage aucun effort dans ce sens.
Nous la remercions au nom de son président de nous avoir coopté et espérons apporter notre meilleure contribution dans l’intérêt de notre pays et de nos citoyens.