Passage à tabac à Setif pour le Raja et ses supporters
INSTRUMENTALISATION. La culture de la haine distillée par l’Algérie n’a pas épargné le foot. Au fil des provocations, Alger ne désespère pas d’entraîner le Maroc dans la spirale infernale des rétorsions. Quitte à précipiter toute la région dans un supplément de confrontation dévastatrice.
On croyait assister à une rencontre de football, on a vu autre chose. Non pas sur l’aire du jeu; pas non plus pendant le déroulé de la partie; mais sur les gradins, dans l’après-match. Le Wifak Setif recevait le Raja de Casablanca, le vendredi 1er mai 2015. À l’aller tout s’était bien passé dans les meilleures conditions possibles, tant au niveau sportif que pour l’accueil et l’hébergement. Même le comportement du public n’a, à aucun moment, été insultant ou humiliant, hormis les sifflets de rigueur pour l’équipe adverse. Peutêtre qu’avec les frères ennemis du Wydad, le verbe aurait été plus haut et plus inamical.
On était en droit d’espérer que les joueurs du Raja ne se sentiraient pas dépaysés, comme ne l’ont pas été les joueurs et les accompagnateurs de Setif à Casablanca. C’est exactement l’inverse qui va se produire au vu d’une planète foot déboussolée. Les footballeurs en déplacement ont l’habitude des stades chaudrons, des échanges enflammés sur les gradins, voire des empoignades entre supporters à la sortie. À Setif, rien de tout cela; pas une échauffourée, ni pendant, ni après la rencontre. Aucun signe précurseur des scènes qui allaient suivre.
Un certain Hammar
Déjà à la mi-temps, le banc de touche du Raja est assailli par des dirigeants du club algérien, à coup d’invectives d’une vulgarité extrême. Les joueurs casablancais sont encerclés par les policiers, non pas pour les protéger, mais pour les empêcher de rejoindre les vestiaires. Le président de Setif, un certain Hassan Hammar, semblait vouloir sauter à la gorge de son homologue marocain, Mohamed Boudrika. Il n’a d’ailleurs pas hésité à lui cracher au visage. A chacun des deux buts de Setif, Hammar faisait un geste obscène en direction du staff marocain, dans une tribune d’honneur qui, elle, ne méritait plus son nom. Côté gradin, la situation n’était pas meilleure. Les supporters du Raja ont été sommés de ne pas bouger avant que les spectateurs algériens n’aient quitté le stade. On comprendra très vite que c’était pour mieux les tabasser, après les avoir isolés. Un escadron de para-militaires armés de matraques leur est tombé dessus. Sur cet autre tableau de la marque, le score, à sens unique, a été d’une trentaine de blessés souffrant de multiples fractures.
Il est clair que ce genre de comportement, manifestement orchestré et supervisé par les autorités publiques du pays hôte, est une négation pure et simple de la morale sportive et des us et coutumes de voisinage. Reste à comprendre le pourquoi de ce déferlement d’agressivité. Une première piste pour remonter le fil d’une proximité problématique. Depuis la guerre des Sables, en 1963, en passant par le conflit du Sahara à partir de 1975, Houari Boumediene, ex-président algérien, et ses héritiers ont tout fait pour installer une culture de haine à l’égard du Maroc et des Marocains. Bouteflika n’a pas manqué d’y mettre du sien, lorsqu’il s’était répandu en insultes sur le pays, ses gouvernants et son peuple. Pour que cette mayonnaise haineuse prenne, il aurait fallu que le peuple algérien trouve les raisons d’y adhérer. Jusqu’ici, cela n’a pas été le cas.
Débordements émotionnels
Tout indique que le commun des Algériens ne se sent pas concerné par l’objet annoncé de cette attitude belliqueuse, la question du Sahara marocain. Le Polisario reste un corps étranger, mijoté dans les arrièrecuisines du palais de la Mouradia, qui n’a jamais eu droit de cité dans les esprits, ni déchaîné les passions dans les rangs d’une population qui a d’autres préoccupations, plus vraies et plus mentalement mobilisatrices. Ce match de foot en est l’une des illustrations. Même dans les épisodes de jeu les plus chauds, il n’y a eu aucune animosité du public algérien à l’égard des trois cents supporters marocains. Même le foot, sport populaire connu pour ses débordements émotionnels, ne s’est pas laissé facilement instrumentaliser. Si l’Algérie avait ouvert les frontières pour les siens, des milliers de fans de Setif seraient venus assister au match aller, à Casablanca.
Ridicule gesticulation
Comme quoi, l’affaire du Sahara est restée confinée dans les circuits fermés de l’État et de ses affidés indécrottables. Cette réalité, qui n’a pas varié depuis 40 ans, n’était pas pour plaire aux tenants du pouvoir à Alger. Le hiatus est immense entre le désintérêt des masses algériennes et la mobilisation des moyens de l’État pour financer et encadrer l’utilisation tapageuse de ce faux dossier devant les instances internationales. Une gesticulation qui vient de tourner au ridicule, l’espace d’un match de foot. On a l’impression que ce genre de provocations, tout comme celles régulièrement entretenues sur les frontières, ont pour but d’amener le Maroc à réagir dans le même sens. Les gouvernants d’Alger ne s’en cachent pas et ne renoncent pas, non plus. Mais l’absence de réponse sur le même mode, côté marocain, les énerve, toujours un peu plus. Et plus ils s’énervent, plus leur jeu devient ridicule.
Pourquoi donc l’Algérie s’emploiet- elle désespérément à provoquer l’étincelle qui précipiterait toute la région dans une confrontation militaire dévastatrice? La motivation de l’Algérie est à chercher dans sa situation intérieure. La question de la légitimité du pouvoir n’a jamais été résolue, à ce jour. On n’a pas cessé de se demander qui détient la réalité du pouvoir. Réponse invariable: c’est l’armée. Même lorsque l’armée n’est pas sous les lumières, elle est toujours aux manettes. Sa prise d’intérêts dans les revenus de l’État est énorme. Elle se doit, ne serait-ce qu’à titre formel, de justifier ses dépenses d’armement et les surfacturations qui permettent de dégager des retro commissions faramineuses. Pour cela, l’Algérie des généraux a besoin d’ennemi. À Alger, il a été décrété que le Maroc campera ce rôle. À partir de là, tout y passe, y compris le foot et le ridicule qui ne tue pas; malheureusement.