Alger fait une crise d'hystérie

Sahara marocain, sécurité… Rabat et Madrid accordent leurs violons

Si le Maroc et l’Espagne s’entendent désormais sur nombre de sujets et à leur tête la question du Sahara marocain, il n’en demeure pas moins que le nouveau positionnement du voisin ibérique, notamment la reconnaissance du plan d’autonomie marocain, a eu l’effet de l’épée de Damoclès sur la junte militaire algérienne.

Rabat, vendredi 8 avril 2022, le président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, a répondu à l’invitation du Roi Mohammed VI et a partagé avec lui la table de la rupture du jeûne. Une rencontre pleine de symboles, de promesses et d’ambitions. En effet, les discussions entre M. Sanchez et le Roi Mohammed VI ont scellé une nouvelle ère. Le résultat immédiat de cette embellie dans les relations historiques des deux pays a été la ratification par les deux pays d’un accord sécuritaire majeur, signé en 2019, et qui devait entrer en vigueur fin avril 2022. Outre la réouverture des liaisons maritimes, l’une des retombées directes de cette entente est la décision prise de tenir dans les prochaines semaines, pour la première fois depuis sept ans, la réunion bilatérale de Haut-niveau. Faut-il rappeler qu’elle devait avoir lieu en décembre 2020 et que le Maroc l’a reportée sine die à la suite de la réaction déplacée de l’ancienne chef de la diplomatie espagnole, Arancha Laya Gonzalez, à la reconnaissance américaine de la souveraineté du Maroc sur son Sahara.

Compte tenu que les deux voisins de la Méditerranée sont désormais sur la même longueur d’onde, cette réunion de haut-niveau, en principe annuelle, sera régulière. Bien entendu, quand les relations diplomatiques et politiques sont au beau fixe, la coopération dans tous les domaines est portée à un palier supérieur, notamment en matière de sécurité mais aussi au niveau des échanges commerciaux, sachant que l’Espagne est le premier partenaire économique et commercial du Maroc.

Plus grand échec diplomatique
Quant à Sebta et Mellilia, deux volets sont à discuter. Sur un plan économique, la réouverture des frontières terrestres ne sera pas synonyme de tolérance de la contrebande. Sur un plan politique, l’accord tacite qui lie les partenaires veut que le Maroc mette en veilleuse, pendant un certain temps du moins, ses revendications de ces deux enclaves. Si Rabat et Madrid s’entendent désormais à merveille et accordent leurs violons sur nombre de sujets et à leur tête la question du Sahara marocain, il n’en demeure pas moins que le nouveau positionnement du voisin ibérique, notamment la reconnaissance du plan d’autonomie marocain comme la solution la plus crédible et réaliste pour la résolution du différend, a eu l’effet de l’épée de Damoclès sur la junte militaire algérienne.

Les locataires du palais d’El Mouradia n’ont pas pu faire le deuil de ce qui est considéré comme leur plus grand échec diplomatique. De menace en menace, la riposte est hystérique. La nouvelle position de l’Espagne vis-à-vis de la question du Sahara marocain continue de provoquer l’ire des responsables algériens. Après avoir convoqué son ambassadeur à Madrid pour consultations et menacé officiellement par le truchement du secrétaire général du ministère algérien des Affaires étrangères, Chakib Kaid, de «réviser tous ses accords» avec l’Espagne, le patron de la Sonatrach a rajouté à ces déclarations incendiaires une autre dans laquelle il menace de revoir à la hausse les prix du gaz fourni au voisin ibérique.

«Depuis le début de la crise en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole explosent. L’Algérie a décidé de maintenir, pour l’ensemble de ses clients, des prix contractuels relativement corrects. Cependant, il n’est pas exclu de procéder à un recalcul des prix avec notre client espagnol», a déclaré le PDG du groupe Sonatrach, Toufik Hakkar, relayé par une dépêche de l’agence officielle algérienne APS en date du 1er avril 2022.

Dommages collatéraux
Au cas où elle serait mise à exécution, cette décision ne profitera au final qu’aux Etats-Unis. Depuis la fermeture le 31 octobre 2021 du gazoduc Maghreb-Europe, par le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, les exportations de gaz américain vers l’Espagne sont montées en flèche. L’Espagne a produit en février 2022, 12.472 gigawattheures (GWh) d’électricité à partir de gaz provenant des Etats-Unis, soit 32,9% du total des importations de ce produit, contre 8.801 GWh à L’Algérie, soit 23,2%, indiquent des statistiques officielles de la société Enagás, chargée du maintien et du développement des infrastructures gazières en Espagne.

Le 28 mars à Rome, le secrétaire général du ministère algérien des Affaires étrangères, Chakib Kaid, a déclaré au journal espagnol El Correo qu’«il est clair que l’Algérie va revoir tous les accords avec l’Espagne, dans tous les domaines, pour voir à l’avenir comment les relations se développent ».

Ces représailles interviennent deux jours après que le régime algérien, par le truchement de son agence officielle de presse APS, a accusé l’organisation onusienne l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’enfance) d’être à la solde du Maroc.

Un autre dommage collatéral du rapprochement Maroc-Espagne est que les autorités algériennes ont commencé, depuis lundi 11 avril 2022, à compliquer l’entrée des bovins en provenance d’Espagne sur le marché algérien. Selon le média espagnol La Razon, ces entraves se sont multipliées depuis quelques jours et ont abouti à un blocage de l’accès du marché algérien pour les éleveurs et opérateurs commerciaux espagnols.

«Cela peut paraître mineur dans le contexte global des relations commerciales entre l’Espagne et l’Algérie, si l’on compare le volume économique des ventes de bétail avec celui des importations de gaz en provenance de ce pays, mais c’est un fait significatif», estime le journal, qui considère que cette récente décision, avec celle d’augmenter le prix du gaz algérien vendu à l’Espagne «sont des signes évidents que quelque chose a changé».

Alger se tourne désormais vers la France pour ses achats de veaux. Comme elle l’a fait en privilégiant l’Italie pour ses exportations de gaz. Malgré ses réactions et menaces, l’Algérie est affaiblie et isolée plus que jamais. Elle n’arrive pas à ravaler un sentiment amer après moult humiliations. Quant au Maroc et l’Espagne, la nouvelle page est encore vierge. Elle sera remplie d’initiatives qui servent l’intérêt des deux pays.

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