L’affaire des poursuites pour diffamation à l’encontre de plusieurs médias français accusant le Maroc d’espionnage téléphonique à l’aide du logiciel Pegasus a été portée à l’Assemblée nationale française. Des partis politiques demandent à l’État de défendre la presse.
En France, l’approche des élections présidentielles 2022 pousse certains partis politiques à piocher dans des affaires en cours devant la justice, tant qu’elles concernent un pays comme le Maroc qui compte beaucoup de ressortissants en Hexagone. Certains partis politiques se sont donc mêlés de l’affaire Pegasus, qui, pour rappel, a éclaté le 18 juillet 2021 à la suite d’une campagne médiatique menée par 16 médias (dont certains français) dans 10 pays, qui ont publié les conclusions du rapport l’ONG Forbidden Stories en coordination avec Amnesty International relatif à une affaire d’espionnage téléphonique de grande ampleur ciblant des politiques, journalistes, militants et avocats dans le monde, dont le président français Emmanuel Macron.
Ils ont porté l’affaire à l’Assemblée nationale et ont dans leur viseur le Maroc qui, par le truchement de son ambassade à Paris, a porté plainte contre sept médias français dont L’Humanité, Le Monde, Radio France et Mediapart, mais aussi contre le journal allemand Su?ddeutsche Zeitung, en plus de l’association Amnesty International, qui n’ont jamais apporté les preuves de leurs allégations.
"Liberté de la presse"
Et c’est justement ces plaintes déposées par le Maroc qui ont été à l’ordre du jour lors des questions orales des élus à l’Assemblée nationale, mardi 26 octobre 2021, le jour même où le tribunal correctionnel de Paris a examiné la requête déposée par le Maroc et a décidé une nouvelle audience le 6 décembre 2021. Le député de Seine-Maritime pour la Gauche démocratique et républicaine (qui regroupe cinq partis d’extrême gauche), membre du Parti communiste français (PCF), Jean-Paul Lecoq, s’est adressé au Premier ministre, qualifiant l’action en justice contre L’Humanité et les autres médias concernés de «totalement politique ».
«Monsieur le Premier ministre, pourquoi êtes-vous resté muet face aux attaques de Pegasus, puis face aux attaques du Maroc contre nos médias? Ces plaintes sont des procédures- bâillons contre la liberté de la presse, donc contre nos propres libertés, dont vous êtes censé être le garant», a lancé M. Lecoq. «Depuis la Révolution française, il est rarissime qu’un État étranger dépose plainte contre des médias français pour les faire taire. Six plaintes sur sept, déposées depuis la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, et son article 11 qui garantit la liberté de la presse, l’ont été par le Royaume du Maroc», a-t-il martelé.
Le secrétaire d’État aux Affaires européennes, Clément Beaune, a réagi en rejetant tout «laxisme» ou «hésitation». «Les procédures judiciaires sont en cours. Le Premier ministre et le Garde des sceaux ont eu l’occasion de répondre sur ce point précis, il y a déjà quelques semaines, donc nous ne sommes pas muets sur cette affaire», a-t-il déclaré, tout en appelant à «laisser ces instructions se faire devant les cours françaises, car c’est le droit d’un justiciable, même étranger en l’occurrence».
Dans le cadre de cette affaire, la classe politique marocaine ne s’est jamais manifestée. Aujourd’hui, alors que certaines formations politiques françaises en débattent au Parlement, les partis politiques marocains doivent, eux aussi, réagir et défendre le pays sachant que ni les commanditaires ni les «exécutifs» de cette campagne contre le Maroc n’ont de preuves à l’appui de ce qu’ils avancent.